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Catherine DUFOUR

Née en 1966 à Paris, Catherine Dufour est vendeuse de voitures à Drancy et de perles noires à Tahiti avant de se consacrer à la fabrication de bibliothèques numériques en Seine-Saint-Denis (93). Adepte de voyages en tout genre, États-Unis, Russie, Argentine et Tanzanie, elle pratique aussi les raves dans les catacombes et les free parties dans les squats d’Amsterdam. Ayant commencé à écrire à sept ans, elle attend d’avoir trente ans pour décider qu’elle a appris le métier. Elle jette tout ce qu’elle a écrit jusque-là et publie son premier roman, Blanche-neige et les lance-missiles, tome I de la série de fantasy humoristique « Quand les dieux buvaient ». Après cette trilogie en quatre volumes, Catherine Dufour sort Le Goût de l’immortalité, un roman de science-fiction qui reçoit de nombreux prix, suivi d’un recueil de nouvelles, L’Accroissement mathématique du plaisir, et d’un roman punk-fictif, Outrage et rébellion, aux éditions Denoël.

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Mémoires mortes

Mémoires mortes

L’AIR NOCTURNE ETAIT tiède et chargé d’effluves fruitées, la lune en son plein versait sur le parc un doux argent trompeur. Allongée dans l’herbe, sous les branches fleuries d’un chèvrefeuille, Nylone sommeillait. Un phénix, descendu sans bruit du ciel étoilé, se posa près d’elle et caressa de ses ailes bleues le visage de la jeune fille. Nylone bâilla, étira longuement ses bras chargés de bijoux. La mousseline blanche de sa tunique était mouillée de rosée. Elle ouvrit paresseusement les yeux : sur l’horizon outremer s’élevaient les hautes tours de la cité de Tintagel, mille clochers lumineux au-dessus desquels se croisaient des étoiles filantes. L’oiseau magnifique replia ses ailes, ouvrit son bec doré :

« BIP BIP BIP. »

Nylone s’assit en grimaçant : « Putain ! Fait chier, ce beeper… »

 

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Un Soleil fauve sur l'oreiller

Un Soleil fauve sur l'oreiller

QUAND LE CIEL BAS et lourd pèse comme un couvercle…

Le ciel ne pesait pas : il était carrément posé par terre et noyait les rues dans une brume de gel. Mye, rétractée au fond de son manteau, avançait à longues enjambées sur le trottoir sonore, donnant courageusement du front contre la bise.

Les devantures défilaient à sa droite, chocolaterie rouge, pharmacie verte, oxygènerie grise. Mye tourna un coin et soupira d’aise tandis que le vent continuait tout droit. Elle ralentit le pas en passant devant la devanture éteinte d’un Lavomatic. Il était tard, la boutique était fermée et pourtant, comme la veille et comme le jour d’avant, une machine tournait. Une femme était assise sur une chaise, juste en face de la machine ; une vieille dame vêtue de noir qui paraissait menue et terriblement cassée, presque diluée dans la pénombre jaunâtre. Cette fois, Mye s’arrêta :

Quelle vie de misère oblige de si vieilles dames à sortir de si mauvaise heure ?

Mye approcha de la vitrine embuée. Elle fit glisser son masque stérile sur son menton et effleura la vitre du nez. La vieille dame ne bougea pas. Mye remit son masque en place et repartit, la tête enfoncée dans ses épaules.

 

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L'Amour au temps de l'hormonothérapie génétique

L'Amour au temps de l'hormonothérapie génétique

Los Angeles 2019…

Hillary était une petite bonne femme discrète. Elle portait des souliers plats, des jupes opaques, le minimum légal d’implants et un somptueux regard naturellement bleu. Quand Tigre lui demanda ce qu’elle faisait pendant son tiers-temps actif, il fut étonné d’apprendre qu’elle était Chief Engineer chez SkyNet, spécialisée dans l’hormonothérapie génique.

Tiger, lui, travaillait comme Life Time Value Manager dans une société de services. Il avait le physique de l’emploi, sobre et morose ; Hillary le trouva suprêmement distingué et délicieusement viril, avec dans le regard ce léger flou qui trahit les blessures secrètes pudiquement dissimulées, bref, elle tomba amoureuse comme un sac.

Tiger s’en rendit compte avant elle, évalua de ses yeux myopes les gros seins genuine cachés sous la blouse modeste, passa quelques jours à soupeser les avantages et les inconvénients d’une liaison éventuelle. Il se décida un mercredi à 16h22 GMT et à 21h09, Hillary était sa maîtresse, temps record dont il se vanta abondamment auprès de ses collègues.

