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Upside Down

Le futur est indéterminé mais quelques éléments disséminés ici et là nous indiquent qu’il se situe à quelques siècles de nous. En bas, Down Below, la Terre a morflé. Les océans sont des lacs d’hydrocarbures, le ciel est couvert du Brown, une brume épaisse qui cache le soleil et brûle les poumons. En bas, c’est une cour des miracles qui rêve de monter là-haut ou de tout faire péter. Là-haut, Up Above, c’est à 50 km au-dessus. Là se sont réfugiés les nantis sur des îlots artificiels au doux nom de Treblinka, Guernica ou Hiroshima. La vie y est longue et la maladie un souvenir. Des IA gèrent et quelques flottants, ceux d’en bas qui ont gagné un CDD en haut, participent à l’extrême utopie d’une élite isolée du reste du monde. On s’occupe à produire films et séries destinés à gaver les cerveaux d’en bas pour qu’ils ne s’échauffent pas à rêver de liberté et d’égalité. On clone des icones du passé : ici, les gens s’appellent Bill Gates, Elisabeth Taylor, Maggie Cheung, ou Che Guevara. Mais vous le savez, il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark. Maggie, l’actrice d’en haut, veut descendre trouver un sens à la vie ; Ferris, le musicien d’en bas, veut monter donner un sens au monde. Upside Down est un récit de révolte politique contre l’injustice, contre l’oppression, contre la mort. L’univers est dystopique mais le message se veut optimiste, empli du souffle de la vie.

À l’évidence, Richard Canal a pris plaisir à écrire Upside Down, en témoignent quelques envolées de plume. L’auteur aime le jazz, Maggie Cheung et le cinéma hongkongais, les symphonies de Malher lorsqu’elles sont jouées par le philarmonique de Vienne, et le polar des années 50. Mais Upside Down marche sur la tête. C’est un roman de science-fiction tourné vers le passé. Les très nombreuses références culturelles qui peuplent le roman n’appartiennent qu’au xxe siècle. Le temps s’est figé dans l’imaginaire de l’auteur, n’autorisant aucune évolution de la culture ou des mœurs. Les aspects science-fictifs ne sont qu’un décor, esquissant une scène où y mener l’action. L’auteur imagine des keinos, des animaux intelligents, mais loin de proposer une élévation à la David Brin ou Adrian Tchaikovsky, il leur donne un cerveau humain dans un corps animal pour reproduire les clichés du polar : Stany, le Saint-Hubert, est détective alcoolique et cynique. L’auteur imagine des IA qui, malgré leur étrangeté, ne servent que d’ultime deus ex machina. C’est un roman choral dans lequel les personnages n’ont pas d’existence tangible en dehors des scènes qui leur sont attribuées dans le moment du récit. Leur seule raison d’être est de servir le propos de l’auteur, et leurs motivations propres restent obscures. C’est un roman de révolte qui fait l’impasse sur le monde d’en bas, ne s’intéressant vraiment qu’au monde bourgeois d’en haut, plus simple à décrire, plus spectaculaire dans ses travers. Le polar séduira certainement plus d’un lecteur, moins le roman de science-fiction.

La Fabrique des lendemains

Dans les arts littéraires, la science-fiction est une fabrique de lendemains, avec ce pluriel qui qualifie la diversité présente plus que la quantité à venir. Se pose alors la question « Qui sort du lot ? » à laquelle Ellen Herzfeld et Dominique Martel, anthologistes de la collection « Quarante-Deux », répondent : Greg Egan hier, Ken Liu aujourd’hui, Rich Larson demain. Plus qu’un jeu de comparaisons, il s’agit de positionner un auteur sur le théâtre des opérations. Rich Larson est jeune et a l’imagination fertile, avec deux cents nouvelles publiées à 28 ans. Il est aussi quasiment inconnu chez nous. La publication du recueil La Fabrique des lendemains chez Le Bélial’ est un geste de découvreurs. L’auteur canadien écrit principalement de la science-fiction, mais ses horizons sont variés, allant de l’horreur parfois au cyberpunk souvent, sur Terre ou dans les étoiles. Il a fallu trier, choisir, pour guider le lecteur dans le foisonnement. La composition du recueil, c’est-à-dire l’agencement des nouvelles, participe au travail de mise en cohérence d’un univers qui à chaque instance gagne en ampleur, creuse plus profond le sillon. La traduction ciselée de Pierre-Paul Durastanti tisse les liens et déploie la trame.

