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Les critiques de Bifrost

Shining in the dark

Shining in the dark

Stephen KING, Clive BARKER, John Ajvide LINDQVIST, Jack KETCHUM, P. D. CACEK, Ramsey CAMPBELL, Stewart O'NAN, Bev VINCENT, Brian KEENE, Richard CHIZMAR, Kevin QUIGLEY, Edgar Allan POE, Brian James FREEMAN
ACTUSF
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Bifrost n° 101

Critique parue en janvier 2021 dans Bifrost n° 101

Lilja’s Library est l’un des sites mondiaux de référence sur Stephen King. Créé en 1996 par Hans-Ake Lilja, il n’a cessé de grandir depuis, jusqu’à devenir une énorme base de données d’informations et de news sur le maître horrifique du Maine.

À l’occasion des 20 ans du site, Lilja contacta de nombreux auteurs d’horreur, dont le maître lui-même, afin de réaliser une anthologie-hommage. En résulta le recueil Shining in the Dark, qui connut au fil des années de nombreuses traductions dans quantité de pays, jusqu’à arriver aujourd’hui en France.

On y trouve douze textes, dont un, perdu, de Stephen King, et un, classique, de Poe. Des textes inédits, d’autres déjà publiés mais surtout dans des revues, ce qui fait que la plupart des œuvres rassemblées ici sont inconnues de la grande part du lectorat.

Des traitements et des longueurs très différents. Des qualités comme toujours variables. Un seul point commun : le fantastique.

Voyons ce qui mérite d’être cité.

« Le Compresseur bleu », le texte de Stephen King qui ouvre le recueil, ne vaut, hélas, guère le déplacement. King y brise le quatrième mur dans un cabotinage peu convaincant qui peine à faire lever un cil. Quand un maître de l’horreur fait sans conviction le minimum syndical.

« Le Cœur révélateur », de Poe, une histoire « gothique » de meurtre entre folie et surnaturel, est bien plus convaincant, par le sentiment d’inexorable qu’il instille et l’extrême lenteur initiale d’un déroulé préparatoire qui contraste avec une réalisation aussi vive que la détente d’un ressort, jusqu’au caractère abrupt d’une conclusion entre catharsis et libération, quand, dans l’une de ces chutes dont Poe avait le secret, le mort se venge, à moins que ce ne soit la folie qui s’exprime.

Avec « Le Réseau », Jack Ketchum et P.D. Cacek livrent un récit très inquiétant d’histoire d’amour par Internet qui avance inexorablement vers la rencontre des amants virtuels. Où on réalise que ce qu’on dit de soi n’est jamais toute la vérité, et qu’un amour déçu est une chose dangereuse.

« Aeliana », de Bev Vincent, est de ces nouvelles dans lesquelles on sent un monde dont on aimerait qu’il soit développé dans un roman pour pouvoir le parcourir à fond. Ce n’est pas le cas dans ce texte court qui, de ce fait, frustre après avoir séduit.

« Charabia et Theresa », de Clive Barker, est une pochade religieuse amusante et 16+. Le Barker de Cabal s’y amuse dans une ambiance à la Magna Veritas – les amateurs de jeux de rôle s’y retrouveront.

« La Fin de toutes choses », de Brian Keene, est un texte mélancolique, triste et touchant, dans lequel s’exprime cette vérité fondamentale selon laquelle la fin du monde peut être strictement personnelle, celle d’un monde, de mon monde, plutôt que celle du monde avec un grand M.

« L›Attraction des flammes », de Kevin Quigley, est la plus longue et la plus terrifiante des nouvelles présentées ici. Dans un mix de Ça et de La Foire des ténèbres, l’auteur inscrit le lecteur dans les pas de trois jeunes garçons pris au piège d’un attraction foraine diabolique et d’un croquemitaine impitoyable. Il leur faudra lutter pour survivre, sans aucune certitude d’y parvenir. On n’est pas dans les Goonies, mais bien dans un hommage réussi à King et Bradbury.

« L›Amour d’une mère », de Brian James Freeman, est un texte assez court qui réussit à être surprenant en retournant de manière astucieuse les perceptions de son lecteur. Comme face à un prestidigitateur, on est content d’avoir été berné.

« Le Manuel du Gardien », de John Ajvide Linqvist (l’auteur de Laisse-moi entrer) est une histoire réussie de mégalomanie autour du jeu de rôle et singulièrement de L’Appel de Cthulhu. Ici, pas d’amitié à la vie à la mort comme dans Stranger Things, les mots (du Maître de Jeu comme de Lovecraft) ont du pouvoir, et entre les mauvaises mains, ils servent à de mauvaises fins. Le texte, qui par certains côtés rappelle le Christine de King, parvient à surprendre alors qu’on pensait l’avoir cerné. C’est ma foi bien fait.

Les autres textes sont moins réussis ou prenants.

Mais ce qui est réussi l’est bien (et long). Alors…

Éric JENTILE

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