 

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La Liste des souffrances autorisées

La Liste des souffrances autorisées

« ET IL Y AVAIT CETTE BONNE femme, avec cet accent de la Citadelle… »

Monsk pose sa fourchette dans le bazar qui encombre son assiette :

« Tu vois ce que je veux dire ? Elle parlait comme ça : “Est-ce que quelqu’un peut vraiment jurer qu’il est possible d’élever un enfant sans jamais ressentir de pulsion sadique ? Je suis sa mère, quand même ! Je ne suis pas censée lui faire croire que le monde est sympa, n’est-ce pas ? Quand il arrive avec un de ces foutus dessins qu’il fait à l’école, je suis vraiment obligée de faire semblant que c’est beau ? Pour qu’il croie qu’il suffit de chier sur une feuille pour me faire plaisir ? Je veux dire, je suis sa mère ! C’est mon boulot, de l’élever ! Et cet imbécile m’aime ! Et pourquoi ? Parce que ça lui vient comme ça ? D’instinct ? Et je suis censée lui apprendre à se fier à ses instincts ? Et à déborder d’amour pour n’importe qui ? Et à le manifester n’importe comment ? Je suis censée l’expédier dans la vraie vie avec cette mentalité de… cette sensiblerie de… de perdant ? J’en ai fait des confettis, de son dessin ! Parce que ça m’a fait plaisir, et parce que ça lui apprend la vie !” »

Monsk éclate de rire et reprend ses couverts :

« C’est excellent. Excellent. Qu’est-ce que c’est, au fait ? »

 

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L'Accroissement mathématique du plaisir

L'Accroissement mathématique du plaisir

« Elle est superbe. »

Elle l’était.

Sa peau n’avait pas ce toucher irritant, gras à force d’être lisse, des épidermes synthétiques. Elsevier passa à nouveau sa main au creux des reins : on y sentait comme un léger duvet.

« Comment tu as fait ?

– J’ai copié à l’identique, mais sur un seul exemplaire, les quatre plus belles statues de Vénus. Celles de Cnide, de Capoue, de Praxitèle, et la Génitrix. Je voulais comprendre ce qu’il y a de divin chez ces femmes plutôt épaisses. Maintenant, j’ai compris.

– Moi aussi. »

 

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Le Poème au carré

Le Poème au carré

ASSISE SOUS UN GRAND TILLEUL, Alice s’ennuyait un peu. Elle venait juste de finir son livre et elle ne savait pas quoi faire en attendant l’heure du thé. Elle s’allongea sur l’herbe en prenant soin de lisser ses cheveux sur ses épaules, car depuis qu’elle avait eu dix ans il était nécessaire qu’elle se montre un peu coquette (sa sœur avait été très précise sur ce point). Ce-pendant, elle veilla à garder les yeux grands ouverts afin de ne pas retomber dans un de ces rêves interminables qu’elle faisait autrefois, et dont le récit ne lui avait valu que des réflexions désobligeantes ou, au contraire, des attentions incongrues.

Le ciel, à travers les branches du tilleul, était aussi bleu que bleu se peut, de fait Alice fut surprise de recevoir sur le coin du menton une petite goutte fraîche, puis une autre sur le bout du nez, et encore deux autres au milieu du front.

Elle s’assit précipitamment, passa sa main sur son visage et regarda le bout de ses doigts.

« C’est tout à fait étrange, dit-elle à haute voix, car elle n’avait pas perdu l’habitude de se prendre à témoin quand elle ne trouvait pas d’autre interlocuteur, mais il me semble bien qu’il s’agit de confiture. »

Elle goûta, hésitante, puis s’exclama :

« De la confiture d’orange ! Vraiment ! Vraiment ! Comme cela est cocasse ! Hélas, je crains de rêver une fois de plus. »

 

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La Perruque du juge

La Perruque du juge

« ACCUSE, LEVEZ-VOUS ! Et restez debout. »

Le petit homme se leva, minuscule et très pâle dans un costume d’emprunt trop large pour lui. Ses dents de lait appelaient l’indulgence, mais son nez était terriblement impertinent, et ses yeux avaient mille ans.

« La liste des chefs d’accusation risque d’être aussi longue que votre répugnante existence ! » dit le Juge de sous son épaisse perruque à rouleaux, ruisselant de poudre et de dégoût. Il abaissa son maillet sur le socle en bois creusé par l’âge et les chocs répétés, avec une force telle qu’on crut un moment que le Tribunal allait se fendre comme une pastèque.

