Connexion

Actualités

Teenage Lobotomy

Teenage Lobotomy évoque furieusement le roman de Ballard Sauvagerie (ex Massacre de Pangbourne, Belfond), et n’est pas si éloigné que ça des préoccupations tardives du grand écrivain anglais.

C’est l’histoire d’Alan Jones, photographe de cul par profession, nanti d’un père, d’une mère et d’une sœur, Missy, ainsi que d’un patron. Tout commence lorsqu’il a le mauvais goût de faire un infarctus un soir de Noël… Vous me direz ne pas bien voir le rapport avec les ados preneurs d’otages de la quatrième de couverture, et je vous concéderai qu’on en est assez éloigné mais que, de fil en aiguille, tout un enchaînement d’événements en apparence fortuits y conduira. Après l’infarctus, le premier tiers du livre se pare des atours du drame familial où Missy occupe le devant de la scène, les parents juste derrière… Durant la convalescence de Jones, divers éléments liés à la Syrco, un labo pharmaceutique, se mettent en place et semblent a priori sans importance. Pour Jones, ils apparaissent comme tout à fait fortuits ; ensemble d’incidents, de micro-événements dont est tissée la vie de tous les jours. Mis au vert, Jones croise dans l’établissement de repos où il se rétablit les Basden, une famille dont le père, pharmacologue, a mis au point le produit phare de la Syrco, le Fluvotril, connu comme drogue de l’obéissance destinée aux ados indisciplinés tel que son fils.

Quand Klebold électrocute ses parents, on a l’impression d’entrer dans un autre livre. La famille Jones cède le devant de la scène à d’autres personnages : l’inspecteur Lafleur, chargé de l’enquête ; Richard Kean, qui dirige un centre pour adolescents violents où le Fluvotril est utilisé. Vient se poser la question de savoir si le Fluvotril n’aurait pas de redoutables effets secondaires, et ne serait pas responsable du passage à l’acte meurtrier de certains ados. La Syrco s’en défend. Alan rencontre Richard Kean qui dirige le centre de Firnone où est, entre autres, traité Klebold. Notre photographe prend lui aussi des calmants. Il commence à être victime d’hallucinations et à se voir un peu partout à l’age de six ans… Puis un événement fortuit survient, qui achève de faire voler en éclats l’univers des Jones. Le séisme ébranle la famille et les cadavres sortent du placard. Le puzzle des réminiscences finit par triompher du refoulement. Tous les événements ne semblant en rien liés finissent par entrer en résonance pour révéler, au personnage comme au lecteur, qu’Alan Jones est lui-même un… A vous de lire.

Ce roman fonctionne à la manière d’une toile d’araignée. Toute la trame du récit, en apparence due au seul hasard, a été minutieusement élaborée par l’auteur. Chaque événement touche un fil qui fait vibrer l’ensemble, et cette vibration est éminemment spéculative. S’il ne répond pas à la question des effets secondaires du Fluvotril, ni à celle de savoir si un psychotrope pourrait se substituer à l’éducation, voire à la morale, le roman donne à réfléchir tandis qu’en sous-main l’auteur laisse comprendre ce que lui préconiserait…

Fabien Henrion n’est pas Ballard : les mécanismes qu’il choisit de mettre en exergue sont davantage psychologiques que sociologiques. En revanche, la question de savoir quelle place nos sociétés laissent à l’individu est, elle, bel et bien ballardienne. Teenage Lobotomy est intéressant par les questions qu’il soulève, non par les réponses qu’il n’apporte pas…

Tau Zéro

Manchu a réalisé l’une de ses plus belles illustrations pour ce roman qui a dû attendre plus de quarante ans sa traduction française ! Tau zéro est paru outre-Atlantique en 1970, aux plus chaudes heures de la contre-culture et de la new wave, alors que paraissaient là-bas les Dangereuses visions d’Harlan Ellison et les anthologies Orbit de Damon Knight. Mais aux USA, il y avait encore de la place éditoriale pour un livre de facture aussi classique sous réserve qu’il soit bon. Dans le même temps, en France, s’imposait une gauche culturelle qui ne tarderait pas à squatter toute la place disponible. Pas encore considéré de ce côté-ci de l’Atlantique comme un auteur majeur, mais déjà comme un auteur de droite, Poul Anderson allait se voir ostracisé en compagnie notamment de Larry Niven et Ben Bova. Quinze ans plus tard, la révolution culturelle de la science-fiction française était passée de mode et s’il n’y avait plus de gardiens à l’oubliette où gisait Poul Anderson, nul n’avait songé à l’en tirer. Gageons que si, quinze années plus tard encore, Olivier Girard n’en avait fait l’un des auteurs fétiches de sa maison, il y croupirait encore… Tau zéro est ainsi le huitième volume de Poul Anderson à paraître au Bélial’.

Certains qui méconnaissent la SF la résument ainsi : « Des histoires de fusées qui vont dans les étoiles ». Eh bien oui ! Tau zéro correspond exactement à cette définition. Difficile de faire plus classique ! On a dit du fabuleux trompettiste Miles Davis qu’il avait donné à nombre des plus grands standards du jazz leur version la plus aboutie, indépassable… C’est ce que Poul Anderson a fait pour ce thème de la SF. Pas moins. Il remet une fois de plus sur le métier ce pont aux ânes de la SF qu’est le récit de la première expédition interstellaire pour en extirper la quintessence, la forme ultime. Pour ce faire, il va recourir aux canons de la hard science… On pourra comparer, juste pour le fun, avec ce navet sidéral qu’est Le Papillon des étoiles de Bernard Werber !

