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Les Racines du mal

La Seconde Guerre mondiale, on connaît. Mais on ne connaissait pas celle de Ian Tregillis. Les Racines du mal, roman d’histoire parallèle/secrète/uchronique — difficile de classer — nous invite à la découvrir.

Espagne, Années 30. Guerre Civile. Le capitaine Raybould Marsh, espion britannique en mission d’exfiltration d’un transfuge nazi, est le témoin d’évènements extraordinaires. L’impossible ayant été observé, l’improbable vérité se fait jour et les services britanniques, dirigés par le mentor de Marsh, doivent se rendre à l’évidence : les nazis ont développé un groupe de super-hommes — übermenschen — dotés de super pouvoirs. Confrontées à la menace d’un groupe d’autant plus inquiétant qu’il est mystérieux et aux revers militaires qui annoncent une invasion possible de l’île, les autorités britanniques décident de retrouver et de mobiliser les sorciers cachés du royaume pour protéger Albion. La lutte sera longue, âpre, d’autant plus cruelle que les entités invoquées par les sorciers pour les servir, les énochéens Eidolons, exigent leur dû de sang anglais.

Surhommes contre sorciers, l’idée peut paraître étrange. Mais pourquoi pas ? C’est après tout l’approche de l’univers partagé «  Wild Cards  » que chapeaute GRRM, ce même GRRM qui est un ami de Tregillis et qui dit du bien de lui sur la couverture.

Mais ici, la réalisation est loin d’être à la hauteur. En dépit d’une action rapide qui peut capter l’attention du lecteur, les défauts du roman sont vraiment trop nombreux.

D’abord, quelques personnages principaux un peu développés cachent des secondaires qui ne sont que de fond tant ils ne dépassent pas le stade de silhouettes. Les principaux sautent de scène en scène sur plusieurs années, n’interagissant que lorsque nécessaire avec le monde ou les personnages de complément, ce qui donne des évolutions biographiques abruptes et une impression de décousu.

Ensuite, une inconsistance historique marquée tant par l’absence de point de divergence clair que par le flou absolu dans lequel se développe l’histoire. Pourquoi la guerre ? Où ? Comment ? Rien n’existe ou presque hors du champ de vison des personnages. La guerre est un décor, pas plus utile au récit que les dojos de Mortal Kombat. La manière désinvolte dont Tregillis utilise les noms et les grades de l’époque signifie bien que ce n’est guère important pour lui. On n’attendait pas Les Bienveillantes, mais un peu de rigueur n’aurait pas nui. Rien de cet ordre ici, on a le sentiment que, pour Tregillis, toute cette affaire de guerre mondiale est bien compliquée et finalement peu nécessaire à la progression de l’intrigue. Ce que propose Les Racines du mal, c’est une histoire divergente pour incultes historiques, calibrée peut-être pour le goût de certains américains qui trouvent que le monde, décidément, c’est bien loin d’ici.

S’y ajoute une approche « young adult », au mieux, avec ce qu’elle a d’exaspérant. La forme allie bonne humeur et humour bas de gamme (ça s’arrange un peu dans la deuxième moitié), expressions et vocabulaire à la « Club des Cinq », et toute la bonhommie mièvre du genre. Dans le fond, les stations du calvaire sont parcourues. Coup de foudre, mariage (modeste), bébé (merveilleux), mort du bébé, rivalité amoureuse à bas bruit amortie par de nobles sentiments, rien ne manque, illustré de dialogues consternants.

Last but not least , ce n’est pas pour l’écriture qu’il faut lire le roman. Le style de Tregillis est quelconque, handicapé régulièrement, qui plus est, par l’option d’un lexique bonhomme. Une traduction guère inspirée achève d’enfoncer le texte.

Premier d’une trilogie, Les Racines du mal se termine alors que les Soviétiques sont entrés dans le jeu et que l’issue du conflit est toujours incertaine. Je ne suis pas convaincu qu’il soit nécessaire de s’enquérir de la suite.

Les Pousse-pierres

Trois sociétés distinctes composent l’humanité de la deuxième moitié du XXIIe siècle : sur Terre, les corporations ont remplacé les États mais dépendent, pour leur approvisionnement en matières premières, des Spatieux qui prospectent la ceinture d’astéroïdes, le tout régulé par les occupants de la station orbitale au point de Lagrange 1, lesquels veillent tout particulièrement à interdire l'accès de l'espace aux Terriens. Bien que foncièrement pacifiques ils disposent des armes nécessaires pour empêcher le système capitaliste de contaminer le système solaire. Les Lagrangiens de Eloane ont en effet développé une sorte d'utopie égalitaire, notamment par le biais d'un implant neural interconnectant les individus entre eux, permettant les échanges silencieux et empêchant surtout le mensonge. Face aux mœurs libérales des Grangiens, les règles à bord des vaisseaux des « pousse-pierres » sont strictes, car adaptées à la survie, mais reposent sur un code d'entraide et de solidarité, au sein de structures familiales qui compensent les rigueurs de la hiérarchie quasi militaire. C'est ainsi que Maureen, adolescente survivante du vaisseau spatial de ses parents ayant explosé au large de Jupiter, est réceptionnée dans sa capsule de survie par un cargo, L'Améthyste, non sans lui causer des dégâts qui en font l'obligée des Trajan, sous forme de contrat d'apprentissage de deux ans.

