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Les critiques de Bifrost

Kull le roi atlante

Kull le roi atlante

Justin SWEET, Patrice LOUINET, Robert E. HOWARD, Steve TOMPKINS
BRAGELONNE
432pp - 22,00 €

Bifrost n° 84

Critique parue en octobre 2016 dans Bifrost n° 84

Kull, roi de Valusie, descendant des Atlantes tombés dans la barbarie, devenu de ses propres mains roi du plus remarquable royaume de son époque. Un barbare à la musculature de panthère, au regard glacé, alliant l’intelligence politique et la fureur guerrière…

« Le Royaume des chimères » est le premier récit mettant en scène Kull de Valusie, et la première incursion littéraire de Robert Howard dans une forme de récit d’aventure historique située dans un monde imaginaire. Avec Kull, Howard découvre le pouvoir libérateur de s’affranchir de tout cadre historique. Kull est un proto-Conan, mais pas un aventurier : dans les dix récits qui lui sont consacrés, on ne le connaîtra jamais que roi, installé sur le trône d’une capitale brillante et schématique. À part quelques entités politiques vaguement définies (la Valusie, Atlantis, la Lémurie, les îles pictes…), le monde de l’âge thurien dans lequel il évolue reste flou et n’intéresse pas (encore) l’écrivain. Les récits de Kull ne sont pas exactement les récits de Conan : Howard utilise son outil littéraire (histoire et passé imaginaires) pour mettre notamment en scène des histoires allégoriques ou métaphoriques, qu’elles soient sur le thème de l’illusion, comme dans l’excellent : « Royaume des chimères », ou du double (« Les Miroirs de Tuzun Thune »). Pour être intéressant, le filon n’est pas bien défini ni très riche et l’auteur ne parviendra pas à l’exploiter très longtemps.

Avec Kull, Howard jette toutefois les fondations de cette histoire du passé, faite de continents engloutis, de migrations de peuples, de grandeurs et de chutes de civilisations, qui servira de toile de fond à une grande partie de ses récits. En aparté : les écrivains de SF sont nombreux à avoir créé une « histoire du futur » ; Robert E. Howard fait partie de ceux qui sont intéressés à l’autre versant des temps – voir l’article de Steven Tompkins « Gigantic Gulfs of Eons : Kull, Conan and Tyrant Time », dans l’anthologie critique de Don Herron The Dark Barba-rian That Towers Over All.

Quelque temps après avoir écrit la dernière aventure de Kull (« Par cette hache, je règne ! ») durant laquelle le roi échappe de peu à un attentat tendu par des conspirateurs, Howard reprendra la trame du récit, mettant en son centre un nouveau personnage plus riche et moins schématique que le roi de Valusie. Le récit se nomme « Le Phénix sur l’épée », et son héros n’est autre que Conan le Cimmérien, roi d’Aquilonie. De manière quasi contemporaine, Howard rédige un essai décrivant les grandes lignes historiques de l’Âge Hyborien, l’époque succédant à celle de Kull. L’outil se développe et la joie de créer avec lui !

Avec les récits de Kull, Robert E. Howard a inventé un nouveau type d’histoires : des personnages réalistes, vivant des aventures imaginaires dans un monde très proche de notre réalité historique (pour paraphraser Patrice Louinet). Il faudrait trouver un nom pour ça…

Les histoires à lire absolument : « Le Royaume des chimères », « Les Miroirs de Tuzun Thune ».

Au fond, le point le plus rebutant de ce personnage, pour le lecteur français du moins, reste son nom ridicule.

Laurent KLOETZER

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