Le Leonora Christina emporte dans ses flancs un équipage mixte à parité composé de la fine fleur de spécialistes en tout genre pour un voyage sans retour vers Bêta Virginis, plus connue sous son nom arabe de Zavijava, distante d’une trentaine d’années-lumière. On découvre certains membres de l’équipage, dont Charles Reymont, le gendarme, force de l’ordre de cette petite communauté, qui confèrera bien un ton conservateur au roman. Mais surtout, on découvre l’astronef. Son mode de propulsion relativiste, les solutions retenues et les conséquences de leur mise en œuvre. Non seulement ce n’est pas lourdingue, mais c’est ça qui est vraiment passionnant, et ça l’est parce qu’Anderson joue la carte de la hard science, du scientifiquement plausible qui aboutit à ce joli paradoxe : on peut aller beaucoup plus vite que la lumière bien que cette vitesse soit indépassable ! On a droit en prime à un petit cours soft de relativité. Toutes ces perspectives techniques sont commentées dans la passionnante postface de Roland Lehoucq, bien connu des lecteurs de Bifrost. Tout devient clair comme de l’eau de roche à ceux qui, comme moi, avaient toujours trouvé ces concepts intéressants, mais confus et rébarbatifs. Les choses ne sont compliquées que tant que l’on ne vous les explique pas simplement.

Le bât blesse au niveau des diverses péripéties qui agitent la petite communauté d’astronautes ; un brin de jalousie par là, bien que ce soit une société aux mœurs très libérées, un bourre-pif par ici ; un coup de raide de temps à autre pour se remonter le moral et, si ça ne suffit pas, une bonne âme se dévouera pour une gentille partie de bête à deux dos. A vrai dire, on s’en fout carrément ! La seule péripétie intéressante est l’accident. L’astronef traverse une minuscule nébuleuse où il détériore son système de freinage et le voilà contraint de continuer à accélérer sans fin. Il va manquer sa cible, c’est anecdotique…

L’astronef accélère sans cesse, s’approche toujours davantage de la vitesse de la lumière sans jamais l’atteindre, mais, ce faisant, le temps à bord passe de plus en plus lentement par rapport à un observateur qui serait resté sur Terre, par exemple. Ils escomptent trouver dans le cosmos un endroit suffisamment vide entre les galaxies pour pouvoir réparer sans être irradié à mort quand ils couperont les moteurs. Le voyage prendrait alors fin quelque part dans l’amas de la Vierge, à une vingtaine de mégaparsecs de la Terre, soixante millions d’années dans l’avenir. Mais ça ne suffit pas ! Le plongeon dans l’espace et le temps devient de plus en plus vertigineux… Ça, c’est du sense of wonder !

Pour une fois, le panégyrique de quatrième de couverture est parfaitement justifié. L’un des cent livres de SF les plus importants jamais écrit pour David Pringle (je confirme : il est entré sans difficulté dans mon top cent personnel). Récit de science-fiction ultime pour James Blish. La science-fiction à l’état pur. Faites lire ce bouquin à ceux à qui vous voulez faire découvrir la SF : si ça ne leur parle pas, ils sont d’ores et déjà perdus pour le cœur de genre. En ces temps où l’amateur de trolley-dragons peine à choisir ses lectures tant il s’en produit, Tau zéro va aisément s’imposer aux lecteurs de SF comme l’un des incontournables de l’année. En publiant ce livre, le Bélial’ a fait davantage que de combler un vide, il a corrigé une faute.

Gratte-ciel

Science-fiction. Turque. Voici deux mots que nous n’avons guère coutume de voir associés l’un à l’autre. Pourtant, une histoire située en 2073, dans l’avenir, donc, relève indubitablement de la SF ; certains la définissent même ainsi.

Et le droit ? Les fictions juridiques ne sont pas vraiment ce qui manque, loin s’en faut. On y traite, de manière plus ou moins fantaisiste, d’affaires fictives dans un cadre juridique contemporain (ou passé). Par ailleurs, certaines histoires de SF ont été abordées selon l’angle juridique. Qu’est-ce que le droit dit de l’extraterrestre ? Du clone ? De l’intelligence artificielle ? On y examine diverses figures traditionnelles de la SF à la lueur du droit réel. Mais jamais ce dernier n’est fondamentalement remis en cause.

C’est là que Gratte-ciel diffère de tout ce que le lecteur de SF a pu lire par ailleurs. Le roman aborde l’avenir du droit lui-même ; plus spécifiquement, de la justice. C’est à un retournement de paradigme que nous convie Tahsin Yücel. Ce n’est plus l’objet SF qui est vu à l’aune du droit contemporain, mais la justice vue à l’aune de la SF. Le droit et la justice ont appris à examiner des milliers d’objets apparus dans le réel : des bagnoles, des propriétés intellectuelles, des objets numériques, des assassinats éthiques… Ils étaient à même d’examiner les objets fictifs créés par la SF. Démarche qui relevait en quelque sorte d’une anti-SF. Yücel nous propose ici de remettre les choses dans leur ordre naturel en interrogeant le futur du droit lui-même. Sous la plume de l’écrivain turc, le droit devient donc l’objet de la science-fiction, ce qui n’est pour le moins pas courant. Il revient à la question fondamentale de la SF : et si…

Et si la justice était privatisée ? A priori, la question n’a rien de folichon, ni ne semble devoir déboucher sur de trépidantes aventures. Dans sa célèbre trilogie « FAUST », Serge Lehman avait laissé entrapercevoir le sujet à travers le statut de l’Instance. Il s’agissait d’une restauration d’éléments de droit féodal saxon par rapport à laquelle l’action était située en avant-plan, menée par un personnage tenant implicitement du superhéros et instaurant par là une rupture de cohérence. Que l’on manque d’éléments de comparaison pour évaluer Gratte-ciel marque bien l’originalité de ce bouquin.

