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Le Chemin de la nuit

C'est avec ce fort beau volume — tout simplement incontournable — que Jacques Chambon inaugure son intégrale raisonnée des nouvelles de Robert Silverberg, un travail colossal (toutes les traductions ont été révisées avec méticulosité) qui rappelle celui qu'il a déjà réalisé avec Philip K. Dick (chez Denoël) et Richard Matheson (chez Flammarion), en attendant J. G. Ballard. On lira au fil de ces 728 pages pas moins de quarante et une nouvelles. Des textes à chute comme « Opération Méduse », « Les Collecteurs », d'autres plus poétiques comme « La Colonie silencieuse », des expérimentations littéraires plus ou moins réussies, « Les Chants de l'été », et des chefs-d'œuvre tels « Comme des mouches », « Les Arbres qui avaient des dents ».

Page 118, on lira cette confession de l'auteur qui est aussi la clef de son œuvre : « Aussi loin que remontent mes souvenirs, je me suis toujours intéressé aux civilisations antiques et aux objets qu'elles ont laissé derrière elles. Enfant, je hantais déjà les musées de New York, surtout pour aller voir des dinosaures, au début, et un peu plus tard pour m'absorber dans la contemplation des vestiges sumériens, babyloniens et égyptiens, sans parler des mosaïques romaines, des codex mexicains ou des poteries des Indiens Pueblo. Je rêvais de visiter les ruines des civilisations disparues qui avaient produit ces objets ; d'ailleurs, dès que j'en ai eu la possibilité, je me suis embarqué chaque année pour un site différent : Pompéi, Chichen Itza, Rome, le Pays Pueblo… »

Et c'est bien à une épopée archéologique que les duettistes Chambon/Silverberg nous invitent. Un voyage dans le passé d'un écrivain trop souvent satisfait de lui-même, mais aussi acteur et témoin privilégié d'une époque passionnante, celle des éditeurs et anthologistes Damon Knight, Anthony Boucher, Leo Margulies, Donald A. Wollheim et Harlan Ellison. Robert Silverberg a écrit quelques-uns des plus beaux romans de la science-fiction moderne : L'Homme dans le Labyrinthe, Un Jeu cruel, Les Ailes de la nuit, Le Livre des crânes, L'Oreille interne ; il a marqué plusieurs générations de lecteurs et d'auteurs et cette intégrale raisonnée prouve — si cela est encore nécessaire — qu'il est le plus grand écrivain de science-fiction vivant.

Le Château sans nom

« Hé ! le Cid, t'es à la bourre !

— Quoi ?

— Le Mickaël Karle, j'attends ta critique…

— J'veux pas la faire…

 — Quoi ? Monsieur le chroniqueur-le-mieux-payé-de-l'équipe-de-Bifrost ne veut pas travailler ?

— J'ai un pressentiment…

— Sans déc' ?

— Je t'explique, cher patron adoré… je dézingue le bouquin de Gaborit, mais lui c'est un mec bien avec une copine sympa, tu vois le genre. Je t'éclate à la chevrotine reliée le premier roman de Colin Marchika, après je rencontre l'auteur et en fait c'est un type sensass'… tu passes des soirées d'enfer avec lui. Là, je vais te dépouiller le Karle comme si c'était un lièvre faisandé et j'ai le pressentiment que c'est un mec super-cool, en plus c'est son premier roman, faut être indulgent.

— Indulgent ? On a payé la meilleure agence de recrutement pour te trouver, en leur disant qu'on cherchait un critique dénué de pitié, style Jason Voohres, Michael Myers ou Freddy Krueger en plus méchant ! Fais attention, le Cid… T'as deux jours, après ça t'es un chroniqueur qui nique plus. »

Clic.

Bon, reste plus qu'à pondre une critique : un petit résumé, et une belle mise à mort.

