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e-Bifrost

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Bifrost n° 114

Bifrost n° 114

« Nous allons ici entreprendre un voyage au-delà des frontières propre à faire voler en éclat bon nombre d’idées préconçues sur le réel et la fiction, sur la politique et la littérature, sur le jeu et le sérieux, et ce en compagnie de l’esprit génial et excentrique d’Iain M. Banks. Un des rares auteurs contemporains à s’être frotté non seulement à l’utopie positive, mais également à ce genre conservateur qu’est le space opera. Il a fait le pari de créer une utopie qui en reste une, une utopie profondément utopique, et de la placer dans le milieu le plus conflictuel et ambitieux qui soit, celui des guerres des étoiles et des technologies magistrales. Nous allons ici voir comment l’utopie de Banks apporte un peu de ferveur politique dans un monde où l’on se sent démuni et impuissant face à la logique globalisante en marche, avec la volonté de rendre hommage, le plus délicatement et le plus joyeusement possible, à l’imagination libératrice de l’auteur... »
Alice Carabédian

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Bifrost n° 113

Bifrost n° 113

« Le spectacle de la machine qui produit du sens dispense l’homme de penser. » Il est tentant d’appliquer la formule de Jean Baudrillard à l’intelligence artificielle, et de l’envisager sous le prisme de la science-fiction qui, depuis toujours, s’occupe à produire du sens en pensant le spectacle de la machine. C’est là l’objet de ce numéro de Bifrost : les enjeux cultuels, socio-économiques, mais aussi de définition sous-tendus par la problématiques de l’intelligence artificielle. En se gardant de toute posture morale – autant que faire se peut. On s’intéressera ici à la façon dont la science-fiction d’hier et d’aujourd’hui aborde la thématique de l’IA, quelles sont les œuvres phares qui y sont liées, et comment la pensée exprimée par le genre a évolué au fil du temps. En pensant le monde futur, la SF contribue à cristalliser le présent ; une responsabilité aussi lourde que passionnante. Notre sujet présent en est un exemple éclatant. Un de plus.

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Bifrost n° 112

Revues - Bifrost - 112

Bifrost n° 112

En avril 1332, un objet qui se déplaçait à une vitesse prodigieuse entra dans le Système solaire, suivit une trajectoire hyperbolique autour du soleil puis repartit, le tout en l’espace de quelques semaines. Visible à l’œil nu, il aurait ressemblé à n’importe quelle comète, présage d’on ne savait trop quoi, brillant pendant un temps dans le ciel nocturne. Mais il était trop sombre pour qu’on le repère sans grossissement, et les télescopes capables de montrer pareil objet ne seraient conçus que six cents ans plus tard. Personne, sur Terre, ne remarqua son passage.
Le quinzième jour du même mois, dans la ville française de Bayonne, en Gascogne, Sibilla Ysarni, femme de tailleur, donna naissance à un enfant. La délivrance se produisit à l’aube, et les premiers cris du nouveau-né se mêlèrent au tintement des cloches de la cathédrale au loin. On disait de Dieu qu’il aimait le monde, mais en regardant la sage-femme essuyer le sang sur le visage de sa fille, Sibilla fut prise de l’idée hérétique que l’amour pouvait uniquement habiter la chair, qu’il était cloué sur une croix de temps et de mort.
Sibilla Ysarni mit deux autres enfants au monde avant qu’une fièvre quelconque l’emporte par une douce soirée d’été de l’an 1348. Parmi ses descendants, on compterait une certaine Esmi Sur-Kalleen, née en 2210 dans une conurbation dense sur la côte orientale de l’île de Baffin…

Robert Charles Wilson
Dans le corps du ciel

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Bifrost n° 111

Revues - Bifrost - 111

Bifrost n° 111

Le docteur Mort tourne le dos au vent pour allumer une cigarette qu’il tire d’un étui en or. Elle est encore plus longue qu’une 101, avec un bout rouge et un dragon d’or sur le papier.
« Pendant que tu regardais la mer, je suis sorti en catimini des pages de l’excellent roman que tu as dans la poche de ta veste.
– Je ne savais pas que vous pouviez faire ça.
– Oh, mais oui. Je viendrai te voir de temps à autre.
– Le capitaine Ransom est déjà là. Il va vous tuer. » Le docteur Mort sourit et hoche la tête.
« J’en doute fort. Vois-tu, Tackman, Ransom et moi, nous sommes un peu comme des lutteurs de foire ; nous faisons notre numéro sous des aspects variés, vingt fois, cent fois – mais c’est toujours pour la galerie. »
Il expédie sa cigarette par-dessus la palissade, et pendant un moment on peut suivre des yeux la petite lueur de son bout enflammé, puis on la voit s’éteindre dans l’eau. Le temps de se retourner, et le docteur Mort a disparu. Il fait froid.

