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Actualités

“Sept Redditions” dans la Yozone

« Après le très recommandable Trop semblable à l’éclair, Sept redditions conforte le lecteur dans le sentiment de tenir là un cycle de Science-Fiction qui fera date. Il est ambitieux, exigeant, troublant, surprenant tant il sort des sentiers battus, mais demande à être apprivoisé pour en embrasser toute la richesse et la beauté. » La Yozone

Bifrost 97 : l'avis de Lorhkan

« Un excellent dossier, deux superbes nouvelles sur trois, un article “Scientifiction” de très haute tenue, une magnifique couverture de Chloé Veillard (…), pas de doute, on tient là un bonne cuvée… » Lorhkan et les mauvais genres

“Le Choix” au Pays des Cave Trolls

« Le Choix de Paul J. McAuley est pour moi un des plus beaux romans de cette collection Une heure Lumière. Un texte très humaniste qui démontre qu’en peu de pages, on peut arriver à produire une science-fiction de grande qualité, avec de nombreuses thématiques, de l’émotion et de la réflexion. » Au Pays des Cave Trolls

Toxoplasma

Après le méditerranéen et contemporain Sous la Colline, Sabrina Calvo emporte avec Toxoplasma ses lecteurs et lectrices outre-Atlantique, dans un futur que l’on suppose proche. L’autrice y imagine, avec une puissante inventivité, le triomphe à Montréal d’une Commune évoquant à plus d’un titre celle qui gouverna fugitivement Paris en 1871. Émergeant comme celle-ci d’un chaos généralisé – provoqué ici par la déflagration technologique que fut l’effondrement soudain d’Internet –, le «  Printemps d’érable » a fait de Montréal le fertile terreau d’une floraison d’expériences libertaires. Certaines consistent à définir de nouvelles modalités économiques, telle celle dont participe Nikki, l’une des trois protagonistes de Toxoplasma. La jeune femme travaille dans un singulier vidéoclub ne proposant à sa clientèle que d’antiques VHS de films d’horreur des années 1980, que l’on loue avec des « vrais billets, des faux billets, des coupures de journaux, des bijoux. » Puisque désormais « tout se vaut. » D’autres, comme Kim (l’amante de Nikki) et Mei, usent de leurs talents informatiques pour étendre la révolution montréalaise à «  la Grille », l’espace numérique qui a succédé au défunt Net. Aux côtés de cette cinéphile se défiant des hiérarchies esthétiques et adepte du troc, ou de ces anarcho-hackeuses réinventant le monde virtuel, l’on retrouve encore les membres d’une communauté sylvestre aux allures matriarcales : dans celle-ci, «des hommes lavent leurs affaires dans des baquets. Des femmes transportent des poutres pour construire une cabane dans les arbres. » Les unes et les autres tracent ainsi quelques-uns des nombreux « sentiers [qui] se croisent et se perdent les uns dans les autres, dévoilant à chaque lacet un mode de vie , une fenêtre vers le futur ».

Mais, en cela semblable à la fragile Commune parisienne, l’isolat libertaire formé par Montréal vit sous la menace constante d’une nouvelle sorte de Versaillais. Passé sous la coupe du « Roy », le pouvoir fédéral canadien allié « des fascistes au pouvoir aux USA » a massé ses miliciens aux portes de la ville. Et d’ainsi s’annoncer un apocalyptique «ballet d’hommes en cuir [qui] vont tout ravager, […] ne rien laisser » de cette libre Montréal… Mais comme le clame le speaker d’une radio (vraiment) libre émettant depuis les profondeurs boisées entourant la cité révoltée : « le futur est un cauchemar mais l’avenir de l’homme est une femme ». Ou plutôt les femmes que sont Nikki, Kim et Mei. Réunies en une sororité féministe, lesbienne et cosmopolite – toutes sont originaires d’un continent différent –, cette trinité intersectionnelle accouchera du miracle à la fois mystique et technologique par lequel se clôt Toxoplasma. Chacune y jouera un rôle particulier, reflet de sa profonde singularité. Nourrie de sa passion pour le cinéma-bis, mais aussi de ses rêves visionnaires, la psychogéographe Kim débusque à travers Montréal « des signaux qui grésillent, un monde invisible qui se superpose à celui, visible, qu’elle foule ». Sorte de chamane numérique, Kim explore la Grille comme s’il s’agissait d’un au-delà 2.0, tandis que la Bad Girl Mei s’y fait tantôt voleuse, tantôt guerrière pour en percer elle aussi les mystères. Au terme de ces enquêtes – car Toxoplasma, généreux melting-pot générique, tient aussi du polar –, le trio d’héroïnes mettra à jour les fondements féminins et salvateurs d’un monde dont Montréal constitue le centre géométrique et occulte…