Dans la Turquie de 2073, tout, des forêts aux eaux territoriales en passant par l’université, a été privatisé. Tout sauf la justice. Rien là que nous ne connaissions. Partout, les états bradent le patrimoine public — rien d’autre n’est demandé à l’état grec par les agences de notation : abandonner ce qui fonde leur réalité, se délester de tout ce qui ancre les états, donc les démocraties, dans la matérialité, les biens comme le service public. L’horizon 2073 me semble trop lointain pour cette problématique…

En 2073, l’architecte Temel Diker a décidé de transformer Istanbul en une cité utopique inspirée de New York, ce qui lui vaut son surnom de « New-yorkais ». Il veut y bâtir les gratte-ciel d’une ville tirée au cordeau qui n’est pas sans évoquer la Ciudad de Vados de La Ville est un échiquier (de John Brunner) et ses problèmes. Can Tezcan est l’un des meilleurs (des plus chers et des plus riches) juristes de la ville, et l’avocat de Diker dans une affaire qui l’oppose au propriétaire d’un pavillon sis sur un terrain convoité par l’architecte. Le juge fait traîner cette affaire perdue d’avance par ses riches amis pour ne pas devoir trancher en leur défaveur. C’est alors que l’idée vient à poindre dans la cervelle de Tezcan de privatiser la seule chose qui ne le soit pas encore dans ce pays : la justice. Ils chargent leur journaliste et ami Güneyt Ender de la communication autour de ce projet qui ne tarde guère à rallier les suffrages…

Mis à part ces gratte-ciel qui ont champignonné un peu partout dans Istanbul, l’an 2073 ressemble très curieusement à notre présent. Inutile d’y chercher quelque trace futuriste que ce soit ! Et l’action ? Si vous escomptez voir nos personnages se balancer au bout d’une ficelle sous un 747 comme le président des Etats-Unis incarné par Harrison Ford, allez voir Air Force One. Ici, les personnages ne font que ce que font les gens de pouvoir comme eux. Ils se rencontrent dans des salons et des bureaux luxueux à l’ambiance feutrée ; ils se téléphonent, se renvoient l’ascenseur et se font des crocs en jambes ainsi qu’il sied à des « amis de trente ans ».

Voici donc un livre très intéressant, fort différent de ce que l’on a coutume de lire — et qu’on gagnera à mettre en parallèle avec l’article d’Alain Devalpo, « L’Art des grands Projets inutiles », paru dans Le Monde diplomatique d’août 2012. Un roman à la saveur douce-amère, un brin mélancolique à l’égard des laissés pour compte, qui pousse à la réflexion. Un livre à découvrir.

Un vrai temps de chien

Initialement publié en 2000 sous le titre Autopsie d’un sans-papiers aux éditions le Passager clandestin, ce court roman bénéficie aujourd’hui d’une réédition en format poche sous l’intitulé Un vrai temps de chiens, titre initialement choisi par l’auteur. Si Olivier Las Vergnas, fondateur et directeur de La Cité des Métiers de La Villette, président de l’Association Française d’Astronomie, est un scientifique format XXL, nul besoin ici d’avoir fait calcul à la fac pour apprécier ce texte fondamentalement humaniste, profondément enragé et politiquement engagé. Voyez plutôt : Sirwan, Kurde sans papiers, vit avec Samira, jeune africaine elle aussi clandestine, dans le sous-sol d’un garage désaffecté de la banlieue parisienne sous l’emprise d’Otto, vétérinaire énigmatique au passé obscur. En échange de sa « protection », Sirwan, bricoleur de génie, doit fabriquer des chiens de combats automatisés. Afin de sauver Samira, gravement blessée à la jambe par l’une de ses créations, Sirwan va devoir sortir de sa retraite et se confronter à la réalité, à sa réalité, et véritablement appréhender sa condition de « sanspap ».