De fait, les vingt-huit textes présentés forment un ensemble, une vision d’avenir, où les récits se suivent et se répondent, directement pour certains, thématiquement pour d’autres. Ce n’est d’ailleurs pas dans les thématiques abordées que l’on trouvera le plus d’originalité puisque celles-ci ne sont ni plus ni moins que les briques de base qui font la science-fiction d’aujourd’hui : réseaux connectés, technologies invasives, modifications génétiques et biomécaniques jusqu’à l’outrance. L’auteur nous propose un avenir sombre où la chair et le silicium font rarement bon ménage, où, comme chez Greg Egan, on livre sa conscience aux implants, où, comme chez Peter Watts, on se défonce par ennui aux virus mortels. L’originalité et la qualité de l’auteur se trouvent dans la manière. Les écrits de Rich Larson se distinguent par leur point de vue. Les récits sont à hauteur d’homme, et si les personnages évoluent dans des univers complexes, c’est à travers eux que le lecteur y accède. Tout est dans la précision des gestes, dans la qualité d’observation, dans le récit de l’humain, dans sa justesse. Lorsque Rich Larson parle d’un soldat du futur, modifié, immortel, il ne narre pas ses exploits guerriers, mais raconte l’enfant qu’il a été et les souffrances subies. S’il parle de machines ou d’intelligences artificielles, c’est par leurs interrogations face à l’intangible du monde. Le recueil aurait pu s’intituler L’humanité retrouvée. Ces textes possèdent une humanité qui souvent manque en SF. Je ne dirai pas que toutes les nouvelles se valent. Les plus courtes sont souvent les moins intéressantes. Mais il y a dans ce recueil des fulgurances bouleversantes : « Indolore », « De viande, de sel et d’étincelles », « On le rend viral ». Et que dire du magistral « Innombrables lueurs scintillantes » qui convoque le meilleur d’Adrian Tchaikovsky et de Ted Chiang ?

Le talent de Rich Larson est de nous convaincre que ce futur il ne l’a pas imaginé, mais il en a été le témoin, il l’a senti, il l’a vécu. De manière poignante. Lire La Fabrique des lendemains donne le sentiment d’assister à la naissance d’un immense auteur de SF.

En quête de Jack

China Miéville est un auteur singulier, qualifié d’hybride pour son goût à mêler les genres sans aucun respect des règles, au style marqué et clivant : on l’aime ou on le déteste. Principalement connu chez nous pour son «  Cycle de Bas-Lag » (cf. le dossier du Bifrost n°53), il s’est imposé comme l’un des plus brillants représentants du New Weird. On oublie parfois qu’il est aussi l’auteur d’une cinquantaine de textes courts dont certains furent réunis dans le recueil Looking for Jake (2005). Les éditions Fleuve nous proposent la traduction en français – sublimée par Nathalie Mège – de ce recueil dans son intégralité, sous le titre En quête de Jake, une formidable occasion de découvrir l’auteur sous la forme courte – dans laquelle il se révèle particulièrement convaincant. Le recueil regroupe douze nouvelles, une nouvelle graphique et une novella. Cette dernière, « Le Tain », a reçu le prix Locus en 2003. Notons enfin que les nouvelles « Compte-rendu de certains événements » et « Détails » furent publiées dans Bifrost, respectivement dans les numéros 53 et 74.

Il se peut que les lecteurs regrettent le manque d’homogénéité des textes de ce recueil en termes de qualité ; on passe de l’anecdotique à l’excellent en quelques pages. Mais il y a fort à parier que, selon ses goûts propres, chacun jettera dans ces catégories l’une ou l’autre des nouvelles sans qu’aucun consensus critique n’émerge. Car c’est l’étrange qui ici s’impose entre les fissures et les éclats de la ville de Londres peinte par l’auteur, et l’étrange réclame l’acceptation pleine et entière du lecteur. Il ne faudra pas chasser l’explication et guetter la résolution, mais se laisser porter par les impressions, les ambiances, les reflets dans le miroir, les lueurs au-delà des fenêtres ou les formes qui se dessinent dans les craquelures au mur. Ce sont d’autres cieux. Ce sont des portraits de personnages à la limite de la folie, basculant d’un côté ou de l’autre au gré des vents fantastiques qui soufflent entre les pages. C’est aussi un regard politique porté sur le monde – peut-on attendre autre chose de Miéville ? – où parfois l’horreur se cache dans l’espace jeux d’un grand supermarché, où parfois on privatise les chants de Noël, ou toujours l’individu se fait broyer par des forces qui lui sont supérieures. Les tours de passe-passe de Miéville l’illusionniste révèlent sur l’ensemble du recueil la grande cohérence de sa vision dans la peinture d’une ville tour à tour post-apocalyptique, enchantée ou dépressive, future, actuelle ou passée.

De l’excellent, donc, qui justifie amplement qu’on lise ce recueil ? Pour moi, ce sera « En quête de Jack », lettre amoureuse dans une ville devenue son ombre, « La Piscine à balles », une horreur classique transportée à Ikea, « Compte-rendu de certains événements survenus à Londres », certainement la nouvelle la plus aboutie, qui raconte des rues sauvages apparaissant et disparaissant à loisir – quelle idée sublime ! –, et « le Tain », une longue variation marxiste sur le thème du zombie.

