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Les critiques de Bifrost

Corsaire de l'espace

Corsaire de l'espace

Poul ANDERSON
LE BÉLIAL'
304pp - 20,90 €

Bifrost n° 111

Critique parue en juillet 2023 dans Bifrost n° 111

Il semble qu’on n’ait pas encore fini de remonter des fosses de l’oubli quelques petites perles signées Poul Anderson. Dernière en date : Corsaire de l’espace, roman dont les trois novellas qui le composent furent publiées en 1966 dans Fiction, avant de disparaître corps et bien. Et pourtant…

Le roman prend pour cadre l’expansion de l’humanité à travers la galaxie, et les tensions nées de sa rencontre avec d’autres cultures tout aussi avancées qu’elle. Des tensions qui se focalisent autour de Nouvelle-Europe, une lointaine planète colonisée par les Français et éradiquée par les Alérioniens, une civilisation vieille de plus d’un million d’années. Face aux risques d’escalade et de guerre totale, les deux partis semblent vouloir minimiser l’incident. Quitte, pour la Fédération Mondiale, à dissimuler une partie de la vérité à sa population. Ce que refuse d’accepter Gunnar Heim, ancien militaire reconverti en industriel prospère, bien décidé à faire éclater la vérité et à venir en aide aux survivants de Nouvelle-Europe.

Corsaire de l’espace est composé de trois parties nettement distinctes. La première se déroule dans les salons feutrés de la diplomatie terrienne, où pacifistes et bellicistes campent sur leur position. Inutile de préciser de quel côté penche Poul Anderson. Il n’œuvre pas toujours avec finesse, dépeignant les partisans du compromis avec les Alérioniens comme des cyniques, des menteurs, voire dans certains cas capables d’imposer leurs vues par la violence. Ceci dit, il serait tout aussi caricatural de dépeindre Gunnar Heim comme un va-t-en guerre, alors que tout au long du roman l’usage de la force reste pour lui un dernier recours.

La deuxième partie s’offre un petit détour, le temps d’une escale sur une planète où l’équipage du Renard II, le vaisseau de Heim, aura fort à faire pour survivre aux dangers locaux. Comme toujours, Anderson met un point d’honneur à justifier scientifiquement chacun des obstacles qu’il place en travers de la route de ses person- nages, même les plus étonnants.

L’affaire sera résolue dans le dernier tiers du roman, avec davantage d’élégance et de finesse que de manière forte. Les amateurs de batailles spatiales en seront pour leurs frais, les lecteurs français, quant à eux, s’amuseront de cette visite guidée en terre lointaine et pourtant étrangement familière (dans sa postface, Jean-Daniel Brèque revient en détail sur les relations de Poul Anderson avec la France en général, et avec François Bordes/ Francis Carsac en particulier).

Si Corsaire de l’espace est sans doute à ranger parmi les réussites mineures de l’auteur, offrant relativement peu d’innovations sur une trame somme toute assez ordinaire, il n’en offre pas moins un authentique plaisir de lecture.

Philippe BOULIER

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