Par ailleurs, la famille Trévise, un couple et ses deux enfants, fuit frauduleusement la Terre pour se faire admettre comme citoyens de la société pourtant très fermée de Eloane. L'action est vue par les yeux du fils, Richard, en pleine crise d'adolescence, d'autant plus réfractaire à ce changement de statut qu'il n'en a pas été avisé et que sa méconnaissance des sociétés spatiales se double de sa peur du vide. Les fils de l'intrigue se nouent autour d'un complot politique de grande ampleur, pour le contrôle du système solaire, où interviennent armes nouvelles et créatures hybrides au cours de combats spatiaux ou planétaires.

Le cadre de ce space-opera ne manque pas d'originalité et aurait en effet mérité d'être développé plus avant. On regrette presque son insertion dans un roman pour la jeunesse qui privilégie l'action et s'appuie sur des personnages stéréotypés : l'adolescent confronté à un univers différent et éprouvant ses premiers émois, les attachants compagnons robots, comme celui, déglingué, qui zozote, etc. Heureusement, l'auteur fait montre d'une certaine habileté pour jouer avec les poncifs du genre, s'attachant à raconter avant tout une aventure captivante, sans temps mort. Il connaît manifestement ses classiques en matière de space-opera, qu'il dévoile dans de discrets clins d'œil. Certains passages font même penser à Heinlein, notamment dans les dialogues servant de justification morales aux contraintes de la vie en groupe.

L'ensemble manque toutefois de constance. Le ton vif et alerte, une dynamique générale des plus entraînantes, aident à pardonner des facilités et des naïvetés du scénario, mais la lecture bute sur des aspects plus discutables de l'univers, comme une société pacifique capable de se battre avec des fusils à balles explosives et des lance-roquettes dans une station spatiale (on peut supposer qu'elle aurait développé d'autres types d'armes adaptées à l'espace) ou des conséquences climatiques comme les mangues de Bourgogne et les activités estivales de février, quand on sait que le réchauffement global entraînera un refroidissement local, notamment sur la façade atlantique. De même, l'écriture se contente de dérouler l'action à l'aide de dialogues et de courtes phrases d'exposition, sans effort particulier sur le style, ce qui convient parfaitement à un récit jeunesse centré sur la narration. On regrette toutefois de devoir passer sur des faiblesses d'écriture comme : « L'accident ne leur avait laissé aucune chance. » au deuxième paragraphe du roman, un défaut de vigilance de radar et des distractions comme « En une phrase elle venait de résumer un drame. » à la suite de : « Papa n'a pas voulu que je retourne à l'intérieur. Maman est restée... pour arrêter la pile... »

« C'est là où » ces défauts placent le roman un cran en-dessous du niveau auquel il aurait pu prétendre. L'ouvrage a bénéficié des bêta-lectures du collectif CoCyclics, où des amateurs bénévoles donnent leur avis, qui repose avant tout sur l'impression d'ensemble. Et, en effet, ces défauts n'obèrent en rien le plaisir de lecture, constamment nourri par des trouvailles, éléments de langage ou codes sociaux insolites, que l'auteur insère tout au long de l'histoire. Toutes ne sont pas heureuses ni en cohérence avec l'ensemble (nom de Zeus, vidéo-roman), mais elles témoignent d'une générosité et d'un entrain sympathiques. Duval a manifestement des idées : il lui reste à travailler le reste. Pour un premier roman, le résultat est tout à fait honorable. Le prix Futuriales de la révélation jeunesse décerné en 2012 est, à ce titre, amplement mérité.

L'Éducation de Stony Mayhall

1968, Easterly, Iowa. De retour chez elle par une nuit glaciale, Wanda Mayhall découvre sur le bas-côté de la route la dépouille d’une jeune fille. Le cadavre enserre dans ses bras le corps d’un nourrisson qui paraît mort lui aussi. Très vite, l’enfant va pourtant donner des signes d’animation. Il bouge mais ne vit pas, ce que comprend Wanda l’infirmière. Avec la complicité de ses filles, elle décide de garder le bébé. Ce qui relève du crime d’Etat depuis l’épidémie qui a failli éradiquer l’humanité. Les morts-vivants sont impitoyablement traqués et détruits par les Fossoyeurs, surnom des forces officielles. Quant aux « nécrosympathisants » (aussi surnommés Fausse Barbe car ils confèrent aux MV une façade de normalité), ils disparaissent dans des camps d’internement. John Mayhall, dit « Stony » parce qu’il est gris comme la pierre et que rien ne paraît le détruire, va ainsi passer d’une vie privée clandestine à la clandestinité publique, car il paraît bien avoir un rôle à jouer. De son comportement dépend le devenir de l’humanité, quelle qu’en soit au final la définition.