Le Paquebot immobile

Les déchets plastique dans l’océan sont réellement transformés en septième continent ; l’île-poubelle est devenue le Paquebot, contraction de l’île de Pâques et de boat, aux terres cultivées par-dessus le plastifrost. Son fondateur, Robur, y a développé une utopie : parce que la liberté totale s’oppose toujours aux désirs des autres, une charte établit des règles vertueuses et écologiques. Après des décennies de félicité, les Paquiens à l’esprit ramolli subissent la tyrannie de Pairubus qui s’est emparé du Grand Conseil pour établir une dictature de type communiste. On y idolâtre le fondateur dont il est interdit de contempler le portrait projeté dans le ciel à intervalles réguliers. L’île est saturée de cubanas, policières intransigeantes, de gonzos, clones de récupération avec intelligence limitée, et de QAI, créatures quantiques hybrides susceptibles de prendre n’importe quelle apparence, dotée de moyens de surveillance, d’armes paralysantes et de canons anti-gravité.

Seule survivante du bateau torpillé à l’approche de l’île, Véra Offredi, temporairement amnésique, a été recueillie par Gaon Berguer, Maître de bord du quartier de la Falaise, qui en est tombé amoureux. Elle devient le pivot de la révolution menée par Gaon et ses amis du Grand Conseil. Les rebondissements qui s’enchaînent donnent à voir, à travers un véritable feu d’artifice de trouvailles délirantes, d’images surréalistes et d’inventions verbales, les aspects loufoques de cette utopie hors de contrôle. On visite ainsi des communautés absurdes créées au nom de la liberté : Piloufaciens qui décident de leur vie à pile ou face, Végéludes qui tentent de devenir des végétaux, Athéoristes qui entendent fournir la preuve qu’aucun dieu n’a jamais existé.

Philippe Curval s’amuse beaucoup, distribuant coups de griffes et pensées bien senties, tout en poursuivant une réflexion sur l’utopie entamée voici bien des années et régulièrement réactualisée à partir des évolutions sociales et technologiques. Robur illustrait chez Jules Verne le pessimisme par rapport aux progrès scientifiques. Ici, la surveillance généralisée, le contrôle mental et télépathique, le clonage et les manipulations génétiques sont les nouveaux dangers. Les membres du Grand Conseil Arronax, Antifer, Servadac, Branican portent aussi des noms tirés des œuvres de Jules Verne, ici omniprésent, avec d’autres références subtiles voire subliminales. Sur le versant utopique, outre Fourier, figurent parmi les personnages Henri de Tourville et Edmond Demolins, utopistes et sociologues ici contractés en Edmond Louis de Tourville, ainsi que Guy Leclec’h, journaliste, écrivain et conseiller littéraire dont les romans qui flirtent avec l’anticipation traitent de révolution et d’utopie.

Cette île artificielle n’est pas très éloignée de la paradisiaque planète artificielle Nopal d’Un Souvenir de Loti. (cf. Bifrost n°93). On y traque une fois de plus les survivances de l’esprit religieux dans l’instauration de rites (« votre cri de révolte me fait penser à une Internationale qui serait chantée par des souverainistes »), et les dangers de la démocratie directe, le propre de l’utopie étant de susciter ses propres démons, ce que Robur semble avoir, en partie, anticipé, comme il avait relevé l’esclavage comme préalable : « une utopie parfaite ne pouvait se réaliser sans l’appui de travailleurs pour effectuer les tâches secondaires ». D’où le recours à des clones décérébrés, ce que dénonçait déjà Simondon avec les objets technologiques. Le grotesque Pairubus démarqué d’Alfred Jarry est peut-être une opposition nécessaire, qui nous apprend que les lois les plus vertueuses et les plus progressistes des sciences ne valent rien si n’est pas éradiqué ce qu’il y a en nous d’obscurantisme et d’animalité : « Nous croyons nous inventer. Or nous reproduisons un programme. » Pour changer les sociétés il faut changer la nature humaine, affirme Curval pour qui, malgré tout, « sachant qu’il va mourir et qu’il persiste à vivre sans raison, l’homme, en soi, est une utopie ».

À quatre-vingt-dix ans passés, Philippe Curval fait preuve d’une inventivité et d’une créativité intactes, en atteste ce roman échevelé – de même que sa couverture signée par ses soins.

New York 2140

Suite au changement climatique, le niveau des océans s’est élevé d’une quinzaine de mètres. Pourtant, à New York, l’activité est toujours aussi intense. Les immeubles sertis dans la roche sont aménagés, les autres zones, dangereuses, sont abandonnées – mais squattées. Les rues devenues des canaux sont désormais encombrées de transports fluviaux et des passerelles aériennes relient les immeubles. Les bureaux convertis en appartements, les gratte-ciel désormais indépendants sont des cités-États organisées en coopératives avec aquaculture en sous-sol, fermes aériennes en loggias et sur le toit, cantines communes pas toujours fournies.