Mark Drake a des problèmes, c'est pas qu'on le confonde avec Mandrake, mais sa carrière d'écrivain est sur le déclin (s'il écrit comme son papa Mickaël Karle, on comprend pourquoi…). Voilà qu'il hérite d'un château carton-pâte dans une Écosse du même tonneau, où l'attend une mission Club des Cinq/Monstres/Trésors, une quête à la sauce n'importe quoi qui comblera les joueurs de jeu de rôles (du moins ceux qui viennent juste de passer des couches au pot de chambre et apprennent à écrire « gandalphe » et « merlain » avec les pâtes-alphabet de leur soupe).

Au final, Le Château sans nom est un premier roman potache complètement improbable tant on touche le niveau zéro de l'écriture. C'est l'œuvre d'un petit frankaoui qui confond New York avec Sarcelles et l'Écosse avec la Bretagne profonde, « allez ! fais le cochon, grouïc grouïc ! ». Mickaël Karle ne se prend pas au sérieux, grand bien lui en fasse, mais en retour, il est impossible de prendre au sérieux sa prose débilo-prépubère qui aurait gagné à être pensée, aiguisée… et relue ! Voilà encore un livre trop cher, dénué de propos, desservi par un manque de recherches flagrant, des phrases qui ne veulent rien dire, une notion du point de vue très flottante et des notes de bas de page ridicules. Quant aux dialogues, le lecteur se trouvera submergé par une déferlante de « glapit », « répliqua », « intervint », « s'exclama », « ordonna », « déclara », etc.

N'est pas Terry Pratchett qui veut et il ne reste plus qu'à jeter l'ouvrage à la poubelle (après l'avoir piétiné de rage) en regrettant une fois de plus d'avoir perdu trois heures à lire un auteur, peut-être prometteur, mais assurément publié trop tôt. À noter qu'un second volume est sorti en août 2002, comme quoi un malheur n'arrive jamais seul.

L'Adversaire

La sortie du film de Nicole Garcia avec Daniel Auteuil et François Cluzet est probablement la meilleure occasion de parler de L'Adversaire — ouvrage étonnant qui tient à la fois de l'autobiographie, de l'enquête métaphysique et de la recension précise d'un fait divers abominable, irréel par nombre de ses aspects. Mais commençons par les faits : le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand tue sa femme, ses enfants et ses parents, avant de tenter de se suicider, tout ça pour cacher qu'il vivait dans le mensonge depuis des années. Contrairement à ce qu'il avait toujours dit, il ne travaillait pas à l'Organisation Mondiale de la Santé en tant que médecin. Jour après jour, alors qu'il était censé se rendre à son bureau, il allait se perdre en forêt ou lire dans des bars.

On pourrait se demander pourquoi parler de ce livre dans Bifrost. Je me contenterai de donner deux raisons. D'abord, le caractère incroyable/fantastique de la duperie : pendant plus de dix ans, personne n'a soupçonné que Jean-Claude Romand (qui n'avait aucun revenu mensuel, aucun bureau, aucun diplôme) n'était pas médecin, pas même sa femme ou ses parents ! La seconde raison me semble meilleure : Emmanuel Carrère s'est lancé avec ce livre dans un combat contre le diable (Satan est l'adversaire de Dieu), en utilisant des raccourcis (Jean-Claude = Jésus Christ) qui au lieu d'être fumeux se révèlent audacieux et pertinents, du moins sur le plan de la symbolique. Pour comprendre Satan/Le Mal (que Carrère ne considère pas d'un point de vue strictement catholique), il faut comprendre ses créatures et ses serviteurs. Pour argumenter cet éloge d'un livre réellement bouleversant, sorte de Twin Peaks à la française avec ses forêts jurassiennes impénétrables et ses secrets repoussants, j'en reproduis ci-avant deux courts passages. D'abord un extrait de la première lettre envoyée par E. Carrère à J.-C. Romand :

« Monsieur, […] J'aimerais que vous compreniez que je ne viens pas à vous poussé par une curiosité malsaine ou par le goût du sensationnel. Ce que vous avez fait n'est pas à mes yeux le fait d'un criminel ordinaire, pas celui d'un fou non plus, mais celui d'un homme poussé à bout par des forces qui le dépassent, et ce sont ces forces terribles que je voudrais montrer à l'œuvre. » Page 36.