Le roman, premier de l’auteur traduit en France, est un double récit d’initiation, puisqu’aussi bien le héros principal que l’humanité doivent appréhender leur avenir. Stony est un enfant puis un ado pas comme les autres, et pourtant si prévisible quand il se dispute avec sa mère (p. 66) ou glande avec Kwang, le fils des voisins coréens avec lequel il développe une certaine empathie. Ainsi de la page 96 : « tout ce que Kwang voulait, il le voulait. Tout ce que Kwang aimait, il l’aimait », mais aussi de la formidable scène de masturbation où l’un répand la vie quand l’autre en est incapable, pouvant à tout instant répandre la mort.

La suite, qui vire progressivement au noir, conserve tout au long du récit une formidable maîtrise narrative dans sa description de l’anodin au sein de l’anormal. Le roman renoue brillamment avec la banalité du Mal telle qu’elle apparaissait dans Le Bébé de Rosemary, aussi bien le roman d’Ira Levin que son adaptation cinéma par Polanski. Daryl Gregory dépeint admirablement la routine du camp adverse, les petits riens de l’existence ordinaire, nous rappelant au-delà de son approche personnelle qu’il y a une vie quotidienne dans le Mordor, et que l’Etoile de la Mort a forcément un réseau de sanitaires.

Ce réalisme conféré à un récit résolument d’imaginaire est probablement ce qui fait de L’Education de Stony Mayhall un roman littéralement remarquable, justifiant à lui seul sa lecture. Mais ce n’est pas tout. A mesure de son déploiement, le récit gagne de nouvelles couches de sens, en premier lieu social et politique. L’épisode du Congrès de 1988 à Los Angeles est un authentique tour de force, avec ses différentes factions Morts-Vivants (Abstinents, Perpétualistes, Gros Mordeurs) et, surtout, le Commandant Calhoun, qui a fait fortune dans les bâtonnets de poisson avant de devenir un leader MV (imaginez Captain Igloo tout entier dévoué à la cause zombie, l’équivalent de Magnéto pour les mutants). On pense bien sûr aux différentes tendances afro-américaines de libération (pour faire simple : Martin Luther King et Malcolm X). Toutefois, sachant que Daryl Gregory peut compter sur une solide culture religieuse, on pourrait sans mal retrouver dans la communauté MV toutes les tendances de la résistance juive à l’oppression romaine en Palestine, jusqu’à ses courants messianiques, ici incarnés par deux mentors (le formidable M. Blunt ; le Bout) et bien sûr Stony.

En mode plus pop, l’auteur joue sur la notion même de références, avec la série des romans « Jack Gore », gimmick qui permet une continuelle mise en abyme, ou le savoureux clin d’œil qu’est « le documentaire Romero sur l’épidémie ». A ces différentes couches de sens s’ajoute enfin la dimension physique et métaphysique, avec une très originale application du principe de continuité voulant que la Nature n’admette pas le vide, qui déterminera la fin du roman.

Tout cela ferait déjà de L’Education de Stony Mayhall un must total si ne s’y plaquait, du début à la fin, la dimension absolument jouissive du genre zombie qui exige son lot de charclage, mitrailleuses lourdes contre tsunami de prédateurs. Et l’on ne peut parler de roublardise, car le texte témoigne à tout instant d’une authentique sincérité.

Lisez ce roman et réfléchissez à ce que vous devez conserver dans votre bibliothèque. Un jour viendra où vous mourrez sans être amené à renaître. Alors débarrassez-vous de tous les bouquins inutiles afin de faciliter la tâche à vos héritiers. Mais gardez L’Education de Stony Mayhall. Cela adoucira leur peine.

L'Obsession

Si Super 8 éditions n’a pas pour finalité de présenter des romans faisant l’objet d’une option par le cinéma, ça y ressemble beaucoup. L’Obsession devrait ainsi être adapté par la Warner, avec dans le rôle principal Bradley Cooper, dont on se souvient de la prestation dans Limitless, film issu de Champs de ténèbres (Alan Glynn), roman de SF auquel celui de James Renner n’est pas sans faire écho.

Zoom avant sur le récit. David Neff est l’auteur d’un immense best-seller, Le Protégé du tueur en série, qui, selon Rolling Stone, l’impose comme « le meilleur auteur de récit criminel depuis Truman Capote ». Il n’est toutefois pas sorti indemne de l’enquête qui l’a obsédé durant des années. Elizabeth son épouse, au caractère instable depuis une tragédie survenue durant l’enfance, et qu’il a délaissée, s’est suicidée après avoir accouché de leur fils (Tanner, auquel, par mise en abîme, le roman est dédié). David est accro au Rivertin, un antidépresseur aux effets terrifiants en cas de sevrage hâtif, et il n’écrit plus. Le poussant à renouer avec le succès, son agent lui parle d’une affaire singulière : celle du meurtre d’un vieillard reclus et excentrique, l’homme de Primrose Lane, que l’on a retrouvé avec une balle dans la poitrine et les doigts passés au mixer. Un comble, pour celui qu’un policier local surnommait « L’homme aux mille moufles ». Il apparaît assez vite que la victime était riche et qu’elle emboîtait les identités d’emprunt. David Neff va s’intéresser au meurtre, pour découvrir qu’Elizabeth était une intime du vieil homme.