L’intrigue suit par chapitres interposés quelques habitants du MetLife building, emblématique de cette société de l’après catastrophe. Un autre personnage intervient, simplement dénommé le Citoyen, seul à s’exprimer à la première personne, qui n’est autre que la ville elle-même délivrant avec un avis tranché les explications nécessaires à la compréhension du background, sections didactiques isolées de la narration, selon un procédé que l’auteur a développé dans de précédents romans, et qui n’est pas sans rappeler celui de Brunner dans Tous à Zanzibar. Autour d’eux gravitent d’autres personnages en lien avec les intrigues aventureuses ou policières du roman, comme Hexter, vieil homme qui squatte un immeuble menaçant de s’effondrer, à la recherche d’un trésor du xviii e siècle jamais retrouvé, ou Idelba, modeste capitaine d’une barge partie sauver des gens de la tempête. On ne peut qu’admirer l’ingéniosité humaine pour préserver la ville, se réjouir de voir la jeune population profiter des marées pour surfer d’une rue à l’autre. Ici, les gens rêvent, aiment et créent, ils vivent à fond leur époque, ils n’en connaissent pas d’autre.

C’est d’ailleurs cette entraide qui représente un des points saillants de ces récits entrecroisés, la formidable capacité de résilience d’une ville qui ne renonce jamais : les orphelins illettrés Stefan et Roberto, qui vivent de débrouille sur leur bateau, assistent le vieil érudit dans sa quête et sont secourus par Franklin, le trader pas si inhumain, épaulé par Vlade, le concierge qui aide discrètement tout le monde. Ils secourent même à distance Amelia Black, reporter écologiste dont le dirigeable Migration assistée transporte une faune menacée vers un écosystème moins détérioré, tandis que l’avocate Charlotte signale la disparition de Mutt et Jeff, deux codeurs trop soucieux d’éthique, à l’inspectrice Gen, laquelle enquête sur l’OPA hostile dont leur tour fait l’objet.

La cause est entendue depuis longtemps : l’écologie est décriée dès lors que l’économie est en jeu. Ici, la capacité d’adaptation du monde de la finance est équivalente à la résilience de la population. Ainsi, l’indicateur boursier IPPI, que le trader qualifie de géofinance, se base sur l’Indice des prix des propriétés intertidales, les buildings inondés deux fois par jour lors des marées, indice utile dans l’estimation d’investissements variés, « y compris les paris sur la performance de l’indice lui-même. » Que le niveau de la mer à travers le monde baisse ou augmente, les traders dégagent des bénéfices.

En référence à la Destruction créatrice (1) qualifiée d’autre nom du capitalisme, K. S. Robinson dénonce l’imagination destructrice, la destruction créative dont se rend coupable la finance. Son réquisitoire est sans appel : « Suis-je en train de dire que la montée des eaux, la pire catastrophe de l’histoire de l’humanité (…) a en réalité profité au capitalisme ? Oui, je le dis. » Si certains de ses propos en faveur des exploités ne choquent personne en France, ils sont probablement chez lui ceux d’un extrémiste communiste.

Très documenté, comme toujours, plus militant que jamais, K. S. Robinson décrit l’immersion de la Grosse Pomme avec une précision hyperréaliste qui est aussi une promenade touristique. Un bon roman, d’ores et déjà sélectionné pour le prix Hugo.

Note
(1). La théorie de la Destruction créatrice de Joseph Schumpeter, économiste viennois émigré aux États-Unis, stipule que l’innovation, si elle est destructrice d’emplois, est également source de croissance. [NdA]

Lady Astronaute

[Critique commune à Vers les étoiles et Lady Astronaute.]

Dans cette uchronie, les Américains ont placé un satellite en orbite avant les Russes. Et pour cause : la chute d’une météorite, en 1952, qui a détruit Washington et une grande partie de la côte Est. Nathaniel York, ingénieur spatial qui a l’oreille des militaires et des gouvernants, tente de convaincre ce beau monde que la météorite n’est pas une attaque des Russes. Lorsque son épouse Elma, génie mathématique et ancienne pilote durant la Seconde Guerre Mondiale, calcule qu’après l’hiver nucléaire consécutif à la catastrophe suivra un réchauffement climatique qui sonnera le glas de l’espèce humaine, faute d’une adaptation suffisamment rapide des végétaux, il lui demande de présenter ses conclusions au président intérimaire, Brannan, afin d’accélérer la conquête de l’espace. Elma York doit pour cela vaincre les préjugés misogynes des responsables de la nation, ainsi que sa timidité maladive. Deux handicaps sérieux pour une pilote désireuse d’aller dans l’espace, encore en proie à l’hostilité d’un supérieur hiérarchique, le colonel Stetson Parker, séduisant et charismatique pilote, machiavélique et ambitieux militaire, bien décidé à lui barrer la route des étoiles, à elle et aux femmes en général, cantonnées dans leur rôle de calculatrices. Avec sa ténacité à toute épreuve et le soutien inconditionnel de son mari, Elma York parvient à lever un à un les obstacles, devenant un modèle pour toutes les femmes qui rêvent d’un destin, la Lady astronaute symbole de la lutte contre les préjugés sexistes et racistes.

