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La Révolte d'Ardathia

L’Apprentie est une jeune maison d’édition bordelaise, sorte d’éditeur école qui offre aux étudiants se destinant au métier l’opportunité de se faire les dents et qui semble pour l’heure se vouer à un travail patrimonial. Leur catalogue, bien qu’encore succinct, compte quelques noms qui parleront aux amateurs d’imaginaire ou de littérature populaire : Edith Wharton, Gaston Leroux ou Maurice Leblanc. L’initiative qui mérite que l’on s’y intéresse.

Pour cette livraison de printemps, L’Apprentie a exhumé l’auteur américain Francis Flagg (1898-1946), de son vrai nom Henry George Weiss, qui fut parmi les premiers à publier de la science-fiction – que l’on appelait encore scientitfiction –, dans les pages du tout premier magasine dédié à notre genre de prédilection, Amazing Stories, tout juste lancé par Hugo Gernsback.

Ce livre reprend les deux récits que Francis Flagg a consacré à l’univers d’Ardathia : « Les Cités d’Ardathia » (mars 1932) et « L’Homme-Machine d’Ardathia » (novembre 1927) qui tous deux ont connu l’heur d’une précédente édition française dont les traductions sont ici reprises. Celle de France-Marie Watkins pour le premier qui figurait dans l’anthologie de Jacques Sadoul Les Meilleurs récits d’Amazing Stories (J’ai Lu, 1974) et celle de Georges H. Gallet dans son anthologie Escale dans l’Infini (Le Rayon Fantastique, 1954), qui fut la première du genre dans notre pays. Francis Flagg est aujourd’hui totalement oublié si tant est qu’il n’ait jamais été connu en nos contrées, où un seul autre de ses textes fut publié.

Le récit initial est constitué de deux parties bien distinctes. La première nous présente un univers qui n’est pas sans rappeler celui du Métropolis de Fritz Lang. Le XIXe siècle avec ses usines concentrationnaires est tout proche encore de cette Amérique libérale, pour le meilleur comme pour le pire, Amérique où il est alors possible de publier un tel texte franchement marqué par la gauche prolétarienne. On y assiste à la révolte de la classe ouvrière et à l’écrasement d’icelle par la caste au pouvoir. On y voit aussi la fille du magnat de l’acier, qui a connu les affres de la vie des prolétaires, être victime d’un syndrome de Stockholm avant l’heure et intervenir pour améliorer le sort des plus démunis grâce au machinisme… mais les plus réactionnaires entendent eux aussi user afin d’en finir avec le risque d’une révolte ouvrière. La seconde partie met en scène un de ses descendants de cette dame qui découvre, bien des siècles plus tard et à la faveur d’un accident, que le monde des machines d’Ardathia, aseptisés et déshumanisé, n’est pas la seule réalité. Bien que n’étant nullement un luddite à tous crins, Francis Flagg interroge dès les années 30 le bien fondé d’un machinisme paroxystique, une question qui ne cessera de hanter la SF maintenant plus que jamais. Il questionne la place de l’homme dans la civilisation : Esclave au service de la Machine ou esclave des machines à son service ?

« L’Homme-Machine d’Ardathia » va avant tout interpeler le lecteur d’aujourd’hui par son indigence stylistique bien que ce texte fût parfaitement conforme à ce que Gernsback attendait de ses auteurs : description surtout technique de futurs qui chantent. Un cyborg venu de 30 000 ans dans l’avenir rend visite à un homme du XXe siècle auquel il essaie de décrire les merveilles de l’avenir tout en s’étonnant de ce que ce passé ne soit pas aussi primitif qu’il l’imaginait. Selon la manière de faire d’alors, on tient le récit d’une personne mise au fait des propos de l’homme du futur et de son interlocuteur qui finira à l’asile. C’est la question de l’homme augmenté qui est au cœur de ce texte en une époque, avant la crise de 29, où l’on avait encore une grande confiance en l’avenir de l’humanité ; laquelle a aujourd’hui totalement disparu sous le tsunami d’un pessimisme actuel ne voyant dans l’augmentation de l’humain que ruine de l’âme bien que tout le monde n’en ait pas moins son deuxième cerveau au bout des doigts. Les questions portées par la SF de Francis Flagg dès les années 30 restent totalement pertinentes presque un siècle plus tard. Le volume est préfacé par Francis Saint Martin. À redécouvrir.

Focus Richard D. Nolane

Richard D. Nolane, alias Olivier Raynaud, est membre de ce cé­nacle bien spécifique à Notre club, celui des érudits de l’Ima­ginaire. Une érudition plus particulièrement orientée vers les champs de l’anglo-saxonnie ancienne : disons de la guerre de Sécession à la Seconde Guerre mondiale, bien qu’il puisse s’a­venturer en deçà ou au-delà, à l’occasion. Nolane est rédacteur en chef de Wendigo, et directeur de la collection « RDN Books », chez L’Œil du Sphinx. Afin d’accroître l’espace dédié aux fictions vintages, il a par ailleurs créé la petite structure éditoriale OR, où il propose des fascicules de 48 pages, dont deux sont déjà parus.

