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Les critiques de Bifrost

Une désolation nommée paix

Une désolation nommée paix

Arkady MARTINE
J'AI LU
608pp - 23,00 €

Bifrost n° 105

Critique parue en janvier 2022 dans Bifrost n° 105

Situé trois mois après le dénouement de Un souvenir nommé empire, premier volet de ce diptyque (cf. la critique mitigée de Bruno Para dans le Bifrost n° 102), l’intrigue de ce nouveau roman démarre par un intriguant prologue, suivi de l’introduction d’un nouveau personnage teixcalaanli et de ses prérogatives. On découvre tout d’abord la yaotlek Neuf Hibiscus (Malva, pour les intimes) à bord de son vaisseau, voguant aux confins de l’Empire Teixcalaan, allant au-devant du danger alien prophétisé par Mahit Dzmare. Cette dernière est de retour sur la station Lsel avec son double imago Yskander, ce qui lui vaut quelques problèmes politiques et potentiellement létaux. Au sein de l’Empire, trois autres protagonistes du précédent tome prendront plus d’espace : l’impériale Dix-Neuf Herminette, le clone et futur em­pereur Huit Antidote, et bien sûr l’ancienne chargée de liaison Trois Posidonie.

C’est avec plaisir que l’on replongera dans les intrigues, archives et subtilités du monde créé par Arkady Martine, qui cette fois s’agré­­mente – en plus de différentes complexités politiques – de la gestion d’un premier contact alien. Comme on peut l’imaginer, Trois Posidonie et Mahit seront confrontées à cet épineux problème, contraintes de composer avec leur relation tissée de colère, d’incompréhension et de passion, et le terrain miné d’urgences où elles mettront en œuvre leurs compétences tout à la fois linguistiques et diplomatiques.

Arkady Martine joue avec ses classiques : l’agent double, le premier contact extraterrestre et les éléments de son dénouement, les enjeux des pourparlers, la confrontation d’idées, la passion amoureuse non sans heurts et la place que chaque personnage devra trouver, entre loyauté et éthique personnelle. Une désolation nommée paix dé­taille sa réflexion sur l’identité des lignées imago autant que des stratégies de l’Empire Teixcalaan, sur les technologies en usage et la place que chaque personnage peut prendre ou changer dans un Empire qui les étouffe. L’ensemble constitue un roman d’aventure plus que divertissant, peuplé de protagonistes forts, qui s’autorise parfois un peu de légèreté. Notons un dénouement qui, même s’il paraît expéditif, permet de conclure ces différents arcs de façon satisfaisante, donnant tout son sens au titre et renforçant la résonance entre prologue et épilogue… et même sa dédicace. Un bon roman, en somme, qui prolonge le plaisir pris à la lecture de l’opus initial et qui intrigue quant aux prochains récits de son au­trice : une novella est annoncée pour 2022.

Eva SINANIAN

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