Pour donner non seulement à lire, mais plus encore à voir comme à ressentir le foisonnement de Toxoplasma, Sabrina Calvo use avec une puissance encore plus affirmée des « armes » stylistiques mobilisées dans Sous la Colline. Les unes empruntent au vérisme anxiogène d’une SF hardboiled et dystopique. Les autres relèvent d’une poésie incantatoire jusqu’à l’hallucination, déployant peu à peu le lumineux horizon d’une utopie en passe de devenir réalité. Pas étonnant, donc, que Toxoplasma, dont l’audace et la singularité militantes évoquent celles d’un China Miéville, ait été récompensé (entre autres distinctions) par le Grand Prix de l’Imaginaire.

Sous la colline

Quoi de plus contemporain, a priori, que l’Unité d’habitation se dressant à Marseille, dont Sous la Colline fait son décor principal ? Sans doute plus connu sous le nom de Cité radieuse, cet immeuble pensé par Le Corbusier s’affirme comme l’incarnation même de la modernité architecturale. Toute entière faite de béton, commandée par une stricte rationalité combinant en un seul espace habitations, services et commerces, la Cité radieuse a irrigué l’urbanisme de la fin du XXe siècle, engendrant notamment l’école brutaliste…

Quoi de plus viril, de prime abord, que cet immense monolithe ? Imprimant dans le paysage méditerranéen ses lignes rigoureusement rectilignes, l’immeuble a pour seul ornement des silhouettes masculines. Allégoriques, ces corps d’hommes stylisés impriment sur les raides parois de la Cité radieuse le Modulor ; ce concept architectural inspiré à Le Corbusier par le nombre d’or et à l’aune duquel s’organise son Unité d’habitation.

Pourquoi pareil lieu, ostensiblement placé sous le signe d’un mâle progrès, fascine-t-il l’héroïne de Sous la Colline ? L’imaginaire de Colline — ainsi s’appelle la protagoniste du roman — est en effet tourné vers le passé. Et même le plus lointain, puisque Colline s’est choisie comme métier celui d’archéologue. Quant à la virilité, ce n’est plus son genre depuis que celle qui naquit dans un corps masculin y a renoncé, après s’être découverte en réalité femme puis avoir réalisé sa transition…

Parce que « Le Corbu », ainsi que Colline a rebaptisé la Cité radieuse, n’est en réalité pas ce dont il a pourtant si modernement et si virilement l’air. C’est cette identité secrète du Corbu que Colline entraperçoit à l’orée du roman. En février 2012, à la suite des dégâts provoqués par un incendie, un « placard inconnu » a été mis à jour dans ce monument historique qu’est la Cité radieuse. Alertée par Toufik, un vigile du Corbu, l’Institut National de Recherches Archéologiques y dépêche Colline. Tous deux découvrent, au-delà du réduit, une sorte de crypte recélant un navire semblable à ceux des Phocéens, les fondateurs de Marseille. Comme « encastrée » dans le très contemporain béton du Corbu, l’antique embarcation est d’autant plus surprenante qu’elle abrite le cadavre minéralisé d’une jeune fille. Mais l’extraordinaire découverte de Colline tourne court : agressée par le vigile en proie à une soudaine et étrange folie, peut-être même possédé, Colline sombre dans l’inconscience. À son réveil, si le navire demeure, il ne reste plus trace ni du corps, ni de Toufik… Résonnant en Colline telle « une épiphanie », ces instants énigmatiques la lient, désormais, de manière obsessionnelle au Corbu. Elle vient y habiter, accueillie par Flo, habitante de longue date de la Cité radieuse. Ainsi installée au cœur du Corbu, Colline part à la recherche de ses secrets.