Puis le commentaire suivant :

« J'ai posté cette lettre. Quelques instants après, trop tard, j'ai pensé avec épouvante à l'effet que risquait de faire sur son destinataire le titre du livre qui l'accompagnait : Je suis vivant et vous êtes morts. » Page 37.

L'Adversaire est un livre indispensable, écrit avec sobriété. Carrère y parle de nous à chaque page, en tentant de comprendre un homme qui a assassiné tous les membres de sa famille et leur avait préalablement menti pendant plus de dix-sept années.

Erat Fatum

Tiens, J'ai Lu se remet à publier des séries. Après le retour de la Cybione d'Ayerdhal, série entamée en des temps ancestraux au Fleuve Noir, voici celui de Pierre Pèlerin, le héros d'Hervé Jubert. Pas de bol, ce troisième volume est aussi le dernier.

Pour ceux qui auraient oublié de quoi parle cette série — deux ans et demi se sont tout de même écoulés entre la parution du roman précédent, In Media Res, et celui-ci — petit rappel des faits : nous sommes au milieu du XXIe siècle, et le Vatican — rebaptisé ici le Vé — est redevenu une puissance mondiale majeure. Pierre Pèlerin est l'un de ses principaux champions, chargé de défendre ses intérêts sur toute la planète. Mais c'est un champion atypique, adoré par la population et détesté par sa hiérarchie. Une partie de cette dernière décide donc son élimination pure et simple. Pèlerin bénéficie néanmoins de quelques appuis solides, et réapparaît bientôt au grand jour, sous l'identité de son propre sosie, acteur de films pornos ! Une couverture idéale pour pénétrer à Hotaku-Ne, le temple du jeu et de la luxure sud-asiatique, dont les dirigeants, non contents de ne pas reverser une partie de leurs bénéfices au Vé, détiennent en outre une arme capable de déclencher l'apocalypse nucléaire.

Je fais partie des lecteurs qui ont découvert Hervé Jubert avec Le Roi sans visage, paru il y a quatre ans dans la défunte collection « Abysses » de la Librairie des Champs-Elysées. J'avais immédiatement été emballé par le rythme effréné de ce roman et l'imagination débridée de son auteur. Les Aventures de Pierre Pèlerin est une série moins exubérante, et ce troisième volume ne fait pas exception. C'est même le plus policé de tous. L'écriture est mieux maîtrisée qu'autrefois, mais les péripéties et les retournements de situation se sont raréfiés. Le récit suit son cours paisiblement, trop paisiblement. Certaines idées amusantes, comme celle de transformer l'agent du Vé en acteur porno, ne débouchent pas sur grand-chose. Il faut attendre les cinquante dernières pages pour que l'action s'accélère enfin et que l'on retrouve le Hervé Jubert que l'on aime. C'est hélas un peu tard.

Erat Fatum n'est pas foncièrement un mauvais bouquin, il est même tout à fait lisible, mais il est décevant de la part d'un auteur que l'on sait capable de faire bien mieux.

Ventus

Voici donc le premier roman de Schroeder à être traduit et publié en France — alors qu'il s'agit en fait du second roman de l'auteur, le premier, Claus effect, ayant été coécrit avec David Nickle. Gageons que ce ne sera pas le dernier, car cet auteur canadien, que les lecteurs de Bifrost ont découvert dans le n° 26, nous livre ici ce qui ressemble fort à un chef-d'œuvre, en dépit de défauts formels.