Dans son intention et sa structure, le roman de James Renner est hétérogène. Difficile d’expliquer plus avant sans déflorer une grande partie de l’intrigue. Aussi évoquerons-nous seulement la première couche du récit, celle qui se présente immédiatement au lecteur : une intrigue policière où les enlèvements de jeunes filles ont la part majeure. Détail qui prend tout son sens lorsqu’on sait que l’auteur s’est lui-même consacré dès l’âge de onze ans à la bien réelle affaire Amy Mihaljevic, enlevée puis tuée en 1989. Année où la sœur jumelle d’Elizabeth est kidnappée dans le roman, ce dernier mentionnant page 407 Amy Mihaljevic dans une vie alternative, comme si James Renner souhaitait lui donner une seconde chance. Jusque-là, L’Obsession est un récit magistral, dont les brusques sautes du réel trouvent explication : « Tout cela n’était-il qu’une fugue dissociative due au sevrage » ? (page 409). Et puis tout bascule dans un genre qui justifie la critique du roman dans Bifrost, sans que l’on en dise davantage.

Cela, pour l’histoire. Maintenant, ce qui en est de la forme. James Renner multiplie les références, avec une honnêteté confondante mais une maîtrise plus ou moins assurée. Ainsi le ton général en Twilight Zone est-il revendiqué par une simple mention à Rod Serling page 373. Par contre, l’admiration sans borne qu’il voue à King est probablement trop appuyée : King est le pseudo d’un personnage ; les « cigarettes mentales » renvoient à la clope clôturant le point final d’un manuscrit dans Misery ; l’épisode de la visite chez les grands-parents (pp. 330 sq) relève du pastiche dévot. Enfin, les emprunts atteignent au lourdingue avec un caisson permettant les duplications d’identités et les voyages spatio-temporels mis au point par Tesla, qui évoque forcément Le Prestige (livre de Christopher Priest ou film de Christopher Nolan ?).

Le roman n’est pas non plus exempt de maladresses. L’un des personnages se dé-fend d’être reporter pour gagner la confiance de quelqu’un, puis trois pages plus loin, impose son autorité auprès de la même personne en tant que « journaliste au long cours ». Dans l’incapacité de bouger, le héros souffle sur un gros câble électrique jusqu’à le faire se balancer et s’en saisir : une capacité pulmonaire digne de Mae West ! De même, le héros est saisi d’une révélation page 488, qu’un lecteur en état de mort cérébrale a déjà depuis longtemps appréhendée.

La traduction, excellente, au début, paraît s’essouffler à mesure, laissant passer l’habituelle et agaçante confusion entre « gâchette » et « détente » (quand on traduit du polar, il faudrait s’informer), ou, page 511, une répétition douloureuse : « L’écran de séparation qui séparait ».

Au final, après une attaque remarquable, le caractère de l’obsession laisse place à celui, tout aussi lancinant, de l’ennui. Un bilan mitigé, enthousiaste quant à la partie policière, décevant pour ce qui relève du changement de registre en forme de retournement et de son exploitation.

Finir en beauté

Christophe Langlois s’était révélé avec un recueil paru en 2011 aux éditions de l’Arbre Vengeur, Boire la tasse, qui lui avait valu une réception critique unanime, et le Grand Prix de l’Imaginaire catégorie nouvelles francophones. Trois ans après, il revient avec un deuxième recueil, Finir en beauté, le titre étant une manière d’hommage à l’art de la nouvelle, dont la fin se doit d’être réussie pour que le texte prenne tout son sens. Sensiblement plus épais que son prédécesseur, Finir en beauté nous présente quinze nouvelles d’inspiration très variée, mais toujours liées par un style élégant, précis, que l’on sent extrêmement travaillé sans qu’il en devienne ampoulé. Autre point commun : une citation mise en exergue au début de chaque texte, sans doute inspiratrice de la nouvelle qui suit, et qu’il est conseillé de relire une fois celle-ci terminée pour savourer un peu plus.