D’un fascinant baroque, son enquête tient autant de l’investigation policière que de la communication médiumnique, se nourrissant de témoignages et de preuves comme de rêves. Un métissage générique dont l’écriture foisonnante de Sabrina Calvo reflète les différentes nuances, oscillant avec un même brio entre vérisme documentaire et lyrisme visionnaire. Psychogéographique et fantastique, l’envoûtante odyssée de Colline l’amènera (à proprement parler) de l’autre côté du béton, lui permettant alors de mettre à jour les fondements mythologiques et matriarcaux de la Cité radieuse. Et Colline comprendra dès lors pourquoi celle-ci la fascinait autant…

Elliot du néant

Après Minuscules flocons de neige depuis dix minutes en 2006 et le recueil Nid de coucou en 2007, suit une éclipse d’une demi-douzaine d’années pour Sabrina Calvo. L’autrice revient en 2012 un nouveau roman : Elliot du Néant. Chez un nouvel éditeur, donc, La Volte, structure n’ayant jamais reculé devant les ovnis littéraires. Une riche idée : le promoteur de Barbéri, Beauverger, Damasio et Noon était sûrement la structure idéale pour accueillir Calvo.

Nous voici en Islande, en 1986 – époque lointaine et bénie où l’île ne pleurait pas ses glaciers et où « The Riddle » de Nik Kershaw tournait en boucle sur les ondes radio. À la veille de la kermesse annuelle et d’un concert spécial du chanteur britannique, Bracken, un professeur de dessin français exilé en Islande, est appelé à la petite école de Hafnafjordur : Elliot, le concierge, a disparu. Disparu, certes, mais pas n’importe comment : depuis sa chambre, fermée de l’intérieur. Un drôle de bonhomme, que cet Elliot, sorte d’enfant trop vite monté en graine. Drôle de chambre, aussi, dont l’un des coins possède d’étranges qualités topologiques – cependant, il s’agit moins d’une chambre d’Ames que d’un passage vers le Néant. Justement, le Néant, c’est quoi précisément ? S’élançant sur la piste d’Elliot, Bracken va entreprendre une odyssée folle vers ledit Néant, au risque de s’y perdre. Ou de tout y gagner.

Ici, Sabrina Calvo ne nous convie pas à une sempiternelle histoire de mystère en chambre close, mais plutôt à une quête, aussi personnelle que métaphysique, dont le narrateur sortira métamorphosé. Cette quête se place sous les hauts patronages du singulier sonnet en X de Stéphane Mallarmé et de « The Riddle », étonnante et absurde chanson s’il en est – la légende veut qu’un concours ait été organisé pour trouver un sens aux paroles. Au fil du roman, on croise un corps enseignant dépassé par les événements, un tandem morse et macareux fort bavard vivant au bout du monde, deux tortues incroyables aux savoureux apartés (« Mais que pouvons-nous faire ? – On est des tortues ! On peut tout faire  !  »), et l’insaisissable ombre du Maître. Sans oublier un éruptif volcan — lieu où la glace se mêle au feu, l’Islande a tout du creuset d’alchimiste. Quant aux fantômes de l’enfance et les créatures du folklore de l’île, ils ne sont jamais bien loin, rôdant à la périphérie du regard…

Roman tout à la fois triste et tendre, à la folie douce et démiurgique en diable, porté par une écriture poétique et tenu jusqu’à son explosif final, Elliot du Néant est un jalon dans l’œuvre de l’autrice.

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