C’est une conquête de l’espace alternative que propose Mary Robinette Kowal dans ce roman à la documentation sans faille, qui mêle avec une grande habilité des faits historiques longtemps ignorés, davantage médiatisés aujourd’hui. Les Figures de l’ombre, roman de Margot Lee Shetterly adapté à l’écran, n’était pas paru à l’époque de la rédaction de ce roman, mais nombre d’ouvrages, monographies et romans, BD, parfois adaptés au cinéma ou au théâtre, relataient l’histoire de l’unité WASP (Women Air-Force Service Pilots) des femmes pilotes de guerre créée durant la Seconde Guerre Mondiale par Jackie Cochran, qui a également financé le projet Mercury 13 d’entraînement de femmes astronautes, ainsi que l’histoire des calculatrices du programme spatial de la NASA, Katherine Johnson ayant aussi écrit son autobiographie.

La figure de Elma York synthétise l’ensemble des combats menés par ces pionnières, ses amies afro-américaines incarnant la lutte contre le racisme. On réalise mal aujourd’hui, et on comprend encore moins, l’Everest que ces femmes devaient affronter au quotidien. La narration détaillée de Mary Robinette Kowal se fait comptable des vexations et comportements inappropriés (« Il a souri à ma poitrine »), et des décisions faisant de leur groupe des AspAs – des aspirantes astronautes –, contrairement à leurs homologues masculins d’ores et déjà qualifiés d’astronautes. Les arguments en faveur de la femme dans l’espace ou les objections à leur présence sentent le vécu et font écho à ceux qu’on trouve ailleurs (comme l’autorisation des WASP d’avoir un blason brodé sur leur veste, à condition qu’il soit inférieur en taille à celui des hommes, comme le relatent Yann et Romain Hugault, auteurs de la série BD Angel Wings).

Certains éléments narratifs ne sont pas sans évoquer Contact de Carl Sagan. Marionnettiste, Mary Robinette Kowal n’a pas son pareil pour donner vie à ses personnages. L’autrice de la série The Glamourist Histories, romances à la Jane Austen dans un univers de fantasy, n’hésite pas à jouer la carte de l’émotion pour dramatiser les scènes, forçant parfois le trait. Mais le cocktail à peine trop sucré reste un savant dosage : on se passionne pour cette conquête alternative de l’espace qui est d’abord une conquête de la liberté, abordant les thèmes du féminisme, du racisme et de l’écologie avec un optimisme solaire. L’ouvrage a remporté une avalanche de prix : Hugo et Nébula 2018, Locus 2019 et Sidewise de la meilleure uchronie, en attendant les récompenses à l’étranger…

Le recueil Lady astronaute paru conjointement en « Folio SF » présente cinq nouvelles appartenant au même univers. Autour d’événements passés ou à venir dans les prochains opus de la série, l’accent est chaque fois davantage mis sur les relations entre les personnages que sur la situation : « Nous interrompons cette émission » est un prélude à la catastrophe, les quatre autres se déroulent sur fond de colonisation de Mars. On retiendra notamment « Le Rouge des fusées », sur l’organisation d’un feu d’artifice sur Mars, pour la relation entre un homme et sa mère vieillissante, et « La Lady Astronaute de Mars », où un couple vieillissant se trouve confronté à un dilemme en lien avec les étoiles et leur union : un texte bouleversant récompensé par un autre Hugo qui justifie à lui seul l’achat du recueil.

Vers les étoiles

[Critique commune à Vers les étoiles et Lady Astronaute.]

Dans cette uchronie, les Américains ont placé un satellite en orbite avant les Russes. Et pour cause : la chute d’une météorite, en 1952, qui a détruit Washington et une grande partie de la côte Est. Nathaniel York, ingénieur spatial qui a l’oreille des militaires et des gouvernants, tente de convaincre ce beau monde que la météorite n’est pas une attaque des Russes. Lorsque son épouse Elma, génie mathématique et ancienne pilote durant la Seconde Guerre Mondiale, calcule qu’après l’hiver nucléaire consécutif à la catastrophe suivra un réchauffement climatique qui sonnera le glas de l’espèce humaine, faute d’une adaptation suffisamment rapide des végétaux, il lui demande de présenter ses conclusions au président intérimaire, Brannan, afin d’accélérer la conquête de l’espace. Elma York doit pour cela vaincre les préjugés misogynes des responsables de la nation, ainsi que sa timidité maladive. Deux handicaps sérieux pour une pilote désireuse d’aller dans l’espace, encore en proie à l’hostilité d’un supérieur hiérarchique, le colonel Stetson Parker, séduisant et charismatique pilote, machiavélique et ambitieux militaire, bien décidé à lui barrer la route des étoiles, à elle et aux femmes en général, cantonnées dans leur rôle de calculatrices. Avec sa ténacité à toute épreuve et le soutien inconditionnel de son mari, Elma York parvient à lever un à un les obstacles, devenant un modèle pour toutes les femmes qui rêvent d’un destin, la Lady astronaute symbole de la lutte contre les préjugés sexistes et racistes.