Un Professeur d’égyptologie a tout pour ravir les amateurs de littérature populaire victorienne. Guy Boothby (1867-1905) naquit en Australie dans un milieu aisé et devint un proli­fique auteur de genre qui s’inspira de ses pérégrinations de jeunesse pour donner de la couleur à ses récits. Il publia du sentimental, du policier, de l’aventure, et Richard D. Nolane a ici réuni ses neuf textes relevant de l’Imaginaires. Il y a un intérêt certain à lire ces récits d’un autre temps, qui donnent à voir une époque révolue où la France et l’Angleterre disposaient d’empires coloniaux sur lesquels le soleil jamais ne se couchait, et où il était impératif de savoir lire – l’unique média étant les journaux papier. Le village global conçu par Marshall McLuhan n’avait pas encore vu le jour, et la révolution Gutenberg étendait son emprise sur toute la face du monde. La majorité des gens ne se rendait guère à la ville la plus proche qu’une fois l’an, pour la foire, et qui partait à destination du Tonkin ou de l’Argentine le faisait sans songer au retour. Java, l’Amazonie ou le Yukon étaient autant d’autres mondes. On lisait donc foison d’aventures exotiques écrites par des au­teurs qui n’y étaient pas davan­tage allés que leurs lecteurs – aujourd’hui, qui n’a pas vu l’Inde, le Japon, l’Égypte, même la Lune et Mars, à défaut d’y être allé ? Et croire aux fantômes ne condamnait pas au ridicule. Il faut donc adopter la posture intellectuelle idoine pour aborder les textes de Boothby.

Ces récits nous sont toujours livrés de manière indirecte. Le personnage auquel le lecteur a affaire est le plus souvent assis, occupé à boire ou à fumer en racontant l’histoire survenue à un tiers ou pendant qu’on la lui conte. Il est parfois précisé que ce n’est guère plausible. Un in­termédiaire est ainsi posé entre le lecteur et les faits, de sorte que l’affabulation n’est jamais totalement exclue – nul besoin ici d’une quelconque suspension de l’incrédulité. Une manière de rédiger qui n’offre pas la même possibilité d’identification que l’écriture directe ayant désormais cours.

Dans cette livraison du Wen­digo, la sixième en une douzaine d’années, Nolane mentionne ses homologues Joseph Altairac et Jean-Pierre Laigle trop tôt disparus. Un article du second sur Robert E. Howard conclut ce numéro. Sans oublier nombre de repères biographiques et bibliographiques sur les auteurs abordés. Les dix textes présentés ici vont de « Un visiteur céleste » (1871) de Amelia Shackleford, qui avait complétement disparu du domaine littéraire, à « Ter­reur sur la ligne » (1947) de Leroy Yerxa. Cette livraison abrite aussi deux auteurs fran­çais  : E. M. Laumann et Georges Normandy. « Le Tombeau de glace » (1915) de A. E. W. Mason, aujourd’hui connu par les esthètes pour son roman Les Quatres plumes blan­ches, est une aventure alpestre assez proche de « L’Abominable homme des glaces » (1923) que G. A. Wells publia dans le premier nu­méro de Weird Tales et que l’on lira dans Outré et Macabre !, où il complète un texte de Alpheus Hyatt Verill. L’autre fascicule, Kra­ken !, se consacre à la cryptozoologie et au célèbre monstre marin. Si les cartes n’étaient plus des portulans mentionnant « ici, il y a des dragons », le pu­blic d’alors voulait encore croire que bien des êtres des plus étranges existent à l’autre bout du monde.

Le joli travail patrimonial que constituent ces publications, qui n’intéresseront certes pas tout le monde, ne manque pas d’attraits au regard de l’esprit curieux des sources de nos genres aimés, et passer à côté serait bien dommage.

Le Suprême Sacrifice

On distingue, sur l’excellente illustration de couverture d’un livre qui l’est un peu moins, la silhouette d’un pistolero en uniforme bleu de l’Union. Le titre renvoie par ailleurs au discours que prononça Abraham Lincoln à Gettysburg, où il aurait formulé cette fameuse définition de la démocratie comme le « gou­vernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Le rapprochement de l’image et du texte semble vouloir suggérer, dans un raccourci fulgurant, que la démocratie est un combat inachevé qui s’est mené par les armes et se poursuit dans les mots. La première impression est pourtant trompeuse. Car s’il s’empare d’une légende américaine vieille d’un siècle et demi, Jack Campbell ne revisite aucunement le terrible conflit qui déchira les États industrieux du Nord et ceux du Sud esclavagistes. Dans cette Amérique-ci, la guerre de Sécession n’a pas eu lieu. Les riches des deux bords se sont entendus pour mettre en coupe réglée la jeune république. Politiciens autoritaires et petits chefs verticaux y monopolisent tous les pouvoirs. La parole publique y est muselée. L’armée régulière fédérale réprime les moin­dres écarts d’une population soumise et exploitée, sinon esclavagisée, où sourd pourtant l’envie de révolte. Dans les campagnes grossit une armée de l’ombre, commandée par d’anciens officiers de West Point en rupture de ban. Seulement, les frondeurs sont divisés en factions souvent indépendantes. Pour les unir et en même temps rallier le peuple à leur cause, ils ont besoin de quelqu’un capable de s’adresser aux foules, « d’un type dénommé Lincoln… »