Gene Wolfe
L’Île du docteur Mort et autres histoires

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Bifrost n° 110

Revues - Bifrost - 110

Bifrost n° 110

Je me suis sentie tout à coup très seule, vulnérable. Une brise soufflait de la mer et me projetait du sable dans les yeux. Le soleil basculait vers l’horizon et il ferait bientôt froid. Au moment où les prémices de la panique montaient en moi, un homme est sorti de la maison en se frottant vivement les mains. Puis il a emprunté un sentier pavé dans ma direction.
« Ravi de vous voir ici, Carrie. »
Je me suis brusquement sentie idiote d’avoir envisagé que Zima ne vienne pas.
« Salut », ai-je répondu, mal à l’aise.
Mon hôte m’a tendu la main. Je l’ai serrée et j’ai perçu la texture légèrement plastique de sa peau artificielle. Aujourd’hui, elle était gris étain.
« Allons nous asseoir sur le balcon. Le crépuscule est un beau spectacle, n’est-ce pas ? »
J’ai acquiescé : « En effet. »
Il s’est détourné, s’est dirigé vers la maison. Ses muscles, contractés par la marche, saillaient sous sa peau à la couleur métallique. Des éclats pareils à des écailles sur la chair de son dos tissaient comme une mosaïque de puces réfléchissantes. Il était aussi beau qu’une statue ; une panthère puissante et déliée…

Alastair Reynolds
Bleu Zima

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Bifrost n° 109

Revues - Bifrost - 109

Bifrost n° 109

Ma femme et mes filles ne me comprenaient pas. Elles se plaignaient de tout ce sang qui giclait dans la maison quand j’empaillais une bête. C’est ma femme qui le supportait le moins.
Elle ne supportait pas grand-chose, mais c’était une sainte. Saine, robuste, avec des bras maigres mais puissants. Une vraie paysanne. Futée et peu bavarde.
Maintenant que j’y pense, elle ne parlait quasiment jamais. Seulement pour se lamenter lorsque j’empaillais ou pour nos filles. Là, elle devenait violente. Elle m’a menacé une fois avec une pelle. « Tiens-toi à l’écart de tes filles, vieux porc !
– Mais ils le font tous ! Pose ce truc et prépare à manger ! »
Je ne parlais pas beaucoup non plus, j’essayais surtout de la calmer. Elle n’était pas méchante en fait, non. Elle s’occupait de la maison et ne parlait pas avec les voisins. Chez nous, le silence régnait. On vivait bien.

Valerio Evangelisti
Cicci di Scandicci

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Bifrost n° 108

Revues - Bifrost - 108

Bifrost n° 108

Ma dernière nuit d’enfant commença par une visite. Les sœurs de T’Gatoi nous avaient attribué deux œufs stériles. Le premier, T’Gatoi le donna à ma mère, mon frère et mes sœurs ; l’autre, elle tenait à ce que je le mange en entier. Peu importait. Il y en avait assez pour que tout le monde se sente bien à la ?n. Presque tout le monde. Ma mère ne voulait pas y toucher. Elle restait assise là, à nous regarder planer et rêver sans elle. La plupart du temps, elle me regardait, moi. Couché contre le long ventre velouté de T’Gatoi, je sirotais mon œuf en me demandant pourquoi ma mère se refusait un plaisir aussi inoffensif. Elle aurait eu moins de cheveux gris si elle se l’était accordé de temps en temps. Les œufs prolongeaient la vie et la force. Mon père, qui n’avait jamais dit non à aucun, était parvenu à un âge au moins deux fois plus avancé que la normale. Et, sur le tard, quand il aurait dû se trouver ralenti, il avait épousé ma mère et lui avait fait quatre enfants…