C’est une conquête de l’espace alternative que propose Mary Robinette Kowal dans ce roman à la documentation sans faille, qui mêle avec une grande habilité des faits historiques longtemps ignorés, davantage médiatisés aujourd’hui. Les Figures de l’ombre, roman de Margot Lee Shetterly adapté à l’écran, n’était pas paru à l’époque de la rédaction de ce roman, mais nombre d’ouvrages, monographies et romans, BD, parfois adaptés au cinéma ou au théâtre, relataient l’histoire de l’unité WASP (Women Air-Force Service Pilots) des femmes pilotes de guerre créée durant la Seconde Guerre Mondiale par Jackie Cochran, qui a également financé le projet Mercury 13 d’entraînement de femmes astronautes, ainsi que l’histoire des calculatrices du programme spatial de la NASA, Katherine Johnson ayant aussi écrit son autobiographie.

La figure de Elma York synthétise l’ensemble des combats menés par ces pionnières, ses amies afro-américaines incarnant la lutte contre le racisme. On réalise mal aujourd’hui, et on comprend encore moins, l’Everest que ces femmes devaient affronter au quotidien. La narration détaillée de Mary Robinette Kowal se fait comptable des vexations et comportements inappropriés (« Il a souri à ma poitrine »), et des décisions faisant de leur groupe des AspAs – des aspirantes astronautes –, contrairement à leurs homologues masculins d’ores et déjà qualifiés d’astronautes. Les arguments en faveur de la femme dans l’espace ou les objections à leur présence sentent le vécu et font écho à ceux qu’on trouve ailleurs (comme l’autorisation des WASP d’avoir un blason brodé sur leur veste, à condition qu’il soit inférieur en taille à celui des hommes, comme le relatent Yann et Romain Hugault, auteurs de la série BD Angel Wings).

Certains éléments narratifs ne sont pas sans évoquer Contact de Carl Sagan. Marionnettiste, Mary Robinette Kowal n’a pas son pareil pour donner vie à ses personnages. L’autrice de la série The Glamourist Histories, romances à la Jane Austen dans un univers de fantasy, n’hésite pas à jouer la carte de l’émotion pour dramatiser les scènes, forçant parfois le trait. Mais le cocktail à peine trop sucré reste un savant dosage : on se passionne pour cette conquête alternative de l’espace qui est d’abord une conquête de la liberté, abordant les thèmes du féminisme, du racisme et de l’écologie avec un optimisme solaire. L’ouvrage a remporté une avalanche de prix : Hugo et Nébula 2018, Locus 2019 et Sidewise de la meilleure uchronie, en attendant les récompenses à l’étranger…

Le recueil Lady astronaute paru conjointement en « Folio SF » présente cinq nouvelles appartenant au même univers. Autour d’événements passés ou à venir dans les prochains opus de la série, l’accent est chaque fois davantage mis sur les relations entre les personnages que sur la situation : « Nous interrompons cette émission » est un prélude à la catastrophe, les quatre autres se déroulent sur fond de colonisation de Mars. On retiendra notamment « Le Rouge des fusées », sur l’organisation d’un feu d’artifice sur Mars, pour la relation entre un homme et sa mère vieillissante, et « La Lady Astronaute de Mars », où un couple vieillissant se trouve confronté à un dilemme en lien avec les étoiles et leur union : un texte bouleversant récompensé par un autre Hugo qui justifie à lui seul l’achat du recueil.

La Mort et le Météore

Malgré lui, un fonctionnaire mexicain planqué au ministère de l’Immigration, dont le lecteur ne connaîtra jamais le nom, se retrouve en charge de la migration des Kaajapukugi vers une terre de refuge au Mexique. Ces Indiens d’Amazonie, une cinquantaine d’hommes, ont derrière eux une longue histoire faite de recombinaison, de renaissance et de destruction. Flanqué de l’étrange Boaventura, ethnographe raté auto-érigé en protecteur, le jeune bureaucrate va aider le peuple mazathèque du Huautla à accueillir les Kaajapukugi. Mais l’improbable se produit : ceux-ci se suicident à peine arrivés à bon port. Peu après, c’est Boaventura lui-même qui est retrouvé mort.