Alors, fiction ? Oui, mais pas seulement. Science-fiction ? Oui, un peu, comme une coloration, un code qui permet de véhiculer des messages. Anticipation sociale ? Oui, indubitablement, même si nous y sommes sacrément (jusqu’au cou !) tant notre réalité y est déjà très présente. En tout cas un texte qui, au-delà de ses aspects ludiques, nous invite, pour peu qu’on s’en donne la peine, à une réflexion sur la place de l’homme parmi les hommes, sur le « vivre ensemble ». Texte humaniste, enragé et politiquement engagé, donc. Mais pas simplement d’un point de vue partisan, même si certains pourraient trouver dans ce roman une sympathie « gauchisante » quelque peu agaçante. Ce serait pourtant une erreur de réduire ce roman à ce premier et seul niveau de lecture. Nous y voyons pour notre part un plaidoyer politique au sens où Max Weber a pu le décrire dans Le Savant et le politique, à savoir le croisement indispensable de la science, du jugement, du rapport aux valeurs et de l’engagement dans l’action politique. Il s’agit bien là du politique et non de la politique. A l’heure où la question des camps de rétention est à nouveau d’actualité — place des enfants, existence même de ces centres en France, traitement des malades, hygiène —, Olivier Las Vergnas nous propose ici de focaliser notre regard sur Sirwan et ceux qu’il représente. L’organisation de notre démocratie en a fait des « poussières de quota », des statistiques, des objectifs à atteindre. Assumons-nous cette manière de faire, ce traitement déshumanisé de l’humain ? De manière plus dogmatique, ces clandestins nous ont été présentés comme des étrangers, au sens sécuritaire du ter-me, au sens de celui qui génère la peur et l’exclusion. Acceptons-nous cette vision des choses ? Encore une fois, pas d’esprit partisan ici, pas d’angélisme non plus, ni de bonne conscience bourgeoise. Non. Simplement une proposition, celle de regarder en face ce qui se passe chez nous. Peut-être comme une alarme dont les stridences souligneraient combien notre histoire est beaucoup trop jalonnée de ces points aveugles, de cette récurrence implacable…

Un roman incisif, simple, rythmé, direct comme un coup de poing en pleine gueule, qui invite le lecteur muni d’un peu de distance, de recul, peut-être même de hauteur d’esprit, à s’interroger sincèrement sur sa propre vision du monde. Fiction, science-fiction, histoire d’amour et de désir (euh, oui… c’est des paroles de chanson, désolé !), réflexion sociale, sociétale et politique, comme quoi, encore une fois, quand c’est bien écrit et bien pensé, on peut encore trouver tout ça dans un roman de moins de 250 pages. Dans votre panier. Urgemment.

Heptagone

Heptagone se situe dans le droit fil de Forteresse (paru en 2005), dont il reprend — tout en le développant — l’arrière-plan géopolitique ainsi que les principaux personnages et thématiques, les deux ouvrages ayant manifestement été conçus pour se compléter. On pourrait discuter de la forme. Roman ? Fix-up ? En l’état, l’ouvrage se présente comme une suite de sept novellas qui se répondent de loin en loin sans jamais toutefois se recouper. Chaque novella adopte le point de vue d’un personnage et décrit à petites touches l’état du monde à l’horizon 2040. En forme « olympiquement » dépressive, Panchard dresse le tableau d’une société malade de la religion et du capitalisme, qui est peut-être déjà la nôtre : les Nord-américains vivent sous la dictature de l’obésité et de l’Union des Etats Bibliques Américains (UABS), l’Europe se remet comme elle peut d’une guerre contre les islamistes, le Vatican a adopté l’élection du Pape par tous les catholiques détenteurs de la carte de membre, tandis que les multinationales s’entredéchirent pour le pouvoir en employant des moyens d’une brutalité inouïe. On pénètre dans ce maelström d’images cauchemardesques (enfin, pas toutes : les nouvelles modalités du scrutin papal m’ont plutôt fait sourire) par la tête de Miyagawa, devenu tueur ninja implacable après une transformation doctrinale et physique radicale. Suivront Clayborne, ancien chef de la sécurité de la Haviland Corporation ; Caprara, la flic italienne, dont on suit le passé de combattante lors de la guerre contre les barbus ; Sherylin Leighton, exilée fuyant la théocratie américaine ; Barstow, le dissipateur ; Fuller, bras droit du président de l’UABS ; et Mitchell, artiste peintre en sujets religieux.

Tous éprouveront, à des degrés divers, le malaise profond, irréversible, qui agite les entrailles d’une société globale confrontée à la faillite de ses idéaux, systèmes et valeurs, ayant renoncé à tout projet collectif et semblant tourner le dos à l’idée même de progrès.

Fable anticipative angoissante, un brin hypertrophiée, Heptagone n’en reste pas moins un ouvrage enlevé dont les qualités reposent — au-delà de la reconstitution minutieuse d’un devenir possible, bien que partiel, de notre civilisation — à la fois sur une technique narrative sans faille, faite d’aller-retour incessants entre les époques, et sur un style très vif et très visuel aux formules qui font souvent mouche : « Il n’y a pas de méchants et de gentils. Et nous sommes les gentils. » (p. 155). Les récits sont de longueurs et d’intérêt certes variables, ne délivrant pas tous la même qualité ou quantité d’informations sur le monde mis en place par l’auteur, mais le soin apporté, tant dans la progression des intrigues que dans la construction des personnages, génère un indéniable plaisir de lecture. 