Octavia E. Butler
Enfants de sang

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Bifrost n° 107

Bifrost n° 107

oici les causes du désastre :
Premièrement : l’estimation de la température de la planète était incorrecte. La balise n’aurait jamais dû être installée. Ce monde ne peut pas supporter davantage la vie humaine que les déserts glacés de nos pôles. Deuxièmement : mes compagnons sont tous morts. J’ignore au juste ce qui est arrivé ; sans doute des défauts d’encodage, une défaillance au cours de la transmission ou une erreur dans la réception de la balise. Quelle qu’en soit la cause, le résultat est le même. Ils ne se sont jamais réveillés. L’analyse de la balise en dira davantage, mais un premier diagnostic a révélé que des séquences entières de leur téléchargement étaient manquantes, ou altérées, ou dans un ordre chaotique. Les matériaux de leurs réceptacles ont été traités par le système de recyclage. Troisièmement : la plupart des dépôts sont perdus, endommagés ou inaccessibles. J’ai retrouvé le premier à treize kilomètres de son emplacement initial et à trois cents mètres au fond d’une crevasse. Mon scanner a indiqué qu’il se trouvait sens dessus dessous, encastré dans la glace. Il est bloqué là depuis déjà plusieurs centaines d’années et fait désormais partie du glacier. Pas question de descendre dans cette faille pour le dégager…

Ray Nayler
Sarcophage

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Bifrost n° 106

Bifrost n° 106

Au premier anniversaire de la mission, Jasper, encore nu, encore fâché, décrète qu’ils sont piégés dans une simulation.
« Réfléchissez, débiles. » Du plat des mains, il pousse contre le plafond bas en métal, fléchissant ses bras d’os et de tendons. « Le lancement, c’était comme à l’écran, non ? L’énorme grondement, le compte à rebours interminable, l’inversion de gravité. Un véritable film. »
À deux mètres de là, Beatriz est sous perf. Un tuyau sinue jusque dans son poignet tout meurtri ; le cocktail chimique la cloue au matelas en mousse à mémoire de forme. Elle se rappelle le lancement. Un vigile qui kiffait ses tatouages de la Santa Muerte lui a refilé en douce un sandwich au salami, genre ceux qu’elle achetait à la supérette avec sa mère. Elle a vomi ce dernier dîner quand ils sont passés en apesanteur ; il flottait dans la cabine comme un ballon pourri.
Beatriz ne prend plus la peine de répondre à Jasper, sauf quand ils baisent…

Rich Larson
On est peut-être tous des sims

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Bifrost n° 105

Revues - Bifrost - 105

Bifrost n° 105

Il pleuvait sur la vallée depuis trente-six heures, une pluie drue, ininterrompue. Le sol était saturé. Le moindre repli aux flancs hérissés crachait un torrent boueux qui courait s’agréger aux autres torrents en contrebas avant de se déverser par des chenaux naturels dans la rivière. Une rivière qui, tirée de sa torpeur coutumière, roulait en rugissant tel un nouveau Mississippi, déchirant ses berges, s’étalant en une vaste tache jaune sur les champs et dans les rues de Grand Falls fuies par ses habitants en quête de hautes terres. Arbres déracinés et poutres emportées heurtaient les murs des vieilles bâtisses en brique de la grand-rue. Dans le hall de l’hôtel, les crachoirs de bronze flottaient de plus en plus haut, entrechoquant en un glas pitoyable leurs flancs sonores.
Au sommet des crêtes fermant la vallée au nord-est et au sud-ouest, cachés par une main méticuleuse, deux petits mécanismes bourdonnaient sans interruption — des minisemeurs qui ne devaient rien à la technologie terrienne. Leur énergie s’épuiserait en quelques jours, mais pour l’heure, ils fonctionnaient avec une efficacité remarquable, propulsant un courant régulier de particules chargées d’électricité vers le ciel, ensemençant les nuages qui s’amassaient sur les crêtes. Dans la vallée, la pluie tombait toujours…

Leigh Brackett
Toutes les coueurs de l'arc-en-ciel

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Bifrost n° 104

Revues - Bifrost - 104

Bifrost n° 104

Cet hiver, une maladie en Chine dont on parlait au journal de la nuit se changea en pandémie qui se mit à tuer des gens dans le monde entier. Hôpitaux et morgues débordaient. En Europe, on restait chez soi et, quand on sortait, on mettait un masque. En Amérique, certains le mettaient, surtout pour le supermarché. Même si c’était moins classe qu’une énorme éruption volcanique au parc national de Yellowstone, Willie trouvait déjà ça génial. Il suivait les chiffres sur son smartphone. Les écoles fermèrent en avance. Roxie pleura de manquer le bal de fin d’année, mais son frère s’en fichait. Il n’y avait pas de bal de fin d’année en rattrapage.
En mars, Pépé se mit à tousser beaucoup plus, au point de cracher du sang, parfois…