Comme dans Boire la tasse, difficile ici de dégager des thématiques communes des textes rassemblées ici, tant les sujets traités sont hétérogènes : on y trouve pêle-mêle une apocalypse liée à la soudaine perte de valeur nutritive des aliments ; une bien curieuse collection de tableaux, pourtant somptueux, que tout acheteur potentiel renonce à acquérir après les avoir vus ; une statue d’Abraham Lincoln à qui il faut lire la Constitution américaine sous peine de dérapage de la situation ; un texte satirique sur les réseaux sociaux qui déconnectent de la vie réelle, au mépris de tout danger ; la vraie histoire des bustes que l’on trouve dans les musées et qui, jadis, vivaient ; un pays ayant érigé le sommeil en but ultime de l’existence ; ou encore le secret de l’inspiration d’Horace Walpole, auteur du Château d’Otrante. Les nouvelles explorent ainsi de nombreuses pistes fantastiques, parfois pour mieux révéler le monde qui nous entoure, parfois comme de simples rêveries, tragiques ou comiques, qui nous emmènent sur des chemins ignorés. Cette variété dans l’inspiration est un des bonheurs de ce recueil : il évite au lecteur de s’installer dans un rythme convenu et attendu. Christophe Langlois avoue d’ailleurs ne pas avoir cherché à construire son livre et invite les lecteurs à découvrir les différentes nouvelles dans l’ordre qu’ils souhaitent, sans nécessairement suivre celui du recueil, purement arbitraire. Procéder ainsi amplifie encore un peu le phénomène de pertes de repères : on ne sait jamais où l’auteur va nous emmener, constat intéressant, puisque ce sentiment d’incertitude est au cœur même de la démarche de l’œuvre fantastique, à laquelle l’auteur apporte ainsi ici la meilleure des réponses.

Brillants, émouvants, variés, drolatiques, fantastiques, indescriptibles : les qualificatifs ne manquent pas pour décrire ces textes ciselés comme de vrais travaux d’orfèvrerie. Bref, Christophe Langlois, qui confirme ici le talent qu’on lui prêtait à la sortie de Boire la tasse, a su finir en beauté ses nouvelles, sans oublier que réussir la conclusion d’un texte n’a d’intérêt que si ce qui précède est du même tonneau.

L'Opéra de Shaya

Quatrième recueil de Sylvie Lainé aux éditions ActuSF, L’Opéra de Shaya propose quatre textes écrits en 2013 et 2014, répartis pour moitié entre inédits et reprises, le tout agrémenté d’une préface et d’un entretien signés Jean-Marc Ligny. Les nouvelles ont toutes pour décor l’espace, et plus particulièrement des planètes sur lesquelles les protagonistes vont nouer le contact avec les autochtones, parfois sans le savoir.

Ainsi, dans « Un amour de sable », où un géologue prélève du sable pour des examens, ignorant que celui-ci est une créature à part entière et à l’échelle de la planète. Plutôt que de l’amputer, ce prélèvement va être source d’enrichissement pour le sable, dont la partie manquante, une fois remise sur le sol de la planète, pourra faire profiter de ces expérimentations au reste. Une tentative de décrire l’Autre relativement efficace. Contact aussi dans « Petits arrangements intragalactiques », nouvelle gag en hommage à Robert Sheckley, où un homme va tenter d’approcher des E.T. à la forme de grosses vaches roses, déguisé en sapin. Mineur, ce texte réussit néanmoins à retrouver le charme des nouvelles humoristiques de l’âge d’or de la SF. Le contact est un petit peu plus étonnant dans « Grenade au bout du ciel », grenade étant à prendre ici au sens du fruit à alvéole plutôt qu’à celui d’arme. Cette fois-ci, les interactions avec les habitants de la planète restent extrêmement faibles puisque les astronautes préfèrent s’intéresser à un satellite artificiel (alors qu’aucune technologie n’existe sur le monde autour duquel il orbite). Celui-ci se révèle un container à rêves et cauchemars amenés à contaminer les explorateurs. Un texte évocateur, poétique, dont la fin extrêmement ironique évoquant l’avenir de ladite grenade résonne douloureusement. On en vient maintenant au plat de résistance, curieusement situé en début de recueil, à savoir la novella qui donne son titre à l’ouvrage. Une jeune femme désœuvrée, So-Ann, entend parler d’une planète qui accueille les étrangers avec parcimonie pour mieux les intégrer. Une fois sur place, elle se rend compte du caractère idyllique de Shaya : tout est fait selon ses désirs. Littéralement. La faune et la flore, en plus de susciter un émerveillement permanent de par leur diversité, s’imprègnent de son ADN pour se recomposer comme elle en a envie. Les plantes et les bêtes se modifient peu à peu, pour lui proposer des fruits à son goût ou des animaux de compagnie intelligents et prévenants. Le paradis est d’autant plus à portée de main que So-Ann fait la connaissance de Nico, déjà imprégné par un autre être humain, et donc suffisamment proche du compagnon idéal pour la jeune femme. Toutefois, Shaya est une planète qui a ses propres codes, que So-Ann devra respecter, dût-elle en souffrir personnellement… Tous les ingrédients d’un très grand texte sont ici réunis : la capacité d’émerveillement, des personnages attachants abordés avec une grande finesse psychologique, une description extrêmement précise et crédible d’une société autre, sans oublier une pointe d’humour et de cruauté pour assaisonner le tout. Bref, une novella qui a elle seule fait de L’Opéra de Shaya une lecture hautement recommandée, et confirme tout le talent de nouvelliste de la très (trop ?) discrète Sylvie Lainé.