L’un des propres de l’uchronie, quand elle s’invente dans un détour par rapport à l’histoire, est de tendre vers le passé un miroir déformant dans l’optique d’y faire se refléter un présent ou un futur divergent. La dynamique du récit permettant à la fiction de prendre une revanche sur les faits. Dès lors tout est possible, par exemple réécrire l’histoire du point de vue des perdants, des victimes, des oubliés, etc. Dans ce type d’exercice, les références historiques réelles servent de points de repère à partir desquels le lecteur peut mesurer la liberté créatrice de l’auteur. Ainsi du miroir tendu, dans Le Suprême sacrifice, au passé étatsunien, où la guerre d’indépendance est le mètre étalon dont Campbell, à travers ses personnages figurés en nouveaux Patriotes, veut défendre et perpétuer l’héritage. Mais le reflet est à peine troublé par ces résurgences somme toute attendues. Quid par ailleurs de la guerre mexicaine, qui aura pourtant, au mitan du siècle, des conséquences si im­portantes tant sur le plan politique qu’idéologique ? Quant aux principaux personnages, porteurs des idéaux de la nation et fers de lance de la révolution, comment ne pas relever qu’ils appartiennent tous à un cercle res­treint de militaires ou d’intellectuels blancs issus des classes moyennes et supérieures ? Où sont passés les noirs, les natifs, les travailleurs ? Le peuple américain lui-même est le grand oublié du récit. Au temps pour le point de vue des perdants…

Ce manque de relief pèse lourd sur un livre qui zigzague en permanence, et de manière pas toujours heureuse, entre discours et action. Sans surprise, c’est dans la description minutieuse et sanguinolente de la violence de l’époque qu’il trouve ses meilleurs moments. Le casting réunit à cet effet plusieurs officiers de l’histoire réelle, dont l’auteur rebat les allégeances à défaut de modifier substantiellement les biographies. Longstreet, Hancock, Armistead, Custer : derrière le pres­tige des noms, il y a donc des discours, mais peu de chair, et finalement bien peu de personnalité. Dans cette distribution atone se distinguent pourtant les silhouettes de Joshua Chamberlain et celle, colossale, de Robert E. Lee (ici, colonel de l’armée régulière). Les aventures de tout ce petit monde, marquées par une évasion et une course-poursuite picaresques, trouveront leur point d’orgue à Little Round Top, dans une réplique en miniature de la bataille que l’on sait…

On dirait qu’en se frottant à la vraie histoire, Campbell n’a pas voulu laisser libre cours à sa furia créatrice, comme il l’avait fait pour La Flotte perdue et ses succédanés, sombre cycle de space opera publié aussi chez L’atalante. Com­me s’il semblait intimidé par la mythologie qu’il avait dérangé. Du coup, si le rythme reste soutenu, l’imaginaire est retenu.

Le Dragon de lune

Il ne crache pas et flamboie à peine, le dragon que met en scène Vladimir Bogoraz. Il s’im­pose pourtant comme la figure centrale d’un captivant récit, nourri d’une dimension ethnographique qui le situe aux con­fins du documentaire et de la fiction. Voire de la mythologie, puisque l’histoire du dragon de lune tient à la fois de l’épopée, du conte et de la parabole.

Ce « rêve du paléolithique », comme l’auteur le définit lui-même, trouve son point d’ancra­ge au sein de la petite communauté nomade des Anaki et de leurs croyances. Dans cette société où règne la pensée ma­gique, le rituel et la prière sont les outils qui relient les individus entre eux, aux forces de la nature, au monde des esprits et des animaux divinisés. C’est ainsi qu’on adresse ses prières à l’Animal-montagne – le mammouth – et au renne blanc pour qu’ils veuillent bien nourrir la tribu. Mais quand, un printemps, le panthéon ne répond plus et que la famine s’installe, le chaman Youn le noir décide d’appeler le plus ancien de tous les dieux. Celui que les autres sorciers ont renoncé depuis longtemps à invoquer, par crainte du tribut à payer en échange de son aide. Car les chants anciens disent que le dragon exige des sacrifices. Les chants parlent aussi de noces sacrées et d’une fiancée épousée « par la gueule ». En butte à la colère de la communauté pour avoir porté la main sur un gibier interdit promis au dragon, Yarri, l’apprenti chasseur, est banni par Youn le noir. L’alternance des chapitres consacrés aux Anaki et à Yarri provoque un contraste saisissant entre ceux qui sont conscients de leur place dans le cercle du monde et ac­ceptent leur sort, et celui qui ne se résigne pas. Ainsi Yarri représente le rebelle, le défi constant à l’ordre établi par la nature ou par ses semblables. Mais même distendu, le lien avec la communauté ne peut être complètement rompu. Et parce que nul ne peut échap­per à son destin, viendra l’heure du retour pour cet Ulysse septentrional ensauvagé…