Stephen King
Willie le zinzin

 

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Bifrost n° 103

Revues - Bifrost - 103

Bifrost n° 103

Six jours avant qu’il n’y ait plus d’argent, Méduse se prit un bon coup de pied au cul d’Encelade. Les thermistances embarquées enregistrèrent un pic soudain — 80°, 90°, 120° —, que suivirent un soubresaut du fond marin et un violent choc latéral sur la sonde. Il y eut un flash lumineux. Un océan incroyablement bouillant. Un fond marin rocheux basculant comme une table renversée par un géant furieux.
Le canal se tut.
La télémétrie se propagea dans l’obscur océan alcalin. Des relais amarrés à la sous-croûte captèrent ces chuchotements, qu’ils amplifièrent et transmirent. Cent quatre-vingts kilomètres plus loin à l’horizon, Euryale — accrochée par en dessous à la glace comme une énorme balane métallique — sépara le signal du bruit et le fit remonter à Stheno par un câble qui traversait six kilomètres de croûte regelée. Les mains orientées en porte-voix vers l’horizon fracturé, Stheno cria en direction de la Terre.

Peter Watts
Test d’écho

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Bifrost n° 102

Revues - Bifrost - 102

Bifrost n° 102

Seules subsistaient la poussée démentielle de la chute, la mer, le ciel, la mer, tout près, le vent hurlant, pendant que l’avion tournoyait cul par-dessus tête et que les hommes cherchaient à s’extirper de leur harnais pour sauter par les trous des portières ou celui de l’aile arrachée. Coincé dans ce manège de cauchemar, Walt ne pensait qu’à une chose : il avait entendu dire que la mer était aussi dure que du béton quand on y tombait. Ça, et le fait qu’il ne voulait pas mourir. Ça, et la nécessité de la chance. Un instant d’apesanteur, des globules de sang flottant alentour — le corps du copilote transpercé par une lance de métal. Walt ne pouvait rien pour lui. Il s’était hissé sur l’immense hauteur de l’appareil désemparé en luttant contre une poussée dont le brusque gauchissement l’avait projeté vers l’ouverture béante. Ça ne l’avait pas empêché de rester coincé parmi les tuyaux tordus, quasi incapable de respirer, prisonnier des forces de la chute. Alors lui était venue la pensée — celle qui avait sans doute traversé l’esprit de milliers d’aviateurs dans des moments pareils — qu’il aurait donné n’importe quoi, absolument n’importe quoi pour leur échapper.
Pour que la chance ne l’abandonne pas…

Ian R. MacLeod
La Viandeuse

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Bifrost n° 101

Revues - Bifrost - 101

Bifrost n° 101

« Des vampires, lâche Kevin. Ce sont tous les deux des vampires.
– Qui ça ? » je demande entre deux coups de dents dans la pomme. Kevin et moi étions perchés à six ou sept mètres au-dessus du sol, dans un arbre de son jardin. Nous avions construits là une grossière plate-forme qui se voulait une cabane à la Tarzan. Kevin avait dix ans, j'en avais neuf.
« Mr. Innis et Mr. Denofrio, m'assène Kevin. Ce sont tous les deux des vampires. »
Je lève le nez du Superman que j'étais en train de lire. « Ce sont pas des vampires, je lui fais. Ce sont des coiffeurs pour homme.
– Ouais. N'empêche que ce sont aussi des vampires. Je viens juste de m'en rendre compte. »

Dan Simmons
La barbe et les cheveux : deux morsures

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Bifrost n° 100

Revues - Bifrost - 100

Bifrost n° 100

La femme qui chevauchait comme un homme, jambes écartées de chaque côté de la selle, portait des bottes en cuir renforcé, des pantalons de cavalerie en daim, des vêtements de laine doublés de fourrure blanche. Sa main gauche était enfilée dans un gant d’archer, d’un vert très sombre, qui lui couvrait l’avant-bras jusqu’au coude. Dague et carquois encom­braient sa ceinture et un grand arc à double courbure pointait dans son dos. Ses longs cheveux roux étaient rassemblés en une natte unique qui lui descendait jusqu’aux hanches. Tout en elle respirait l’opulence, la réussite. Elle savait gagner de l’argent et avait décidé de le montrer. Sans doute pour susciter le respect autour d’elle, voire la dévotion.

