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Les critiques de Bifrost

L'Ami de toujours

L'Ami de toujours

Xavier MAUMÉJEAN
FLAMMARION
282pp - 10,50 €

Bifrost n° 63

Critique parue en juillet 2011 dans Bifrost n° 63

Qui ne s’est pas inventé, dans sa jeunesse, un ami imaginaire ? Qui n’a pas trouvé en lui un réconfort pour les gros chagrins, un alibi pour les grosses bêtises, un secours pour les grands traumatismes ? Et que devient ce double une fois que l’on a grandi, que l’on n’a plus besoin de lui ? C’est à ces questions que répond en partie, à sa manière si érudite, Xavier Mauméjean dans L’Ami de toujours, un point de départ pour une immersion dans le monde des geeks et, surtout, dans l’inconscient de l’un d’eux.

David, le personnage narrateur, est un jeune homme pas réellement sorti de l’enfance, geek assumé (quoique !) transparent aux yeux du monde. Presque une caricature. Mal dans sa peau, il a enfin l’occasion de briller et d’obtenir le métier de ses rêves : concepteur chez un géant du jeu vidéo, à New York. Mais rapidement tout dérape. Pour commencer, à l’aéroport, il rencontre Richard, son ancien ami imaginaire. Celui avec qui il a partagé toutes ses souffrances et ses peurs d’enfant. Celui qui osait accomplir les actions dangereuses, aller dans les endroits périlleux, réaliser ce que son géniteur avait peur de faire. Mais aussi celui qui avait disparu depuis dix ans, avec l’arrivée de l’adolescence. Et qui, soudain, a l’air bien réel.

Après quoi David rate son entretien professionnel chez Eidetic ; une ligne de plus dans la litanie de ses échecs. Sauf que par miracle, il est malgré tout embauché : Richard a passé brillamment le test à sa place. Serait-il possible que d’imaginaire, ce fantasme d’enfant soit devenu un être de chair et d’os capable d’interagir avec le monde extérieur ? Que vient-il faire, de nouveau, aux côtés de David ? Quel est son but ?

Une fois dépassés les tics de langage « jeune » horripilants et les nombreuses (trop, par endroits) références aux jeux, groupes musicaux et films de la génération visée par le roman, on est vite happé par l’intrigue. Le parti pris de la narration à travers un journal intime (électronique, évidemment), un procédé certes classique, est efficace et permet de plonger dans le récit sans se poser de question. On est dans la peau de David et l’irruption de son double imaginaire sème un malaise qui ira crescendo jusqu’au dénouement final, agréablement surprenant, à défaut d’être totalement original.

Après le remarqué Rosée de feu et son fond très historique, Xavier Mauméjean se permet une petit halte dans le monde actuel. Coutumier de l’immersion totale dans l’univers, dans la période qu’il utilise comme cadre à ses romans, il plonge ici dans la vie des informaticiens et des geeks avec la même envie, la même curiosité. Tout en creusant en sus la question du double à travers les cultures et les âges. Même s’il est, rappelons-le, destiné à un public jeune (dès 12 ans, selon l’éditeur), L’Ami de toujours fourmille d’anecdotes, de références plus ou moins détaillées. Et cela, sans gêner la lecture ou ralentir le rythme ! Une preuve supplémentaire de l’érudition de cet auteur exigeant et de son talent à nous faire partager ses découvertes.

Raphaël GAUDIN

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