Lyrique et âpre, dénué de toute surenchère didactique, Le Dragon de lune, initialement paru en 1909, n’omet rien de ce quotidien à la fois étrange et fascinant des petits matins du monde, où l’insondable my­stère des pratiques chamaniques prolonge l’extrême ritualisation de la vie sociale et contraste avec des occupations terriblement prosaïques (chasser, se nourrir, s’habiller), synonymes de survie. Derrière ses manières de poème panthéiste et son appétit épique, le livre trouve son fil d’Ariane dans la tension sexuelle qui le traverse de bout en bout, et donne chair à l’existence dans un environnement inamical. Surtout, Le Dragon de lune présente l’avantage d’être rugueusement lui-même, c’est-à-dire qu’il n’a pas l’air d’avoir été écrit pour séduire un lectorat de jeunes mâles occidentaux nourris aux séries télévisées de fantasy. Ce qui n’enlève rien à sa modernité, en témoigne par exemple le personnage de Dina, jeune femme vivant comme un homme et se considérant leur égale, ou encore la dimension politique souterraine. La fin ouverte en surprendra également plus d’un.

Validimir Bogoraz prolonge le roman d’un épilogue qui donne de précieuses clés historiques et ethnologiques pour sa compréhension, en particulier sur les symboles du dragon et du héros. Tandis qu’en postface Vik­toriya et Patrice Lajoye, qu’on ne présente plus, remettent en perspective la vie et l’œuvre de l’auteur, ses sympathies révolutionnaires, son travail de folkloriste, dans le contexte de la lente émergence de la fantasy russophone.

Voilà en tout cas un livre qui présente assez d’atouts pour rencontrer un public allant au-delà du cercle habituel des amateurs d’antiquités littéraires.

Uchronies - Le Laboratoire clandestin de l'histoire

Comme Thierry Camous l’indique dans un préambule qualifié d’indispensable, le présent ouvrage n’est pas un livre d’histoire, mais un livre sur l’histoire écrit par un historien qui en maîtrise les méthodes. Une assertion confirmée par le dispositif rigoureux déployé par l’auteur pour exposer son sujet. Le curieux sera bien aise de relever ainsi l’existence d’un paratexte copieux se composant de notes, de cartes et d’une bibliographie assez complète.

La connaissance historique procède d’un travail méticuleux d’élucidation, où les faits sont établis à la lumière de l’analyse rigoureuse des sources, de leur confrontation et de leur critique, à la fois externe et interne, de manière à dresser un portrait le plus vraisemblable possible du passé. Mais, l’histoire s’écrit aussi au présent, restant tributaire de nos représentations et pouvant faire l’objet de révisions, terme à prendre ici dans son acception scientifique et non dans le sens polémique, défendu par les tenants d’une post-vérité relevant davantage de la falsification des faits. A priori, l’uchronie semble échapper à ce débat puisqu’il s’agit d’identifier dans le passé un fait précis afin de postuler qu’il ne s’est pas produit ou qu’il s’est déroulé différemment. L’historicité des faits ne figure donc pas au cœur de son propos. Néanmoins, elle peut faire l’objet de manipulations politiques. Conscient de cet écueil, Thierry Camous précise que l’histoire alternative doit rester pour l’historien un champ expérimental et ludique, un laboratoire où l’universitaire assume de faire de l’uchronie sans prétendre faire de l’histoire, écartant ainsi la tentation d’évoquer le passé à l’aune d’une vision uchronique non assumée. Il récuse enfin l’appellation d’histoire contrefactuelle, préférant jouer à partir des faits plutôt que contre eux.

Dans L’Histoire revisitée : Panorama de l’uchronie sous toutes ses formes, Éric B. Henriet a indiqué que la date de divergence était souvent faible dans l’uchronie car dépendante du niveau de connaissance du lecteur. Thierry Camous refuse de céder à cette facilité, même si l’on retrouve parmi les dix moments historiques sélectionnés la bataille de Waterloo et l’attentat de Sarajevo. Le choix de la divergence apparaît en effet crucial, au moins autant que la méthode adoptée où le probable, les possibles et l’imaginable sont déclinés avec pédagogie et toute la prudence nécessaire de l’historien, du rêve d’Empire universel d’Alexandre le Grand à l’élection contestée de Georges W. Bush en 2001.