Robopocalypse

Pour une fois, la quatrième de couverture plante assez bien le décor : « Nous avons créé une nouvelle intelligence artificielle. Elle a décidé de nous éliminer pour sauvegarder la planète. Ça commence par vos téléphones portables, vos GPS et Internet. Puis elle prend le contrôle des jouets de vos enfants… La guerre contre nos propres machines est en marche. A nous de résister. » Un vrai pitch. Nous y reviendrons… D’un côté, la révolte des robots, fomentée par Archos, qui ressemble en bien des points au HAL de 2001, l’odyssée de l’espace, de l’autre la résistance internationale, organisée notamment autour de Cormac « Brightboy » Wallace (comme le héros écossais, ça ne s’invente pas ! Mais si, vous vous rappelez de Mel Gibson dans Braveheart ? Et bien voilà, himself). C’est lui qui nous raconte l’histoire de la Nouvelle Guerre — au travers d’archives retrouvées à la fin du conflit et qui relatent les actes de bravoure de différents protagonistes, de l’insurrection des robots en passant par l’extermination de la majorité de la race humaine, jusqu’à l’organisation de la lutte et la victoire finale. Pas vraiment besoin ici de préserver la fin de l’histoire, c’est écrit d’avance…

Annoncé comme le futur blockbuster de Steven Spielberg (sortie prévue fin avril 2014 aux US), et produit par DreamWorks SKG et la 20th Century Fox, Robopocalypse contient tous les ingrédients d’une grosse machine à faire du pognon. Daniel H. Wilson le dit lui-même dans les remerciements : « Les cinéastes de DW SKG m’ont manifesté leur enthousiasme dès le départ et m’ont aidé à écrire ce livre. » La machine est en route, donc, et ça devrait envoyer du lourd…

Soyons clair : nous sommes ici en présence de SF grand (voire très grand) public, et les puristes du genre — ou peut-être, plus simplement, les lecteurs exigeants ? — resteront sur leur faim. Et pourtant, il faut bien l’admettre, c’est sacrément efficace. Au point même qu’en la matière, on peine à imaginer comment faire mieux. L’intrigue est bien ficelée ; les chapitres sont courts, donnant à l’ensemble un rythme adapté ; le style est fluide ; les personnages bien campés. Bref, c’est écrit comme un scénario et le tout s’avère hyper-visuel. Evidemment, on a droit au dernier chapitre avec la totale : la morale, la happy end, l’espoir et l’histoire d’amour… Fantastique ! Présenté comme ça, dans les pages de Bifrost, on pourrait se dire qu’il vaudrait mieux éviter de se procurer le roman. Et pourtant non. Honnêtement, quand c’est aussi bien fabriqué que ça, aussi assumé, pourquoi bouder le plaisir d’une lecture ludique et sans prétention ?

A moins que le Fleuve noir ait hypothéqué le paquet de caramels mous des ayants-droits de pépé San Antonio pour l’achat, il s’agit certainement là d’un très joli coup éditorial qui promet des ventes importantes en grand format et en poche lors de la sortie du film en 2014, avec Chris Hemsworth, le mec de Thor, en acteur vedette — on s’interrogera d’ailleurs, ceci dit en passant, sur la présence de ce titre au catalogue de la vénérable maison de la place d’Italie, sachant que le même auteur a récemment publié chez Orbit/Calmann-Levy un Survivre à une invasion robot, soit un guide de survie dans l’univers du présent roman ; mais quoi… les voix de l’édition sont souvent impénétrables. Comme disait la sage vache qui rit : « Même les bios vont au Mac Do de temps en temps ». Alors, mangez-en ! 

Traum

Il fallait s’y attendre. La commémoration du décès de Philip K. Dick donne lieu dans nos contrées à une vaste opération commerciale. En vrac, des ouvrages para-textuels plus ou moins inspirés, des rééditions augmentées, à la traduction révisée ou pas, et les ultimes inédits de l’auteur américain. Fort heureusement, on échappe encore à la publication de sa liste de courses, sans parler de son armoire à pharmacie…

On le sait, l’œuvre de Dick a marqué l’Hexagone. Elle fascine ou agace, encourageant les ratiocinations et le bruit blanc. Elle suscite toujours les vocations et a réussi le tour de force de rassembler les publics du mainstream et des littératures de genre, guère en phase l’un avec l’autre (euphémisme).

Deuxième titre paru aux éditions du Feu sacré, toute jeune maison lyonnaise, l’essai d’Aurélien Lemant a toutes les apparences de l’ouvrage arty et intello chic. De quoi faire trépigner les vieux crabes s’agitant encore dans les casiers du fandom. Petit livre de 107 pages à peine, Traum (laissons de côté le sous-titre un tantinet fumeux) annonce d’emblée la couleur. Démontrer que l’œuvre de Philip K. Dick imprègne littéralement notre réalité. Prouver que ses thèmes, son doute existentiel, pour ne pas dire sa folie, hantent le spectacle de notre quotidien, contaminant jusqu’aux sphères musicales, cinématographiques et littéraires. Bref, la culture de masse au sens large.

A l’instar de nombreux autres écrivains, Aurélien Lemant fait de Dick un voyant déchiffrant la trame des rêves multiples qui masque notre réalité. Un voyant se souvenant d’une autre vie présente, très différente, comme il le proclame à la convention de Reims.

Pour Lemant, pas de doute : Dick était un écrivain dont les idées singulièrement vivantes infectaient/affectaient un peu trop le réel. Il a ensemencé l’imaginaire, et même la réalité, avec ses thématiques et ses obsessions intimes, entrant en résonance avec des préoccupations universelles.