La première partie du roman est irriguée par la question des migrations et des rapports entre ethnographie et colonialisme. On y saisit l’importance des refuges et de la solidarité à créer face aux désastres écologiques et sociaux perpétrés par les Occidentaux. Le récit se complexifie ensuite en alternant les points de vue du bureaucrate et de Boaventura. Celui-ci s’adresse au fonctionnaire via une vidéo-testament où il confesse sa propre compromission dans la fin tragique des Indiens. On est transporté par sa voix dans une suite de péripéties où l’aventurier se perd et entraîne avec lui tous ceux qui l’entourent. Parallèlement, le fonctionnaire se trouve à la fois engagé dans une enquête visant à élucider la mort des Kaajapukugi et dans le travail de deuil de ses propres parents. Cela fonctionne assez bien, on suit avec aisance le passage entre ces différents questionnements et niveaux de réalité.

La mort rôde, donc. Mais quid du météore annoncé dans le titre et de « l’audacieuse pointe de science-fiction » mentionnée en quatrième de couverture ? Tout au long de l’ouvrage, on apprend qu’une sonde spatiale chinoise habitée est sur le point d’être envoyée vers Mars. De loin, le fonctionnaire suit les opérations jusqu’au jour du lancement. Quel est le rapport ? C’est là que le bât blesse un peu : en quelques pages, l’auteur tente de nous convaincre du lien intime entre la cosmogonie des Kaajapukugi et le voyage interplanétaire des Chinois. Certes, on accepte d’emblée de ne pas lire du Egan ni du Le Guin, mais ça reste tout de même maigre pour un amateur de SF.

Cette réserve formulée, il importe de noter tout l’intérêt du roman et le plaisir pris à sa lecture. Terron dépeint ce peuple de « Schopenhauer sauvages » avec finesse et humour. Ceux qui apprécient les messages métaphysiques seront d’ailleurs servis, voire surpris… Ils sortiront en tout cas de cette histoire avec des idées pour spéculer sur le temps, la génération, l’héritage et le devenir fantomatique (ou non !) des individus et des peuples.

Bref, voici un livre intelligent et divertissant qui vous fera parcourir des chemins inattendus, à condition toutefois de n’être pas trop chatouilleux au niveau des entournures logiques et des fondations scientifiques.

Sexties

Lorsqu’on évoque aujourd’hui les débuts d’une bande dessinée française destinée aux adultes, on cite souvent le Pilote de René Goscinny comme matrice ayant accouché au cours de la première moitié des seventies de L’Écho des Savanes, de Fluide Glacial et de Métal Hurlant, qui révolutionnèrent le neuvième art. L’histoire de toutes ces revues est désormais bien documentée (on pense ici à Les Années Pilote, Dargaud, 1996, ou à Métal Hurlant – La Machine à rêver, Denoël, 2005)

Il ne faudrait pas pour autant oublier le rôle joué par le fameux libraire-éditeur Éric Losfeld qui édita, dès 1964, à l’enseigne du Terrain Vague, le Barbarella de Forest, mais pas seulement puisque suivit dans son département BD une petite quinzaine d’albums novateurs qui eurent parfois à se frotter à la censure avant de tomber pour nombre d’entre eux dans un oubli immérité.

C’est à ces bandes dessinées déviantes, mutantes, relevant de la SF et/ou de l’érotisme, que Benoît Bonte consacre son premier essai aux éditions PLG.

Il commence par rappeler le contexte de l’époque – premiers clubs d’amateurs, première librairie spécialisée… –, puis s’attarde sur la personnalité de Losfeld, descendu de sa Belgique natale pour éditer à Paris les Surréalistes chers à son cœur, avant de braquer son projecteur sur Jean-Claude Forest.

Barbarella vient au monde dans les pages du V Magazine de Georges Gallet, grand connaisseur de la SF et responsable du « Rayon Fantastique », dont de nombreuses couvertures ont été illustrées… par Forest. Comme quoi, tout est lié ! Losfeld ira la chercher dans les pages du magazine polisson pour en faire un album luxueux, relié, avec jaquette, qui deviendra la figure de proue de son catalogue et l’un de ses best-sellers, avant que le personnage apparaisse dans une chanson de Gainsbourg et soit personnifié par Jane Fonda. À partir de là, il n’aura de cesse de renouveler son exploit éditorial et aura la chance de croiser la route de Guy Peellaert qui fera de lui l’éditeur des Aventures de Jodelle. Excellente pioche à nouveau, du côté du Pop Art cette fois-ci. Puis Losfeld découvrira le très jeune Philippe Druillet, dont il publiera l’inabouti premier opus qui mettait déjà en scène Lone Sloane.

Le sommet de sa production correspondra au mythique Saga de Xam de Nicolas Devil sur scénario de Jean Rollin, ce feu d’artifice graphique édité dans un écrin luxueux et accompagné d’une loupe afin que le lecteur profite des moindres détails !

Il remettra le couvert avec Peellaert pour Pravda la survireuse, éditera le Valentina de Crepax, le Lolly Strip de Pichard et, en 1970, Kris Kool, le très psychédélique album d’un jeune inconnu qui ne le restera pas longtemps, j’ai nommé Caza !