Indépendamment de l’aspect purement ludique, quel intérêt un historien peut-il manifester pour l’uchronie ? Tout d’abord, elle permet de jeter un éclairage différent sur un point méconnu de l’histoire, du moins du grand public. Le procédé a le mérite également de bouleverser les certitudes, amenant l’historien à reconsidérer son objet d’étude, à analyser les faits sous un autre angle, voire à mettre à l’épreuve ses représentations. L’histoire alternative apparaît enfin comme un bon moyen de redonner toute sa valeur au hasard en histoire, tout n’étant évidemment pas forcément écrit à l’avance, même si le temps long pèse fortement sur les structures et les mentalités.

Uchronies : le laboratoire clandestin de l’histoire est donc un essai stimulant, écrit par un historien désireux d’appliquer ses méthodes à l’uchronie. L’amateur d’histoire alternative n’y trouvera sans doute pas matière à satisfaire son imagination débridée en matière de fiction, Thierry Camous se contentant d’esquisser des pistes de divergences historiques probables, sans rien céder à la rigueur de l’universitaire. Que cet exercice passionnant n’empêche cependant pas les amateurs de littérature ou de tout autre média, de laisser filer leur imagination. Le présent ouvrage recèle des propositions prometteuses. Écrivains et scénaristes, à vos plumes !

Le Privilège de l'épée

Si Le Privilège de l’épée s’enracine dans le même univers livresque que son prédécesseur À la pointe de l’épée (doublement chroniqué, dans les Bifrost 53 et 97), « The World of Riverside », pour les anglophones, le présent récit peut se lire de ma­nière indépendante, l’histoire se déroulant en effet une génération plus tard – tout en suivant une nouvelle ligne narrative. Pour les habitués, toutefois, gageons qu’ils prendront sans doute plaisir à retrouver quelques-uns des personnages de À la pointe de l’épée, découvrant leur devenir bien des années plus tard dans un monde familier à leur souvenir.

La Colline et le faubourg de Bords-d’eaux apparaissent en effet comme les deux pôles d’un jeu politique complexe où les conflits se nouent et se dénouent dans le secret des coteries aristocratiques qui dirigent la ville. Plus que jamais, l’honneur et la ré­putation déterminent le sort de grandes familles hantées par la peur de déchoir et ne pouvant compter que sur leur clientèle, leur réseau d’espions et leurs bretteurs affidés pour parer aux mauvais coups de l’adversaire. À ce petit jeu, la famille de Trémontaine semble avoir pris de longue date l’avantage, même si son chef se distingue surtout par son tempérament fantasque et lunatique.

Le Privilège de l’épée se focalise sur le destin de Katherine, jeune fille naïve apparentée aux Trémontaine, débarquée de sa campagne chez son oncle, le duc, après que sa mère l’a en quelque sorte vendue pour obtenir un répit financier. S’attendant à une vie de mondanités et persuadée de finir ma­riée à un parti intéressant, du moins pour sa famille, elle déchante vite en découvrant que son oncle lui réserve un sort tout autre, une vocation contre-nature au regard des conventions sociales de son époque. Ainsi lui fournit-il équipement et précepteur pour devenir une bretteuse dévouée à sa protection, ajoutant à sa réputation d’excentrique, d’électron libre et de décadent notoire auprès de ses pairs. Mais le fou n’est pas sot. Bien au contraire, il fait de nombreux envieux dans la cité, y compris parmi ceux qui réprouvent sa conduite. Il jouit aussi de nombreux appuis et semble toujours bien informé, au grand dam de Lord Ferris, son vieil ennemi, revenu d’un long exil et bien décidé à pren­dre sa revanche.

Si l’intrigue ne s’écarte guère du récit de cape et d’épée, Ellen Kushner lorgne ici da­vantage du côté du roman d’apprentissage, impulsant une touche féministe affirmée. Le Privilège de l’épée met en effet au cœur de son intrigue la condition féminine dans une société résolument patriarcale. Dans ce décor, le destin de Katherine semble tout tracé, ne se distinguant guère de celui des adolescentes de l’aristocratie appelées à servir de monnaie d’échange dans les arrangements matrimoniaux de leurs parents. D’abord avec réticence, elle abandonne ses rêves de bals et ses envies de belles robes au profit d’une vie plus libre et indépendante, où, grâce à la discipline de l’escrime et à l’assurance qu’elle lui procure, elle s’affranchit du carcan dans lequel on cherche à l’enfermer. Un plafond de verre qu’Ellen Kushner fait éclater d’une manière subtile et nuancée, renversant de belle manière les stéréotypes qui grè­vent nos représentations, y com­pris dans la littérature populaire.

On ne peut donc que se féliciter du prix Locus reçu par Le Privilège de l’épée et louer ActuSF pour la traduction de cette excellente fantasy de mœurs qui s’inscrit, on l’a dit, dans la conti­nuation de À la pointe de l’é­pée, dont le néophyte pourra lire la réédition augmentée de plusieurs nouvelles chez le même éditeur. Une belle initiative qu’il convient de saluer et recommander.

