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Les critiques de Bifrost

Golden Age

Golden Age

Fabrice COLIN
HACHETTE
23,00 €

Bifrost n° 109

Critique parue en janvier 2023 dans Bifrost n° 109

Après une dizaine d’années à officier hors genre, Fabrice Colin revient dans le rayon des littératures de l’Imaginaire adulte avec Golden Age, un roman de fantasy publié dans la collection « Le Rayon imaginaire ». Nous devons à Brigitte Leblanc, directrice de ladite collection, d’avoir éveillé chez l’auteur l’envie de ce retour à l’occasion d’une rencontre. S’il a longtemps œuvré sur ces terres, les lecteurs d’Atomic Bomb (avec Sabrina Calvo, Le Bélial’, 2002), de Dreamericana (J’ai lu, 2002), ou encore de Or not to be et Sayonara baby (L’Atalante, 2002 et 2004), savent que Fabrice Colin est un auteur singulier qui s’est toujours posé à la marge des genres, plus attiré par l’expérimentation littéraire que par le trope. De ce point de vue, Golden Age ne dépareille pas au sein de sa bibliographie.

À la veille de la Grande Guerre, en juillet 1914, quatre écrivains à succès de l’ère édouardienne se réunissent au Dandelion Manor, dans le Dorset, sur le littoral anglais. Vieillissants, ils savent que leur âge d’or est derrière eux. Ils ignorent cependant la raison pour laquelle l’inspiration les a quittés. Les fées fuiraient-elles le bruit des bombes qui s’apprêtent à couvrir l’Europe ? Chacun d’eux a son idée quant à la solution à mettre en œuvre pour contrecarrer le sort. L’Américain se livre à la facilité de raconter des histoires pour le cinématographe, quand l’hôte du manoir s’adonne secrètement à des expériences que ne renierait pas le marquis de Sade. Une semaine durant, les évènements qui se déroulent au Dandelion Manor sont racontés par deux témoins. L’un est un journaliste, venu de Londres, mais qui n’est pas qui l’on croit, et l’autre est un elfe qui parcourt, invisible et jaloux des hommes, le Délirium, ce monde entre-deux que seuls certains enfants perçoivent…

Golden Age est un roman dont le sujet est la littérature et l’inspiration qui la dirige. Fabrice Colin s’amuse à décaler le récit en brouillant les lignes entre histoire et fiction, détournant les dates et les références culturelles. Fidèle à son admiration pour William Shakespeare, qu’il avait déjà montrée dans Or Not to Be, l’auteur s’inspire de Songe d’une nuit d’été du dramaturge anglais. Il invoque Puck et le roi Oberon, et s’aventure dans les frivolités des drames amoureux improbables. Selon ses goûts et son humeur, le lecteur sera sensible – ou pas – à la beauté du geste. Pour ma part, je dois avouer ma déception à la lecture de ce roman. J’ai le sentiment, tout à fait personnel, que la littérature parle de littérature lorsqu’elle n’a plus rien d’autre à dire. Golden Age est en quelque sorte une réécriture de Or Not to Be, sans véritablement apporter rien de plus à ce qui a déjà été dit à cette occasion, si ce n’est des errements sentimentaux qui n’échappent malheureusement pas au marivaudage. Je retiens surtout de Golden Age quelques scènes de haute volée, dont l’auteur a le secret, et qui viennent bousculer le lecteur comme il est toujours sain de le faire en littérature.

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