« Bonjour, étranger », dit-elle d’un ton moqueur ou pouvant passer pour tel.

Le regard bleu de cette femme semblait traverser Zeite sans vraiment s’y arrêter, comme une flèche ralentit à peine en trouant un drap. Observé ainsi, il se sentait plus creux et plus fragile que des os d’oiseaux…

Thomas Day

La Bête du loch Doine

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Bifrost n° 99

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Bifrost n° 99

Mr. John Philip Johnson ferma sa porte derrière lui et, descendant les marches du perron, sortit dans le matin éclatant avec le sentiment que tout allait pour le mieux de par le monde en cette journée splendide, car le soleil n’était-il pas doux et chaud ? n’était-il pas à l’aise dans ses chaussures ressemelées de frais ? et il savait qu’il avait choisi exactement la cravate assortie à la journée, au soleil et à ses pieds à l’aise, et, après tout, le monde n’était-il pas tout simplement un endroit merveilleux ? Bien que ce soit un petit homme, et que sa cravate soit peut-être un tantinet voyante, Mr. Johnson rayonnait d’un sentiment de bien-être lorsqu’il arriva en bas des marches et s’avança sur le trottoir malpropre, et il sourit aux gens qui le croisaient, et certains lui rendirent même son sourire.
Il s’arrêta au kiosque du coin et acheta son journal en lançant un « Bon-jour » plein de conviction au vendeur ainsi qu’aux deux ou trois personnes assez fortunées pour passer par là en même temps que lui. Il n’oublia pas de remplir ses poches de bonbons et de cacahouètes, puis il se mit en route vers les quartiers résidentiels.
Il passa chez un fleuriste et acheta un œillet pour sa boutonnière, mais il s’arrêta presque aussitôt pour donner cet œillet à un petit enfant dans sa poussette, qui le regarda sans mot dire avant de sourire, et Mr. Johnson lui rendit son sourire, et la mère de l’enfant regarda Mr. Johnson durant une minute et sourit à son tour…

Shirley Jackson

Un jour comme les autres, avec des cacahouètes

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Bifrost n° 98

Revues - Bifrost - 98

Bifrost n° 98

Avant leur départ pour Mars, on les appelait les « explorateurs de la nouvelle frontière ». Après le crash dans un désert martien qui avait tué tout l'équipage à l'exception — miraculeuse — de Bill Jenner, ce dernier cracha plusieurs fois cette formule au vent incessant chargé de sable. Il s'en voulait d'avoir éprouvé de la fierté en l'entendant prononcer la première fois.
Au fil des kilomètres, sa colère se calma. Le noir chagrin que la mort de ses compagnons lui avait inspiré se changea en morne grisaille. Peu à peu, il s'avisa qu'il avait commis une terrible erreur de calcul.
Il avait mal jugé la vitesse du vaisseau. D'après son estimation, il devrait couvrir à pied cinq cents kilomètres pour rejoindre la mer polaire peu profonde que ses camarades et lui avaient vu scintiller depuis l'espace ; l'astronef avait franchi en un éclair une distance considérable avant de s'abîmer dans le désert.

A.E. van Vogt
Le Village enchanté

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Bifrost n° 97

Revues - Bifrost - 97

Bifrost n° 97

Donc vous voulez que je vous parle d’Hayley. Non, j’ai l’habitude. Enfin, je devrais. On ne s’intéresse jamais qu’à ma sœur.
C’était une journée sinistre et pluvieuse d’octobre ; l’air sentait les feuilles mortes. Les tupélos noirs qui bordaient le terrain de hockey sur gazon avaient rougi, comme une piste d’empreintes de pas sanglantes laissée par un géant.
J’avais une interro de français et je devais prévoir une semaine de menus végans pour quatre personnes en cours de science de la consommation. Vers midi, Hayley m’a textée de Californie.
Je sèche les cours. Q et moi on roule vers le festival là !!!
Je l’ai ignorée. Elle adorait me taquiner avec les joies de la vie en fac. Je l’enviais, mais je refusais de lui donner la satisfaction de le montrer.
Dans l’après-midi, maman m’a textée.
Tu as des nouvelles d’Hayley ?
Non. La loi du silence, entre sœurs, c’était sacré. Son petit ami resterait un secret.
Si tu en as, appelle-moi de suite.
J’ai rangé mon phone. Elle était du genre surprotecteur.
Dès mon retour du hockey, j’ai compris qu’il y avait un loup. Dans l’allée était garée la voiture de ma mère qui ne sortait jamais si tôt du boulot.
La télé était allumée au sous-sol.
Maman la regardait, toute pâle. D’une voix étranglée, elle a dit : « La résidence universitaire m’a appelée. Hayley est partie à un festival de musique. Il y a eu une fusillade. »