Les Divis (Vorrh T.3)

La parution de Les Divis vient achever la trilogie « Vorrh », initiée par le roman éponyme en 2019, et on peut d’ores et déjà saluer Fleuve Éditions pour sa constance, l’éditeur n’ayant pas renoncé à publier dans nos contrées l’œuvre de Brian Catling jusqu’à son dénouement. Un pari audacieux, tant cette der­nière apparaît définitivement dense, complexe et monstrueuse, ne se dévoilant qu’au prix d’un lâcher prise sans concession. Le lecteur ne disposant sans doute pas, à portée de main, des chroniques de Vorrh et Les Ancêtres, (critiques in Bifrost 96 et 105), un bref rappel n’est peut-être pas superflu.

Immense forêt primaire et primitive, située en Afrique cen­trale, la Vorrh recèlerait en son sein le Jardin d’Éden et l’arbre de la Connais­sance, autant dire l’origine mythique du monde selon les religions judéo-chrétiennes. Hélas, bien peu peuvent témoigner car la forêt dis­pose d’un arsenal défensif très dissuasif, trans­formant les hommes qui s’aventurent sous ses frondaisons en pantins dépourvus de mémoire et de volonté. Un fait bien connu des riches familles d’Essenwald, la ville colo­niale, lieu de tous les vices et péchés, dont la prospérité repose sur l’abattage des arbres de la Vorrh grâce la main-d’œuvre servile des Limboia. Sur ce substrat mythique, pour ne pas dire mystique, Brian Catling entremêle plusieurs destins, faisant appel aux res­sorts de l’amour, du complot et de la trahison, pour composer une intrigue semblable à un puzzle dont il finit par nous dévoiler le motif général dans le présent roman. Un joli tour de force, d’autant plus que la multiplica­tion des trames dans Les Ancêtres aurait pu nous faire craindre un affaiblissement fâcheux du choc visuel initial et de sa puissance d’évocation. Que l’on se rassure, il n’en est rien, bien au contraire, Brian Catling allège sa narration pour nous rendre plus lisible les circonvolutions de son récit, sans pour autant renoncer à la poésie de ses fulguran­ces visuelles et à son goût pour le grotesque, voire une certaine forme de body horror. Les situations dramatiques, les pulsions vengeresses, les trahisons et complots trouvent ainsi tout naturellement leur conclusion et leur châtiment, l’auteur poursuivant en même temps sa réflexion autour de la nature humaine, de sa fragilité et de son caractère faillible. Face au mythe biblique de la Chute et face à la déchéance d’une hu­manité en proie au traumatisme de la Grande Guerre et aux dé­mons du nazisme, l’espoir d’une éventuelle rédemption semble définitivement inatteignable, au point de préférer un retour à l’innocence originelle, sous l’égide d’une nature poussée à la reconquête par la perspective d’une réinitialisation de la Créa­tion. Les Divis apparaît ainsi comme une prophétie qui voit l’écrivain se muer en démiurge, pour le plus grand malheur de l’humanité, mais pour le plus grand profit d’une fantasy débarrassée de ses poncifs les plus encombrants.

Entre réalisme magique et weird fiction, la trilogie « Vorrh » n’usurpe donc pas les éloges d’Alan Moore, de Michael Moorcock ou de Philip Pullman, se révélant une œuvre ambitieuse et réfléchie, certes pas toujours d’un accès aisé, mais riche d’un imaginaire puissant et sombre. À ne pas manquer !

Une femme au bord du temps

Latina vivant dans le New York des 70s, issue d’un milieu défavorisé, Consuelo « Connie » Ramos subit de plein fouet une société inégalitariste qui brime son existence : obligée de re­noncer à ses études à cause de sa grossesse, elle trouve refuge dans l’alcool et la drogue pour oublier les violences de son compagnon. Cette violence se retourne contre sa propre fille, et voici Connie internée en asile psychiatrique après avoir perdu la garde de son enfant. Toujours prête à combattre à sa sortie, elle s’interpose entre sa nièce et le proxénète de celle-ci, mais ce dernier réussit à la faire in­terner de nouveau. L’asile ressemble davantage à une maison de correction qu’à un lieu de soins : insalubrité, drogues, électrochocs… Les traitements les plus durs se succèdent, et Connie risque de devenir le cobaye d’une thérapie cruelle consistant à implanter des électrodes directement dans son cerveau. Là encore, elle trouve la force de lutter, grâce notamment aux visites d’un voyageur du futur, androgyne nommé Luciente, qui lui présente un des mondes possibles à venir : Mattapoisett, où les inégalités de race, de classe et de sexe ont disparu au profit d’un épanouissement personnel libéré des contraintes sociales, loin de tout hétéropatriarcat. Mais Connie comprend que d’autres futurs existent aussi, plus sombres, et que son combat actuel conditionne l’avènement d’une société plus juste…