Cette perspective ouvre les portes à un vertige métaphysique : « Toutes les réalités sont des réalités altérées, les unes vis-à-vis des autres. La réalité est multiplexe, non objective et question de point de vue. » Pour valider son argumentation, Lemant sélectionne quelques références cinématographiques, en particulier Inception de Christopher Nolan, musicales (Les Beatles), picturales (Salvador Dali) et textuelles (Antonin Artaud). Il jette ainsi des passerelles, tisse des parallèles, donne forme à ses intuitions et pointe les coïncidences entre ces créations artistiques. Mais, en dehors du fait que l’on a parfois du mal à le suivre, on ne peut se débarrasser du sentiment tenace qu’il enfonce des portes ouvertes.

En outre, Traum ne traite pas vraiment de l’œuvre de Philip K. Dick. Tout au plus trouve-t-on une poignée d’allusions à certains titres de l’auteur américain, notamment une interprétation assez intéressante du roman Les Clans de la lune Alphane. Le livre comporte également peu d’éléments biographiques, se cantonnant plutôt à une sorte d’exercice de style, vaguement théâtral, où le fourmillement des pistes et des idées tient lieu de fil directeur.

En conséquence, on ressort de cette lecture avec une impression mitigée. C’est bordélique, inachevé et au final assez frustrant. En somme, pas vraiment un livre indispensable, surtout pour le prix proposé (10 euros !). Pas question de se laisser tondre la laine sur le dos du mouton électrique !

La Guerre des Salamandres

Sans doute moins connu dans nos contrées, même s’il apparaît comme un acteur incontournable de la scène littéraire tchèque des années 1920-1930, Karel Capek fait figure de précurseur dans le domaine de la proto-SF européenne. Un auteur au moins aussi important que H. G. Wells, Rosny Aîné, Mau-rice Renard, Jacques Spitz ou Régis Messac, et dont la postérité a retenu surtout la paternité du terme robot, dérivé du tchèque robota (corvée), apparu pour la première fois au théâtre dans la pièce R.U.R. (Rossum’s Universal Robots, 1920).

Paru en 1936, La Guerre des salamandres suit peu ou prou un schéma proche de celui de R.U.R., tant du point de vue stylistique que thématique, les robots étant remplacés ici par l’espèce intelligente des salamandres. Karel Capek y déploie le même point de vue satirique, teinté d’humour noir, prenant pour cible les gesticulations pathétiques de ses contemporains. Son propos gagne juste en ampleur, s’étendant au monde entier pour se focaliser sur la géopolitique du milieu des années 1930.

L’argument de départ a le mérite de la simplicité. Le capitaine d’un navire de commerce découvre sur une île isolée de l’archipel de la Sonde l’existence d’une espèce animale inconnue. Confinée dans une baie retirée, une bestiole grégaire prolifère dans l’indifférence générale, maudite par les autochtones et chassée par les requins. Comme cette créature semble douée de raison — elle construit des digues sous-marines, creuse le rivage pour s’y abriter et utilise les outils qu’on lui donne —, le capitaine voit rapidement le parti qu’il peut tirer d’elle, en particulier pour la collecte des perles. De fil en aiguille, sa petite entreprise devient une grosse société dont les associés monopolisent cette population amphibienne prolifique, taillable et corvéable à merci. Flairant la bonne affaire, le Salamander Syndicate s’empresse de louer les services de ses salamandres aux différentes nations, disséminant l’espèce sur toutes les côtes et provoquant un boom économique mondial. Converties en ouvriers et en soldats par des pays avides de puissance et de croissance, les salamandres s’adaptent à leurs nouvelles conditions de vie et apprennent beaucoup au contact des humains, surtout leur savoir pratique, technique et utilitaire. Et l’humanité ne pressent pas que le péril vient de la mer…

La Guerre des salamandres est un prétexte pour mettre en lumière les travers de l’Homme. Dans un registre n’étant pas sans évoquer celui du conte philosophique, Karel Capek se livre à un joyeux dynamitage de la civilisation humaine. En effet, bien peu de domaines échappent à sa plume ironique et un tantinet surannée — ce qui fait également son charme. Nationalisme mortifère des Etats, culte de la pureté et du surhomme nazi, tentation totalitaire du communisme, querelles stériles de la Science, goût pour le sensationnel de la presse, futilité de l’industrie cinématographie, opportunisme à court terme du capitalisme, dérives sectaires et artistiques, Capek brocarde tout ce petit monde avec une verve fort réjouissante.

La Guerre des salamandres appartient à la même génération que La Guerre des mouches de Jacques Spitz (réédité en 2009 dans l’omnibus Joyeuses apocalypses, chez Bragelonne) et Quinzinzinzili de Régis Messac (dernière édition chez l’Arbre vengeur, 2007). Même s’il achève son roman par une touche plus optimiste, pour ne pas dire moraliste, Karel Capek partage avec ces confrères un état d’esprit semblable, comme une douloureuse certitude : l’humanité s’achemine vers sa perte, ou du moins vers une conflagration mondiale apocalyptique. Une prémonition confirmée dans les faits par la Seconde Guerre mondiale…

Bref, on ne peut que conseiller la lecture de cet ouvrage patrimonial. Une œuvre salutaire, sincère et finalement encore très contemporaine dans son constat et les réflexions accablées qu’elle suscite.

Exodes

Les fins du monde sont rarement gaies. Avec Jean-Marc Ligny, elles s’avèrent paradoxalement belles, à l’image de l’illustration de couverture très graphique de Teraf, fait suffisamment rare chez l’Atalante pour qu’on le signale.