Le Pays des Djinns

En ce VIIIe siècle, la route reliant Bagdad et Samarkand est bloquée. Depuis une cinquantaine d’années, les vastes étendues désertiques entre les deux villes sont envahies par les djinns. Entre les humains et ces créatures magiques, la guerre fait rage mais semble avoir atteint un statu quo. A Samarkand, Tarik al-Jamal, fils de contrebandier et contrebandier lui-même, a renoncé à son activité depuis la disparition de son amour, Maryam, enlevée par un prince des djinns. Désormais, Tarik vivote en participant à des courses de tapis volants — sport illégal auquel il excelle. Lorsque la mystérieuse Sabatéa lui demande de le mener à Bagdad à dos de tapis, Tarik refuse tout net. Mais il ne peut s’empêcher de partir sur la piste de son frère cadet, Junis, qui, pour sa part, a accepté l’offre de la jeune femme. Qu’importe si Junis et lui s’adressent à peine la parole et se haïssent cordialement depuis la disparition de Maryam, et que la route jusqu’à Bagdad soit truffée de dangers : Tarik va tout faire pour éviter à son frère le même sort qu’à Maryam. En chemin, il en apprendra davantage sur les djinns, leur nature, et les raisons qui les ont poussés à entrer en conflit avec les humains.

Kai Meyer, auteur allemand prolifique (une cinquantaine de romans publiés outre-Rhin) et plutôt actif au rayon jeunesse (deux trilogies ont été traduites en français aux éditions du Rocher, une troisième dans la collection « Le Maedre » de l’Atalante), s’adresse ici à un lectorat plus âgé, et nous propose un roman de fantasy arabisant. Foin de dragons, d’elfes et de nains, mais aussi, plus surprenant vu le contexte, de génies en lampes à huile — ce n’est pas exactement Les Mille et une nuits. De fait, Le Pays des djinns prend place dans un monde semblable au nôtre, volontiers glauque, où existe la magie, et peuplé d’un bestiaire original. Autant d’éléments à même, en principe, de convaincre le lecteur rétif à la sempiternelle fantasy « de base » ayant pour cadre le moyen-âge européen, et l’on pardonnera ainsi l’intrigue relativement classique. De fait, menée tambour battant, l’histoire se lit d’une traite, avec son lot de péripéties et de surprises, rehaussée par des personnages volontiers cachottiers et ambigus — du tourmenté Tarik au surprenant Fou aux Cicatrices.

Pur roman d’aventure, Le Pays des djinns offre ainsi un divertissement de très bonne tenue, des plus plaisant à suivre, et lorsqu’arrive la dernière page, on ne peut que souhaiter lire la suite. Heureuse coïncidence, La Guerre des vœux, deuxième volume de la trilogie, sort en librairie en même temps que le présent Bifrost.

Drift

Ça commence comme un roman post-apocalyptique qui, étrangement, convoque des images de Colbalt 60, le comix culte de Vaughn Bode. Dans une Terre future dévastée, on suit la mission d’un certain Dwayn Darker, enfant des cités-poubelles, chargé d’aller récupérer deux chiens jumeaux capables de prédire des tremblements de terre. Le monde romanesque se déploie alors peu à peu. On découvre, via des flash-backs, l’amour perdu de Darker puis la géographie de cette Terre futuriste que les plus ri-ches comptent bien quitter à bord du Drift, gigantesque vaisseau destiné à faire migrer une partie de l’humanité sur une planète qu’elle espère plus habitable. Evidemment, Darker sera du voyage et le roman bascule alors dans un autre « classique » de la SF : le vaisseau générationnel. L’espace devient alors pour Di Rollo un lieu de claustrophobie où le temps défile lentement, se répète, où la vie n’est guère plus belle chez les riches qui foncent vers un hypo-thétique paradis que sur Terre, dans la fange des bas-fonds.