Ken Liu
Pensées et prières

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Bifrost n° 96

Revues - Bifrost - 96

Bifrost n° 96

« La matrice tire son origine des jeux d’arcade, dit la voix off, des premiers programmes graphiques et des expériences militaires sur les prises crâniennes. »

Sur le Sony, une guerre cosmique en deux dimensions disparut derrière une forêt de fougères calculées pour démontrer les possibilités spatiales des spirales logarithmiques ; puis défilèrent des images militaires d’un bleu froid, animaux de laboratoire branchés sur des appareils de tests, casques reliés à des commandes de tir de tanks ou d’avions de chasse.?

« Le cyberespace. Une hallucination consensuelle ressentie au quotidien, dans le monde, par des milliards de techniciens autorisés, par des enfants y découvrant des concepts mathématiques… Une représentation graphique des données extraites des mémoires de tous les ordinateurs du système humain. Une impensable complexité. Des traits lumineux alignés dans le non-espace de l’esprit, des amas et des constellations d’information. Tels les éclairages d’une ville qui s’éloignent… »

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Bifrost n° 95

Revues - Bifrost - 95

Bifrost n° 95

Les entretoises en titane, d’un diamètre de crayon, n’étaient pas conçues pour supporter l’impact. Les parois de pressurisation, minces comme des feuilles de papier, avaient fléchi et éclaté, éparpillant les débris dans le vide et sur un kilomètre carré de sol lunaire.
Un instant avant l’impact, elle avait pensé à vider les réservoirs. Il n’y avait pas eu d’explosion, mais même un atterrissage en douceur aurait détruit le Moonshadow. Dans l’étrange silence, le fragile vaisseau s’était brisé et disloqué telle une canette broyyée.
Elle se redressa sur le sol lunaire gris et regarda alentour. Son ombre s’étalait devant elle, flaque d’encre affectant une forme humaine fantastiquement étirée.
Le site, chaotique, stérile, se présentait en lavis soutenus de gris et de noirs. « Grandeur et désolation », souffla-t-elle. Dans son dos, le Soleil frôlant les montagnes allumait des reflets sur les échardes de titane et d’acier éparpillées sur la plaine grêlée.
Patricia Jay Mulligan considéra ce paysage accablant et s’efforça de retenir ses larmes.

Geoffrey A. Landis
Marche au soleil

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Bifrost n° 94

Revues - Bifrost - 94

Bifrost n° 94

Quelque chose me contraignait à rester là, comme si une main gigantesque se fût posée sur ma nuque. Une idée me traversa l’esprit. Je regardai le soleil et sursautai : quatre ou cinq fois plus gros qu’à l’ordinaire, rouge sang mais pourtant loin de se coucher, il était suspendu à quarante-cinq degrés au dessus de l’horizon. Aucune parcelle de chaleur ne semblait en émaner : cet astre était froid !

D’instinct, j’avais d’abord admis comme allant de soi me trouver toujours sur Terre, mais je comprenais que c’était impossible. J’étais forcément arrivé sur une autre planète, gravitant autour d’un autre soleil — une planète glacée couverte d’une neige née de l’air congelé. La terrible réalité de ma situation me transperça : j’évoluais sur un monde pétrifié sous les rais d’un soleil mort !

John W. Campbell
Le Ciel est mort

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Bifrost n° 93

Revues - Bifrost - 93

Bifrost n° 93

Asante part en hurlant. L’enfer est une chambre de réverbération pleine de cris, d’eau de mer et de chocs métalliques. Des ombres monstrueuses passent sur les cloisons, de la lumière verte ondule et s’entrecroise sur la moindre surface. Telles des créatures qui surgissent d’un lagon brillant, les Sahilites émergent du puits central en ouvrant le feu : le milieu du corps de Rashida explose en une brume sombre, sa moitié supérieure tombe sur le pont. Kito est toujours en train de se traîner vers le fusil à harpon sur le séchoir… comme si un vieil outil de pêche pouvait repousser ces monstres avec leurs flingues, leur air comprimé et leurs petites cartouches qui s’enfoncent loin dans votre chair avant de vous montrer l’effet sur vos intestins de la libération de cinq cents atmosphères.
Asante a moins que ça.
Il n’a que ses poings…