Le lecteur avide de questions environnementales et géopolitiques se souvient sans doute de AquaTM. Le roman anticipait les plus que probables conflits de l’eau, se contentant, comme toute bonne SF, de pousser l’extrapolation jusque dans ses ultimes retranchements. Avec Exodes, l’auteur français nous projette en Europe, quelque part entre la fin du XXIe et le début du XXIIe siècle. Une projection dont on a pu découvrir un aperçu avec la nouvelle « Le Porteur d’eau » au sommaire du n° 56 de Bifrost. A cette époque, l’emballement du réchauffement climatique a fini par faire passer les pires prévisions du GIEC pour une aimable bluette. Les mesurettes préconisées par le développement durable apparaissent désormais comme l’ultime blague d’une économie productiviste ne voulant surtout rien changer à sa manière de faire. Le dernier pied de nez d’une société de consommation ne désirant rien bouleverser dans sa façon de vivre. On suit ainsi les itinéraires de six groupes à travers une Europe en proie au chaos, au struggle for life et à la barbarie. Des trajectoires jalonnées d’épreuves, de moments de répit, parfois d’espoir, mais qui s’achèvent surtout sur une voie sans issue.

Mélanie, l’amie des animaux, cherchant à faire le bien autour d’elle pour en récolter les bienfaits. Fernando, jeune homme parti autant à l’aventure que pour fuir une mère dévote, persuadée que les anges descendront bientôt du ciel dans leurs OVNI pour sauver les élus de l’enfer terrestre où croupit l’humanité. Elle prendra la route à la suite de son fils pour répondre à des visions. Paula, prête à tout pour protéger ses deux enfants. Olaf et sa femme, couple des Lofoten à la recherche d’un refuge, loin de la folie des hommes. Pradesh Gorayan, chercheur en génétique condamné à trouver le secret de l’immortalité s’il souhaite continuer à vivre en toute quiétude dans l’enclave climatisée et surprotégée de Davos. Tous se démènent pour survivre dans un monde où dieux et maîtres imposent leur férule sur des existences précaires.

Le récit de ces destins nous dévoile un vieux continent arrivé en bout de course. Squelettes urbains hantés par les Mange-morts, spectres décharnés, humains déchus retournés à l’état de bêtes dévorant les cadavres. Terres incultes polluées par les effluents toxiques et les remontées d’eau salée. Ecosystème à l’agonie, déjà colonisé par les successeurs de l’homme : fourmis, scorpions, plantes mutantes, méduses gorgées d’acide, moustiques porteurs de maladies tropicales… Routes à la chaussée tavelée par le soleil parcourues par des véhicules bricolés à la Mad Max. Villages retranchés où prévaut la loi du chacun pour soi. Et la menace constante des Boutefeux, hordes anarchiques vouées à la destruction, à l’annihilation et à l’extermination, histoire de purger la Terre de l’humanité, ce virus qui la ronge jusqu’à l’os.

Dans ce monde, seules quelques enclaves brillent encore des derniers éclats de la civilisation. Des havres de paix et de science ? Plutôt des mouroirs pour une classe de nantis, fins de race avides de découvrir le secret de l’immortalité afin de perpétuer leur pouvoir le plus longtemps possible sans se soucier du futur.

Roman noir de l’avenir, la dystopie de Jean-Marc Ligny secoue les certitudes. Si le réchauffement climatique et l’effondrement sociétal en résultant constituent l’arrière-plan d’Exodes, l’homme apparaît comme le cœur du propos de l’auteur. A la fois lyrique, sarcastique et cruel, Ligny ne ménage pas ses effets pour rendre son roman d’une lucidité douloureuse. Il se focalise sur l’humain, le dépouillant de son vernis d’être civilisé. Au rencart la compassion, la solidarité et la générosité. Que reste-t-il ? Un animal dont l’unique souci semble être d’arracher un jour de vie supplémentaire, quitte à le prendre à autrui. On reste pétrifié par ce comportement, hélas très vraisemblable.

Après AquaTM, Jean-Marc Ligny signe à nouveau un roman coup de poing. De ceux parlant autant à la tête qu’aux tripes. Une lecture plus que recommandable, pour ne pas dire indispensable !

Les étoiles s'en balancent

Littérature moraliste autant qu’exutoire aux peurs du présent, le roman post-apocalyptique (post-nuke, chez les Anglo-saxons) déroule ses paysages de désolation propices aux éternels recommencements. Qu’il soit pessimiste ou optimiste, quand il ne sert pas simplement de prétexte à un questionnement métaphysique, le genre semble un formidable générateur de récits aventureux, comme en témoigne Les Etoiles s’en balancent.

Dans un futur que l’on pressent proche, l’Hexagone n’est plus que décombres parcourus par des bandes ensauvagées : les hors-murs. Seules quelques villes-Etats ont survécu, offrant un ordre illusoire dans un monde retourné en jachère. Tom Costa n’a pas connu le monde d’avant. Il a appris à se débrouiller seul, ne comptant que sur lui-même et quelques relations. Epaulé par son mentor Armand, un néo-hippie ayant su se rendre indispensable auprès de la clique qui gouverne la cité de Pontault, il survit dans ce merdier où prévaut la loi du plus fort ou du plus malin. Entre vols en solitaire aux commandes de son ULM bricolé et troc avec les chicaneurs, as de la récup’, il est parvenu à se construire une bulle pour y filer le parfait amour avec San, sa volcanique amante. Et tant pis si le monde court sur son erre, à la dérive, entre famine et misère. Ce n’est pas son problème… Mais, conformément à l’adage : les gens heureux n’ont pas d’histoire. Cette Histoire, avec une grande hache, qui justement va le menacer de son couperet. Un danger venu du Nord, irrésistible, contraignant les villes-Etats à s’armer. En auront-elles le temps ? Le temps de mettre en pratique une de ces citations latines que semble priser Armand : « Si vis pacem, para bellum. »