Une fois de plus, comme lorsqu’il s’attaque à un genre, ici la SF post-apo’ et le vaisseau gé-nérationnel, Thierry Di Rollo se joue des clichés. Il contourne habilement le côté « générations » grâce à des humains rendus quasiment immortels et retourne cette idée classique de SF en la pervertissant habilement. Comme d’habitude chez l’auteur remarqué depuis des années pour ses récits sombres et puissants, la force du texte réside dans son personnage principal travaillé et hanté par des démons, des souvenirs, et qui se dresse face à une humanité amorale et déliquescente. Di Rollo oppose l’empathie et la droiture au comportement incompréhensible d’une catégorie d’humains qui reflète la classe dirigeante d’aujourd’hui. Drift, roman de classe ? Probablement. Mais pas que. Post-apo’, space op’, indéfinissable au final, le dernier livre de Thierry Di Rollo annihile consciencieusement tout espoir — un mouvement que le quotidien n’a rien à lui envier, ouvrez donc un journal —, mais le fait avec la maîtrise et, osons le mot, tout l’amour dont l’auteur est capable. On aime et on pleure, chez Di Rollo, bien avant de saigner. La violence des hommes est toujours plus douloureuse que celle du monde. Et si le côté sombre et dur des textes du romancier est une constante, il ne pourrait s’agir au final que d’un trompe-l’œil, d’un voile au-delà duquel se trouvent les vrais sujets, les véritables obsessions de l’auteur. Car, comme un archéologue des immondices, le lecteur découvre, au milieu des comportements affreux de la majorité des personnages, des actes de compassion, d’amour, d’humanité qui forment autant de pépites dont le contexte fait ressortir l’éclat — l’amour de Darker pour Kenny, ici à l’épicentre. Il n’y a pas d’espoir, certes, pas de raison ni de happy-end chez Di Rollo, mais pourrait-il y avoir malgré tout la possibilité d’un amour, d’un moment de grâce, de beauté auquel se rattacher ? Etre heureux, ne serait-ce qu’un instant ?

Au final, Drift se paie le luxe de regrouper plusieurs histoires de SF dans un seul excellent roman tout en continuant de malaxer les obsessions du bonhomme (les Beatles comme d’habitude en guest stars). Une lecture qui peut être éprouvante pour ceux qui découvrent l’auteur, mais tellement gratifiante.

Jack Glass

Après Gradisil, Jack Glass est le deuxième roman de Adam Roberts traduit en français (1), un livre qui fusionne le polar et la SF dans lequel nous sont proposées trois énigmes policières. La première est une histoire carcérale qui apparaît comme clairement séparée de la suite. Vient ensuite une énigme des plus classique. Et pour finir un meurtre en chambre close. L’auteur nous livre d’emblée le meurtrier pour chacune des trois affaires : le sinistre Jack Glass.

Si les formes sont celles du policier, tant les mobiles que les moyens et le contexte relèvent de la plus pure science-fiction. Dans la première partie intitulée « Dans la boîte », Jack Glass nous apparaît sous son jour le plus sombre et justi-fie son nom. S’il faut une bonne dose de « suspension de l’incrédulité » pour avaler la solution proposée, la surprise est bel et bien au rendez-vous. La deuxième partie, beaucoup plus « capillotractée », surprend surtout par la simplicité de sa solution proposée. Titrée « Les meurtres supraluminiques », elle permet toutefois de découvrir l’un des aspects les plus intéressants du livre : la société placée en toile de fond derrière ces énigmes à la Columbo où l’on sait qui et où ne manque que le comment et le pourquoi. L’Humanité a conquis tout le Système Solaire où elle croît à défaut de prospérer… A la suite de guerres s’est instaurée une société pyramidale dominée par les Oulanov, en dessous desquels viennent les cinq familles MOHnales régissant les principaux secteurs d’activité ; puis viennent les gongsi, toutes entreprises, organisations, corporations en générale monopolistiques de taille suffisante sous lesquelles on trouve des polices, milices, sectes, mafias se livrant principalement au maintien de l’ordre. Et enfin la plèbe (le prolétariat). En dessous, existe une sous-plèbe innombrable, hors du système social proprement dit, qui se compte par billions, subsiste dans la plus absolue misère et dont il est fait très peu de cas de la vie. Une organisation socio-économique vers laquelle semblent tendre les sociétés contemporaines, où la classe possédante est séparée des hordes de miséreux par une classe de policiers et de techniciens. Ce système n’en est pas moins le théâtre de luttes acharnées pour le pouvoir, surtout quand la rumeur fait état d’une technologie qui, si elle existait, pourrait bien remettre les pendules à l’heure, si ce n’est à zéro… La dernière partie, « L’arme impossible », ne surprendra qu’à moitié l’amateur de SF, d’autant que tous les éléments sont à sa disposition pour entrevoir une solution qui m’a semblée peu élégante…

Au final, l’aspect le plus décevant de l’ouvrage est peut-être bien que Jack Glass ne se révèle pas le parfait salaud que l’on était en droit d’attendre. On n’a pas ici l’équivalent SF des romans que Frédéric Dard signait Kaput, et c’est bien dommage.

Reste que si Jack Glass n’est pas parfait, il n’en est pas moins méritoire. Adam Roberts parvient à nous maintenir en haleine tout au long des cinq cents pages du récit, et l’on se pique volontiers au jeu proposé, à ce mariage somme toute pour le meilleur entre la SF et le policier. Certes, Jack Glass n’atteint sans doute pas le niveau de La Captive du temps perdu de Vernor Vinge, mais on aurait bien tort de bouder son plaisir.