Voici enfin traduit en français un roman qui marqua lors de sa parution en 1976, d’une auteure à l’œuvre foisonnante et internationalement reconnue, poétesse, nouvelliste, romancière, très engagée dans les luttes so­ciales. Ce roman, réédité près d’une dizaine de fois en anglais, se rattache à la SF féministe et trouve sa place aux côtés de ceux d’auteurs comme Ursula K. Le Guin, même si, par sa tonalité, il en diffère beaucoup. Si débat il y eut à sa sortie sur sa réelle originalité ou non (les œuvres se multipliaient alors en effet pour de mêmes dénonciations d’une société oppressive), ce qui frappe le plus à sa lecture aujourd’hui est l’extrême actualité de tous les thèmes abordés : dégradation de l’environnement naturel, de la santé mentale et des traitements proposés, homophobie, xénophobie, violences sexistes et sexuelles, consumérisme, vio­lences de classe… On ne peut qu’être saisi de la clairvoyance de Piercy sur ce futur d’alors qui semble bel et bien aujourd’hui notre présent. L’âpreté de la fiction des années 70 ressemble au sommaire d’un journal quotidien de 2022. Si ce roman pèche parfois par ses longueurs, c’est sans doute par volonté démonstrative, mais sa traduction française vient au­jourd’hui faire date dans notre pays, comme pour nous aider à prendre conscience du temps écoulé depuis la volonté utopiste des seventies et, finalement, le peu de changement qui s’est opéré dans notre société alors que l’urgence ne fait que grandir. Un ouvrage tout à la fois contemporain et classique, à posséder par tout honnête Bifrostien ou Bifrostienne.

L'Invention du diable

Le capitaine Marc Papillon de Lasphrise a passé sa vie dans les combats, mettant son bras au service des armées catholiques contre les huguenots. Après 25 ans de bons et loyaux services, où il a réchappé de nombreuses fois à la mort, contrairement à quantité de ses camarades, le voici qui regagne, fourbu et vieillissant, son logis en déshérence. Son ralliement à Henri IV ne lui vaudra nulle pension. Les siens sont morts, et dans cette solitude impécunieuse il va se dédier corps et âme à l’écriture d’un recueil de Poésies qui paraîtront par deux fois de son vivant, en 1597, puis 1599. Mais voilà, pour ce fier bretteur qui ne recule jamais devant l’adversité, le peu d’échos que reçoit son livre est un coup à son honneur si vaillamment défendu toute sa vie. Par une sombre nuit d’hiver, quand les cloches mettent à zéro le compteur d’un siècle renaissant et que le vieux Lasphrise pense mourir, renonçant bien malgré lui à défendre ses écrits devant la postérité et à faire reconnaître leur valeur, voici qu’on frappe à sa porte et qu’un sombre manant entre chez lui. Après un bref échange, Lasphrise s’évanouit puis se réveille… pour de longs siècles. La mort le fuit, et le lecteur suit au fil des temps, jusqu’à aujourd’hui, les pérégrinations de ce maudit littéraire…

Et si on prenait au mot tous ces auteurs qui, jusqu’au dernier souffle, ont combattu pour une hypothétique postérité, jurant parmi leurs écrits que leur fantôme poursuivra le combat s’ils n’obtiennent pas gain de cause de leurs contemporains et des générations à venir ? C’est en tout cas ce qu’a écrit Papillon de Lasphrise, le vrai, dans ses Poésies. Car il a bien existé, et comme nombre d’auteurs du XVIe siècle, on en sait assez peu sur lui, et en tout premier lieu sur les circonstances de son décès. Et s’il n’était pas mort, après tout, pris à son propre mot d’en découdre jusqu’à obtenir la reconnaissance méritée… ? Voilà le propos d’Hubert Haddad, qui lui prolonge sa vie dans un splendide roman reprenant le thème fameux du pacte avec le Démon. Son livre sous le bras, sondeur du temps et de la renommée de ses poèmes, Lasphrise traversera les époques et leurs folies, souvent meurtrières, connaîtra les Précieuses, les galères, la Bastille, deux guerres mondiales… Sans doute est-ce un roman sur la folie : celle d’aimer, de vivre en étant mortel et d’écrire, vivant, en s’imaginant qu’on échappera ainsi à la mort. Et sur ce type de folie très particulière qui semble atteindre certains auteurs, seuls à se comprendre. La leçon, de prime abord, pourrait sembler désabusée : un fou littéraire est un fou tout court, dont on ne peut pas plus croire les élucubrations poétiques, en langage enfançon ou totalement inventé – comme l’a fait le vrai Lasphrise, pour de bon –, que les délires schizophrènes qui le font se prendre pour un rescapé des siècles. Mais le roman d’Haddad, à la langue merveilleuse, au mot ciselé, aux paysages enchantés (éblouissement de la nature et en tout premier lieu des bords de Loire) vient nous conter la fabuleuse histoire de la littérature qui se nourrit d’elle-même, à travers les siècles, réveiller notre curiosité pour ce bon Papillon, et la cohorte de tous ceux qui ont dédié leur vie à l’écriture, marchent encore aujourd’hui dans l’ombre et attendent que les vivants de ce siècle retrouve un peu de goût, par l’étude ou la fiction, pour rouvrir leurs livres. Allons donc lire Papillon. Merci Hubert Haddad !