Peter Watts
ZeroS

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Bifrost n° 92

Bifrost n° 92

« J’estime que les nouvelles de Sturgeon égalent celles de Maupassant. Elles sont meilleures que celles de O. Henry, de Damon Runyon, de Ring Lardner — vous savez, les plus grands nouvellistes… Je pense qu’elles sont meilleures que celles de Hemingway (les romans de ce dernier, c’est encore autre chose). On parle d’un écrivain de cette stature. Dans la mesure où la nouvelle est un art, Sturgeon est le nouvelliste américain par excellence. Qu’il écrive de la science-fiction relève d’un magnifique accident. »

Samuel R. Delany

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Bifrost n° 91

Revues - Bifrost - 91

Bifrost n° 91

Mon portable vibre. Je paie le taxi.
Je m’époumone : « Les enfants, papa est rentré ! » Un ballon de foot traîne sur la pelouse. Mon téléphone vibre à nouveau. Je regarde l’écran. Liz. J’appuie sur le bouton sans y penser. Je trébuche sur un gant de baseball. La voix dans l’écouteur monte et descend en montagnes russes. 
« Il faut que je te parle. »
Une pointe me traverse le cœur.
« Moi aussi.
– Je ne sais pas à qui le dire. Même Nathan, je ne suis pas sûre qu’il me croirait. » 
Je couvre le micro de la main et crie : « Jérôme ! Charles ! »
« J’ai fait vérifier les données, murmure Liz. J’ai fait amplifier les courbes. Et le résultat est là, presque imperceptible. J’ai refait trois fois les tests. »
Un cri traverse le quartier. Le chien des voisins hurle. Un picotement dans ma nuque. « Charles ! Jérôme ! »
Des sirènes de police percent l’air.

Olivier Caruso
Ex Silentio

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Bifrost n° 90

Revues - Bifrost - 90

Bifrost n° 90

Le film se déroulait dans mon esprit, clair comme de l’eau de roche, et je me retrouvais dans la cellule 14 de la Fusée Quatre tandis que les minutes s’égrenaient et que les parois vibraient chaque fois qu’avait lieu l’explosion qui lançait l’un des engins ; les dix hommes dont je faisais partie patientaient là, dans leur hamac, prisonniers à l’intérieur de cette boîte de métal sans fenêtres et de forme bizarre. On attendit jusqu’au moment où l’énorme main de géant s’abattit sur nous et que son soufflet nous enfonce dans les ressorts de nos couchettes, nous écrasant à nous étouffer, alors qu’on luttait pour respirer, que le sang nous rugissait dans la tête, que notre estomac se soulevait en dépit de toutes les pilules qu’on nous avait fait ingurgiter et qu’on entendait rire le géant. Broum ! Broum ! Broum !
Il semblait que ces soufflets ne s’arrêteraient jamais ; ils nous martelaient le ventre, nous coupaient le souffle ; on entendait vomir un gars, un autre sanglotait et le Broum ! Broum ! meurtrier riait toujours. Puis le géant cessa de rire, de nous souffleter, et on sentit à nouveau ce corps douloureux et tremblant qu’on était surpris de redécouvrir. Walter Millis jura tout son saoul dans le hamac au-dessous de moi, Breck Jergen, notre sergent d’alors, se débarrassa péniblement de son harnais pour venir voir où nous en étions, puis, dans le brouhaha, une voix faible, cassée, annonça, hésitante : « Breck, je crois que je suis blessé… »

Edmond Hamilton
Comment c’est là-haut ?

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Bifrost n° 89

Revues - Bifrost - 89

Bifrost n° 89

MARTIN SE RÉVEILLA dans un vaste lit blanc, aux côtés d’une brune endormie qui portait une nuisette en dentelle blanche. Il ne connaissait ni cette pièce, ni cette femme.
Lentement, il se redressa sur son séant, dans l’attente de la douleur. Celle-ci brillant par son absence, il posa la main sur l’épaule de la dormeuse qui tressaillit, sans se réveiller ; ce léger mouvement lui fit retirer sa main, qu’il contempla — des doigts roses, robustes.
Son alliance avait disparu…