Screen

Jamais je ne pensais avoir l’heur de chroniquer un livre de Barry N. Malzberg, auteur qui ne fut publié en France qu’au cours des années 70, principalement durant le second lustre de celles-ci : onze romans totalisant treize éditions. La réédition en 1980 de Service d’ordre chez Lattès, dans la collection « Titres SF » que dirigeait Marianne Leconte, fut sa dernière publication SF dans notre pays, plus de dix ans avant que votre serviteur ne rédige ses premières chroniques. Ensuite, il n’y eut plus que La Nuit hurle, un polar coécrit avec Bill Pronzini, au Fleuve Noir en 83, puis… un silence assourdissant. Quantité d’éditeurs s’étaient pourtant risqué à le publier : Opta, Casterman, Sagittaire, Olympia/Marie-Concorde, J’ai Lu, Champ Libre et Marabout. Ce qui ne le servit peut-être pas au mieux. S’il est un auteur anticommercial, un seul, c’est bien Barry Malzberg ! Personne n’a comme lui déconstruit la SF, pulvérisé ses mythes, à commencer par la conquête spatiale dans Capitaine Parano et plus encore Apollo & après… ; suivi du mythe Kennedy dans Scop et la Destruction du temple ; et enfin la SF elle-même dans Un Monde en morceaux et L’Univers est à nous. Service d’ordre et Dans l’enclos ne sont pas moins sarcastiques ni dévastateurs. Il faut bien dès lors admettre que le fan de base n’apprécie pas forcément qu’on lui dézingue sa littérature fétiche, et peut voir en Malzberg un malotru crachant dans la soupe. Si le public pouvait faire fi des aspirations intello d’un Delany réformant le space opera de fond en comble, ce n’était pas le cas avec Malzberg, qui poussa la déconstruction de la SF loin au-delà de ce qu’écrivaient les plus extrémistes représentants de la New Wave, tels Craig Strete ou Mark S. Geston. Sans forcément partager les points de vue de l’auteur, il devenait alors impossible de continuer à lire de la SF comme avant après avoir lu Malzberg, on la voyait désormais autrement, de plus haut…

Screen parut en 1970 chez Marie-Concorde, sous-marque de l’éditeur américain Olympia Press, où il fut suivi l’année d’après par L’Oracle aux mille doigts. En 1968, Malzberg rencontre Maurice Girodias, l’éditeur du Lolita de Nabokov, de Joyce et Henri Miller, mais aussi de romans érotico-pornographiques (ce qui ne veut pas dire mauvais !). Girodias propose le thème de Screen à Malzberg, qui accepte. « Ce livre est un chef-d’œuvre », écrira-t-il plus tard à Malzberg. La réédition de ce roman traduit par Eric Kahane, le frère de Girodias, sous le titre Crève l’écran, inaugurera en 1975 la collection « Contrecoup » du Sagittaire, où l’on retrouvera aussi Copurotor (ça marche !) de Ray Kainen. La sexe-fiction était désormais un sous-genre qui s’étendait des Amants étrangers de Farmer audit Screen, en passant par Tendre réseau, Défense de coucher, Vénus plus X, Orgasmachine, Vice versa, Tous vers l’extase et l’antho Eros futur. Suivront encore Langues étrangères de Di Filippo, ou l’illisible chef-d’œuvre du Japonais Shozo Numa : Yapou, bétail humain. Le genre périclita avec la libération sexuelle, et parce qu’il avait dit ce qu’il avait à dire.

Le prétexte SF de Screen est des plus mince. A l’instar d’Alice, Martin Miller passe à travers l’écran de cinéma pour pénétrer l’univers des plus grandes vedettes d’alors, Sophia Loren, Elizabeth Taylor ou encore Brigitte Bardot, et se livrer à de torrides ébats avec elles en se glissant dans la peau de leurs amants, Mastroianni, Vadim… Il va sans dire qu’en regard, sa vie étriquée et solitaire de petit employé de la Sécurité Sociale de New York le laisse plutôt aigri tandis que ses relations dans le monde réel souffrent de la comparaison et ne l’épanouissent guère.

Hymne à l’amour, au cinéma et au néant, Screen est l’histoire d’un homme qui oscille entre une riche vie fantasmée et une autre, médiocre, mais réelle, flirtant en permanence avec la folie, et le cinéma pour toile de fond, qui, s’il peut engendrer de terribles frustrations, rend surtout le monde plus supportable en offrant l’indispensable part de rêve qu’attend tout un chacun.

Remarquablement servi par l’écriture brillante de Malzberg, qui révèle son amour des femmes et où la part belle est laissée aux pages érotiques, Screen relève bien davantage du mainstream que de la SF. Si Malzberg se fait déjà volontiers sarcastique dès ce premier roman, et on le voit très critique vis-à-vis de la société américaine, l’iconoclaste de la SF est encore en devenir.

Reste à tirer un immense coup de chapeau à l’éditeur pour avoir exhumé ce roman des limbes d’un oubli de près de quarante longues années.

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