Même s’il s’est fourvoyé avec certains titres, Losfeld aura eu le mérite de faire de belles découvertes et de poser les fondations d’une bande dessinée pour adultes qui, avant lui, n’existait pas. Tel est le bilan tiré par Benoît Bonte à la fin de Sexties – Les Filles du Terrain Vague, un ouvrage à la très riche iconographie, dans lequel on croise de nombreuses personnalités du monde de la contre-culture des années 60 et au-delà – Francis Lacassin, Alain Dorémieux, Jacques Sternberg, Michel Demuth, Maxim Jakubowski, Michael Moorcock… –, et dont la lecture, pour compléter celle des mémoires de Losfeld, Endetté comme une mule, rééditées en 2017 par les éditions Tristram, vous est chaudement recommandée.

Agrapha

Œuvre singulière à plus d’un titre – peut-être est-elle-même la parution la plus extraordinaire de cette Rentrée littéraire 2020… – Agrapha l’est d’abord par sa forme éditoriale. Dotée d’une couverture d’emblée énigmatique (sur la couverture, le titre semble étrangement flotter dans les hauteurs d’une sombre forêt), le livre est fermé sur lui-même par un rabat lui donnant d’intrigantes allures de grimoire médiéval. À moins que l’on y voie une manière de dossier, compilant un matériau aussi hétérogène qu’étrange. Agrapha agrège en effet trois éléments principaux. Le premier d’entre eux se présente comme la traduction d’écrits médiévaux, conservés dans la Bibliothèque Nationale d’Autriche. C’est là que la narratrice (Luvan elle-même, comme on finira par le comprendre) explique avoir consulté une dizaine de récits rédigés au haut Moyen Âge par quelques-uns des membres de « la communauté d’Adsagonae Fons ». Réunissant huit « sanctimoniales », ce gynécée religieux semble avoir écrit l’une des pages parmi les plus oubliées, mais aussi parmi les plus étranges, de l’histoire d’une chrétienté oscillant encore entre orthodoxie chrétienne et paganisme toujours vivace. À ces « documents » écrits en « une langue ultralocale, amalgame de plusieurs latins, de plusieurs celtiques et de plusieurs germaniques », Agrapha adjoint ensuite un « Exegetice », id est pour les non latinistes un docte commentaire par Luvan de quelques-uns des points les plus sibyllins de ces textes souvent oraculaires. Puis après avoir affecté toutes les apparences d’un travail académique – mais déjà troublant… –, Agrapha bascule à l’occasion de ses deux dernières parties dans une sorte d’autofiction. Il s’agit, nous explique l’éditeur, d’un cahier et d’un parchemin, tous deux de la main de Luvan. Restitués au plus près des manuscrits originels (certaines des pages les reproduisent en fac-similé), ces textes retracent l’aventure fantastique qu’a connue Luvan, après être partie sur les traces des huit femmes d’Adsagonae Fons…

De ladite aventure, et même odyssée, on ne dira pas beaucoup plus, soucieux de ne pas divulgâcher. Mais au moins peut-on indiquer que celle-ci permettra aux lecteurs et lectrices de s’abîmer encore plus profondément dans le monde dévoilé par les textes médiévaux ouvrant Agrapha. Un univers dans lequel le syncrétisme du miraculeux chrétien et du merveilleux païen engendre une fantasy d’inspiration à la fois savante et poétique, pouvant donner lieu à des visions assez inédites dans le genre : telle celle de la métamorphose de l’armée des assaillants « hors humains » des sanctimoniales en « un cortège insane de chenilles processionnaires, dont toutes les jambes auraient été écartelées par quelque puissance malicieuse », tandis que la mer « se couvre de glace, depuis le lointain jusqu’à la berge, à une vitesse fantastique ». Certainement placé sous le signe de l’étrange, Agrapha s’affirme aussi comme un ouvrage politique. Et même féministe, puisque c’est un épisode matriarcal de l’Histoire qu’il se propose de retracer. Un temps durant lequel les huit femmes puissantes d’Adsagonae Fons, depuis la grotte aux contours utérins les abritant, s’appliquaient à faire régner l’harmonie entre les sexes comme entre les espèces. Une époque pendant laquelle la magie féminine n’avait pas encore été réduite à néant par les mâles inquisiteurs de la chasse aux sorcières, étendant encore ses bienfaits aux humains comme aux animaux…

Fantastique et utopique quant à son récit, Agrapha l’est enfin par son écriture même. Ou plutôt par ses écritures, car Luvan déploie un vaste éventail de langues comme d’images pour non pas tant décrire qu’invoquer le monde perdu d’Adsagonae Fons. Car c’est un véritable roman sorcier qu’offre Luvan, spécialement destiné à celles et ceux qui voient dans la littérature une manière de magie…

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