S’il est un reproche que l’on ne peut pas faire à Laurent Whale, c’est celui de ne pas inspirer immédiatement la sympathie. Les Etoiles s’en balancent est un roman généreux et chaleureux, même si son contexte n’incite pas à la joie et la gaieté. Sur fond de déroute économique et sociale, Whale nous dépeint un monde n’étant pas sans rappeler celui du film d’Alfonso Cuaron Les Fils de l’homme. Aucun cataclysme nucléaire, aucune catastrophe naturelle ou autre pandémie ne vient expliquer ici le désastre total. L’homme apparaît bien comme le seul responsable d’une fin du monde en forme d’effondrement inexorable et prévisible du modèle de développement capitaliste.

Dans ce cadre guère réjouissant, Laurent Whale brode un récit d’aventures, servi par une galerie d’archétypes, préférant les dialogues incisifs aux descriptions et l’action à l’introspection. Le tout saupoudré d’une bonne pincée d’anarchisme. C’est vif, enlevé, et on ne s’ennuie pas un instant. Tout au plus peut-on lui reprocher d’abuser du cliffhanger dans le dernier quart du récit et de tirer un peu trop sur la corde sensible de l’amourette de Tom Costa. Toutefois, tout ceci apparaît comme des vétilles face au plaisir quasi-séminal que l’on éprouve en lisant l’histoire.

D’une certaine manière, Les Etoiles s’en balancent ressuscite le meilleur de l’état d’esprit de la défunte collection « Anticipation » du Fleuve noir. Les éditions Critic ne s’y sont d’ailleurs pas trompées en rééditant le livre dans leur nouvelle collection « Trésors de la rivière blanche ».

Au final, le roman de Laurent Whale s’avère un divertissement populaire réussi, animé par un esprit de générosité communicatif. Et quoi que l’on en pense, cela fait du bien de temps en temps.

  1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109 110 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 126 127 128 129 130 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 147 148 149 150 151 152 153 154 155 156 157 158 159 160 161 162 163 164 165 166 167 168 169 170 171 172 173 174 175 176 177 178 179 180 181 182 183 184 185 186 187 188 189 190 191 192 193 194 195 196 197 198 199 200 201 202 203 204 205 206 207 208 209 210 211 212 213 214 215 216 217 218 219 220 221 222 223 224 225 226 227 228 229 230 231 232 233 234 235 236 237 238 239 240 241 242 243 244 245 246 247 248 249 250 251 252 253 254 255 256 257 258 259 260 261 262 263 264 265 266 267 268 269 270 271 272 273 274 275 276 277 278 279 280 281 282 283 284 285 286 287 288 289 290 291 292 293 294 295 296 297 298 299 300 301 302 303 304 305 306 307 308 309 310 311 312 313 314 315 316 317 318 319 320 321 322 323 324 325 326 327 328 329 330 331 332 333 334 335 336 337 338 339 340 341 342 343 344 345 346 347 348 349 350 351 352 353 354 355 356 357 358 359 360 361 362 363 364 365 366 367 368 369 370 371 372 373 374 375 376 377 378 379 380 381 382 383 384 385 386 387 388 389 390 391 392 393 394 395 396 397 398 399 400 401 402 403 404 405 406 407 408 409 410 411 412 413 414 415 416 417 418 419 420 421 422 423 424 425 426 427 428 429 430 431 432 433 434 435 436 437 438 439 440 441 442 443 444 445 446 447 448 449 450 451 452 453 454 455 456 457 458 459 460 461 462 463 464 465 466 467 468 469 470 471 472 473 474 475 476 477 478 479 480 481 482 483 484 485 486 487 488 489 490 491 492 493 494 495 496 497 498 499 500 501 502 503 504 505 506 507 508 509 510 511 512 513 514 515 516 517 518 519 520 521 522 523 524 525 526 527 528 529 530 531 532 533 534 535 536 537 538 539 540 541 542 543 544 545 546 547 548 549 550 551 552 553 554 555 556 557 558 559 560 561 562 563 564 565 566 567 568 569 570 571 572 573 574 575 576 577 578 579 580 581 582 583 584 585 586 587 588 589 590 591 592 593 594 595 596 597 598 599 600 601 602 603 604 605 606 607 608 609 610 611 612 613 614 615 616 617 618 619 620 621 622 623 624 625 626 627 628 629 630 631 632 633 634 635 636 637 638 639 640 641 642 643 644 645 646 647 648 649 650 651 652 653 654 655 656 657 658 659 660 661 662 663 664 665 666 667 668 669 670 671 672 673 674 675 676 677 678 679 680 681 682 683 684 685 686 687 688 689 690 691 692 693 694 695 696 697 698 699 700 701 702 703 704 705 706 707 708 709 710 711 712 713 714  

Ça vient de paraître

La Maison des Soleils

Le dernier Bifrost

Bifrost n° 114
PayPlug