Sous la lune brisée

République des Neuf Cités, 260 ans après le Cataclysme qui a ravagé les terres et fracturé la Lune. Le monde, largement décimé, a retrouvé une forme de sta­bilité grâce à la mise en œuvre des préceptes du Livre, un ou­vrage de sagesse antique utilisé comme fondation de la nouvelle société. Le monde, ou plus exac­tement le territoire des Neuf Cités, retranché derrière des frontières qui ne s’ouvrent qu’en fonction des besoins de repeuplement de la Républi­que. À l’extérieur, on est chez les « bar­bares », mi­grants clandestins, ter­roristes, as­saillants aux frontières.

Bâtie sur les principes du Livre, la République des Neuf Cités est une transposition transparente de la Répu­blique de Platon. Tripartition hiérarchisée entre intellectuels (qui disent le Beau, le Bon, le Juste et donc la Loi), guerriers (qui protègent) et producteurs (qui nourrissent) – tête, cœur, ventre –, inégalité stricte entre les citoyens et les barbares ou métèques venus de l’extérieur, communauté des femmes et des enfants afin que la natalité soit forte et le sentiment familial si possible inexistant, distinction claire entre sexe reproductif et sensualité, principe de justice qui assure que chacun, dûment éduqué aux valeurs de la Cité puis évalué par des tests, sera placé dans le Cercle que justifient ses aptitudes. La Répu­blique est donc une éparchie juste (en sciences politiques, on dirait une épistocratie).

Ça, c’est la théorie. Car la République est corrompue. Socrate lui-même admettait que la mise en commun des femmes et enfants serait difficile à réaliser ; ici, en dépit de réguliers accouplements cérémoniels obligatoires et d’appariements par tirage au sort, il est facile de truquer le système, d’autant plus qu’on est haut placé dans la hiérarchie sociale (même Socrate envisageait cette pos­sibilité). Ici aussi, l’égalité femme / homme, de droit, est limitée par le désir des hommes et la marchandisation d’un sexe profane. Quant aux examens censés attribuer justement les positions sociales, ils sont dévoyés pour s’assurer que les enfants du troisième Cercle ne s’élèveront pas. Conséquence de la Loi d’airain de l’oligarchie, s’est donc constituée une caste privilégiée (les Gardiens), à laquelle s’opposent les dissidents issus du troisième Cercle (ces damnés de la terre à la vie raccourcie par les maladies et les exécutions sommaires) et – chut, c’est un secret – toute une partie, factieuse, du deuxième Cercle (les guerriers, formés à une vio­lence inouïe envers leurs « inférieurs »). Enfin, le principe eugé­nique est poussé à son paroxysme avec l’interdiction de l’épigamie (accouplement « vers le haut »), puni de manière atroce.

L’autrice nous fait découvrir ce monde insatisfaisant à travers les vies croisées d’Aulas, fils bâtard de la fille bâtarde (forcée de vivre en courtisane) d’un patricien du premier Cercle, d’Hadrian, un soldat, fils de patricien, qui ne veut plus tuer ceux qui n’ont que le tort d’être étrangers, et d’Ariane, médecin généreux qui soigne les étrangers et fille d’une mère annihilée pour épigamie. Autour d’eux, une théorie de seconds rôles qu’ils aiment, qui les aiment, qu’ils craignent, qu’ils haïssent, qu’ils envient ou méprisent. Le roman est l’histoire de ces vies alors que la République est menacée par une sédition qui se légitime elle-même en invoquant la corruption et l’affaiblissement des mœurs.

Tout ceci était appétissant et commençait bien. Hélas, on dé­chante au fur et à mesure des pages. Car le roman souffre de deux défauts principaux. D’une part il veut trop dire. Trop long, il décrit trop, tant les faits que les pensées ou les motivations. Don’t tell ! Sa longueur tient aussi à un excès d’écriture qui, parfois, perd le lecteur ou rend le texte pompeux. Elle tient enfin à un excès de rebondissements, de morts inopinées et de traîtres cachés qui font que les cheminements d’un point A à un point B du récit sont toujours inutilement tortueux. D’autre part, une bonne partie de la révolte des personnages principaux est appuyée sur les sentiments qu’ils éprouvent pour d’autres personnes. L’autrice voulait peut-être dire que seule l’émotion peut rendre la raison à un excès de raison et ainsi refaire de nous des humains. Malheureuse­ment, ces interminables passages d’émois sentimentaux sont d’une grande mièvrerie qui choquerait même dans du YA.

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