Ventus est un monde sur lequel un lent et complexe processus de terraformation a échappé au contrôle des hommes, à la veille de son aboutissement. Les colons, envoyés pour y prospérer, sont tout juste tolérés par les Vents, ces machines efficientes qui gèrent l'écosystème de la planète et qui interdisent toute technologie risquant d'altérer la biosphère. Adoptant un mode de vie rupestre, les ventusiens se sont organisés en royaumes de type féodal et ont divinisé les Vents. Calandria May et Axel Chan, deux mercenaires bio-améliorés au service de l'Archipel humain, sont dépêchés sur Ventus pour traquer le Général Armiger, l'âme damnée de 3340, une Intelligence Artificielle qui a bien failli éradiquer l'humanité de la Galaxie. En butte à l'hostilité des Vents et à la méfiance des colons, leur enquête les mène droit vers le jeune Jordan, dont le destin exceptionnel sera déterminant pour l'avenir de la planète et pour la résolution de l'énigme qu'elle représente…

Nourri par une dynamique efficace et une vraie intelligence narrative, le roman de Schroeder souffre cependant de plusieurs petits défauts de style et de structure, surtout sensibles dans sa première partie. L'auteur (un fait de la traduction ?), use et abuse de termes génériques faciles pour désigner ses personnages. Ainsi le mot « compagne », utilisé à outrance et mal à propos, ou bien encore l'expression « Ah, te voilà ! », répétée de manière navrante. Plus largement, l'auteur gère inégalement les points de vue de ses personnages. S'il affecte de les respecter au début du récit, il finit par s'embrouiller et choisit parfois celui qui réduit la tension dramatique de la scène, ce qui gâche le plaisir du lecteur. Las ! Ce ne sont que des défauts mineurs, aisément occultés par la richesse thématique de ce roman dense particulièrement ambitieux.

Ventus est d'abord un texte inspiré sur la terraformation, qui lui sert à la fois de décor et de ressort narratif. En associant nanotechnologie, intelligence artificielle et terraformation, il délivre un message écologique fondé sur une réinterprétation géniale des croyances animistes : les Vents, présents dans chaque animal, chaque brin d'herbe, goutte d'eau ou pierre, ont donné une voix à la Nature. Mais l'écosystème vivant et agissant s'est affranchi de sa programmation, se dotant d'un nouveau langage pour mieux s'autodéterminer. Si ce monde s'éveillant à la conscience n'est pas sans évoquer Solaris, la description des différentes machines qui concourent à la stabilité de la biosphère de Ventus témoigne d'un souci de crédibilité scientifique qui rappelle celui de la trilogie martienne de Kim Stanley Robinson : miroirs orbitaux qui augmentent l'ensoleillement, mécanismes de filtration et d'acheminement des eaux marines pour irriguer les terres arables, etc. C'est dans cette alchimie réussie entre enchantement du réel et rigueur scientifique que résident la force et l'originalité du roman. Schroeder revisite les grands thèmes de la fantasy à la lumière de leur potentiel science-fictif. Il utilise les termes de dieu et de demi-dieu pour qualifier les I.A. et leurs serviteurs ; quant aux Vents, Griffes du Ciel et Cygnes de Diadème évoquent davantage des créatures fabuleuses que des machines. L'auteur jongle avec les arcanes de l'épopée, tels que le retour du Mal ou la bataille finale dans un lieu chargé de sens et de magie, sans ruiner la dimension hard science de son propos. Voici bien ce qu'est Ventus, un space opera hanté par le merveilleux.

Schroeder sous-tend aussi son intrigue d'une intéressante réflexion sur l'utopie. Au-delà des clins d'œil savoureux à l'île de Thomas More et aux cités radieuses, le personnage de Galas, la reine idéaliste qui fonde des villes expérimentales en plein désert, et les projets totalitaristes d'Armiger et de 3340, prouvent que la science-fiction reste une cousine espiègle de l'utopie, qui sait jouer avec les faux-semblants de l'idéal.

En conclusion, l'œuvre de Karl Schroeder est une incontestable réussite. Ventus est une fresque démesurée qui transcende ses imperfections en jouant sur nos peurs et nos aspirations profondes. Après ce roman, vous ne regarderez plus le ciel de la même façon.

Critiques Bifrost 27

Les chroniques de livres du Bifrost n°27 sont maintenant en ligne sur l'onglet Critiques !

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