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Les critiques de Bifrost

Bloodsilver

Bloodsilver

Wayne BARROW
MNÉMOS
344pp - 20,00 €

Bifrost n° 45

Critique parue en janvier 2007 dans Bifrost n° 45

Brite, Somtow et maintenant Wayne Barrow : le vampire est à l'honneur ces temps-ci !

Wayne Barrow serait un nouveau venu dans l'Hexagone. Bloodsilver serait son premier livre traduit. Ce rebelle au grand cœur, exilé au Canada pour éviter le Viêt-Nam, est officiellement traduit par Héliot et Mauméjean

Officieusement, il serait le prête-nom de ses deux « traducteurs », qui auraient écrit le livre à quatre mains. Mais peu importe l'auteur, pourvu qu'on ait un bon texte. Boris Vian nous l'avait bien démontré avec Vernon Sullivan.

Mais tout d'abord, situons le roman. Parler d'uchronie fantastique serait le plus approprié. C'est en effet une autre histoire de l'Amérique, de la fin du XVIIe siècle à 1917, que nous propose le livre.

1691 : des vampires débarquent à Manhattan.

1917 : l'Amérique met fin à la doctrine Monroe, et intervient dans un conflit européen.

Entre les deux, c'est toute l'histoire révisée des USA qui va défiler sous nos yeux. Le tout sous forme de fix-up, où chaque chapitre couvre une courte période, et où l'on peut compter parfois quelques dizaines d'années d'un chapitre à l'autre. Peu de narrateurs récurrents, même si beaucoup sont d'authentiques personnages, qui verront parfois leur vie changée par rapport à la réalité que nous connaissons. C'est ainsi que l'on va croiser des figures mythiques du Far West, comme les Dalton, Calamity Jane ou Billy the Kid. Mais aussi Mark Twain, et de grands évènements artistiques, comme la naissance des pulps ou de Hollywood.

Tous les protagonistes seront mêlés à l'épopée des vampires, les Brookes, et à leur fringale de sang, humain ou animal selon ce qu'ils trouvent. Les Brookes errent à travers le territoire, dans un long convoi de charrettes plombées, payant des fortunes pour acheter tout l'argent disponible.

L'argument essentiel du livre reste la coexistence entre humains et vampires, que le livre intègre à merveille dans l'histoire américaine, sur fond de passions humaines. Car ce sont bel et bien les sentiments humains qui façonnent la toile de fond du roman. Ainsi l'histoire de ce Français, exilé pour venger la mort de sa dulcinée. Ou bien la cupidité des humains, prêts à tout pour s'enrichir en vendant de l'argent aux Brookes. Et puis l'instinct de survie de cette famille d'origine mexicaine, prête à tout pour survivre face à l'assaillant brooke. On peut d'ailleurs y voir un petit clin d'œil au fameux Je suis une légende, du grand Matheson.

Les destins et les passions individuels se mêlent aussi aux pages sombres de l'Histoire US. Du procès de Salem à l'effrayant massacre de Wounded Knee, rien ne nous est épargné. Mais ne sombrons pas pour autant dans le pessimisme et la noirceur. En effet, Brookes et humains parviennent à vivre ensemble, dans un Etat pour le moins excentrique.

Certes, on ne tient pas là un chef-d'œuvre impérissable. Mais cette mosaïque de destins individuels et du destin collectif d'une nation est une œuvre suffisamment originale et bien écrite pour valoir le détour. Au final, ce Bloodsilver apparaît comme une talentueuse curiosité dont il serait dommage de se priver.

Olivier PEZIGOT

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