Nancy Kress
Martin le mercredi

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Bifrost n° 88

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Bifrost n° 88

Debout dans la salle de bain, Adam récita l’incantation griffonnée sur la serviette en papier, s’attendant presque à voir quelque apparition au regard mauvais prendre sa place dans la glace une fois la dernière syllabe prononcée. Dans son cou, la clapet se courba puis se détacha dans un petit bruit sec. Adam se saisit de la plaque de peau avant qu’elle ne tombe et la déposa sur une feuille d’essuie-tout bien propre. Il avait du mal à voir l’intérieur de l’ouverture, tout en n’étant pas certain de le vouloir véritablement, mais il trouva le port au toucher sans souci. Il retourna dans la chambre, prit la carte mémoire sur la table de nuit avant de s’allonger, prenant soin de baisser l’intensité des lumières.
[…] Adam positionna la carte mémoire.

Greg Egan
La Vallée de l’étrange

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Bifrost n° 87

Revues - Bifrost - 87

Bifrost n° 87

MARSHALL GROVE était né dans Borough, en une année où les démo-lisseurs avaient, on ne sait en obéissance à quel ordre municipal, cessé de manier, dans ce vieux et pittoresque quartier, le fer et le juron. Au fait, l’épicerie paternelle où il vit le jour, parmi les barils de mélasse, les régimes de millet et les bocaux de marinades, se trouvait à l’angle de Marshallsea Street et d’une venelle sans nom où ne s’ouvraient que d’antiques remises. Son père, Sol Grove, qui avait les mauvais payeurs en horreur, déplorait de tout son coeur sec et honnête la disparition de la vieille prison pour dettes : la Marshall Sea, et c’était par double estime pour cette geôle de la justice financière et de la rue qui abritait son négoce, qu’il donna à son fils le nom de Marshall, au mépris du parrain, Jérémiah Tulkes, qui aurait voulu éterniser son honorable prénom au moyen de la descendance des Grove.

Jean Ray
L’Histoire de Marshall Grove

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Bifrost n° 86

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Bifrost n° 86

Aujourd’hui maman m’a appelé monstre. Tu es un monstre elle a dit. J’ai vu la colère dans ses yeux. Je me demande qu’est-ce que c’est qu’un monstre. Aujourd’hui de l’eau est tombée de là-haut. Elle est tombée partout j’ai vu. Je voyais la terre dans la petite fenêtre. La terre buvait l’eau elle était comme une bouche qui a très soif. Et puis elle a trop bu l’eau et elle a rendu du sale. Je n’ai pas aimé.
Maman est jolie je sais. Ici dans l’endroit où je dors avec tout autour des murs qui font froid j’ai un papier. Il était pour être mangé par le feu quand il est enfermé dans la chaudière. Il y a dessus FILMS et VEDETTES. Il y a des images avec des figures d’autres mamans. Papa dit qu’elles sont jolies. Une fois il l’a dit.
Et il a dit maman aussi. Elle si jolie et moi quelqu’un de comme il faut. Et toi regarde-toi il a dit et il avait sa figure laide de quand il va battre. J’ai attrapé son bras et j’ai dit tais-toi papa. Il a tiré son bras et puis il est allé loin où je ne pouvais pas le toucher.
Aujourd’hui maman m’a détaché un peu de la chaîne et j’ai pu aller voir dans la petite fenêtre. C’est comme ça que j’ai vu la terre boire l’eau de là-haut…

Richard Matheson
Journal d’un monstre

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Bifrost n° 85

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Bifrost n° 85

Sorn n’a plus faim depuis longtemps.

Il se contente de survivre à l’absence ; par-delà quelques parsecs, loin de ce monde en périphérie de la nébuleuse N-24 où il vient d’atterrir, elle s’en est allée au creux de l’espace noir.

Et souvent elle vient lui sourire dans ses pseudorêves.

Naëva est là, au sommet d’une vieille colline. Elle l’attendait depuis son dernier passage et la jeune femme n’a montré aucun signe d’impatience. Tous deux se retrouvent ainsi dans la lumière mordorée d’un soir ; un air doux glisse sur cet endroit qu’il ne connaît pas vraiment, toujours un peu le même d’une fois à l’autre, jamais tout à fait différent. Le Temps n’existe pas. Il y a un soleil rouge accroché au fond jauni du ciel. Lorsque Sorn le veut bien, il peut apercevoir des arbres grèges qui pointillent les champs nus, là-bas, aux franges brumeuses des grandes vallées…

Thierry Di Rollo
Proscenium

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La Maison des Soleils

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