« SILENCE ! »

D’un geste théâtral, le Juge déroula un acte d’accusation aussi interminable que les conquêtes de Don Juan.

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Une troll d'histoire

Une troll d'histoire

VOUS CONNAISSEZ PAS l’abominable pougnard des Locaces ? Ben c’est un pougnard qu’habite les monts Locaces. Et il est assez abominable. C’est un peu comme un troll avec une cotte d’armoise, mais en taille XXL et c’est pas des écailles d’armoise qu’il a sur le torse : c’est des excroissances naturelles. Et ça aime pas trop le poisson. Et c’est très, très susceptible. Demandez donc à Claquebec, de la taverne du Dragon Frit, si c’est pas susceptible, un pougnard. Pas plus tard qu’hier soir, tiens… Si j’étais au Dragon Frit, hier soir ? Un peu, que j’y étais. Si je suis toujours vivant ? Je veux, oui. Vu comme je suis en train de mourir de soif, un peu que je suis vivant. Ce qui s’est vraiment passé, hier soir ? Ah, je peux rien raconter avec la gorge sèche, hein… Merci. Garçon ! Une autre !

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Le Cygne de Bukowski

Le Cygne de Bukowski

J’AVAIS RENCONTRE CE TYPE AU YMCA de la 188e rue, pile au bas de Harlem. Le YMCA était dégueulasse, mais pas plus qu’un autre, et au moins c’était des dortoirs, ça craignait moins que dans les foutues piaules à quatre de la 44e.

 

 

L’immeuble de la 44e était un monstre délabré, le genre de truc tout droit sorti de Blade Runner ; massif, pseudo-gothique et raide de crasse, pas entretenu depuis 1930, avec des vieux cinglés qui se baladaient à poil à quatre heures du matin, des fumeurs de crack en tas dans les couloirs et des draps pourris de sang, de sueur, de merde et de pisse, et sûrement aussi de bave mais ça se voit moins. Une petite black en tablier bleu était passée dans le couloir tandis que je secouais les draps, pour voir s’il y en avait pas un moins pire qu’un autre, vu que le matelas était spongieux de foutre. Elle était entrée, elle avait dit : « Pigs ! All pigs ! » et elle m’avait lancé une paire de draps propres.

Pour la remercier, je lui avais refilé une caissette de fraises toutes fraîches, je sais pas trop pourquoi ni comment j’avais ça sur moi. Et deux paquets de cigarettes. Après j’avais essayé de dormir, dans la chaleur plombée de Manhattan, les klaxons des taxis et les cris des putes qui se faisaient bastonner sur la 44e. C’est comme ça qu’il tient, l’immeuble du YMCA de la 44e : au dos des putes, et sur des amoncellements de poubelles.

C’est pour ça que je suis allée à Harlem. Plus au nord. Plus frais.

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L'Accroissement mathématique du plaisir

L'Accroissement mathématique du plaisir

Le premier recueil de Catherine Dufour : vingts récits dont sept inédits !

 

« Il n'est guère surprenant que j'aie trouvé de vifs motifs d'intérêt et de plaisir dans des nouvelles comme "Vergiss mein nicht" et "L'Immaculée conception", qui mettent en scène, non sans jubilation, des relations divergentes d'événements dérangeants. De tels événements pourraient, bien entendu, apparaître dans des textes britanniques, mais je doute que leurs auteurs eussent manié l'équilibre de ces récits contradictoires sur un mode comparable. »

 

Brian Stableford

 

Science-fiction, fantastique et fantasy... Catherine Dufour aborde l'ensemble de ces domaines avec un égal bonheur et s'affirme ici comme une nouvelliste de tout premier plan.

 

Au programme :

- des préfaces signées Richard Comballot et Brian Stableford,

- vingt récits dont sept inédits,

- une postface de Catherine Dufour,

- un entretien,

- une bibliographie exhaustive.

 

Catherine Dufour est née à Paris en 1966. Elle publie son premier roman, Blanche Neige et les lance-missiles, en 2001, opus initial d'une tétralogie de fantasy goguenarde et délirante qui rencontre un succès considérable. Le Goût de l'immortalité, son premier roman de science-fiction, paraît en 2005. Nouveau succès, tant public que critique : le livre remporte peu ou prou l'ensemble des prix littéraires dédiés au genre — Grand Prix de l'Imaginaire, Prix Rosny Aîné, Prix Bob Morane, Grand Prix de la Science-Fiction Française...

 

L'accroissement mathématique du plaisir, qui réunit vingt nouvelles dont « L'Immaculée conception », lauréate du Grand Prix de l'Imaginaire 2008, est son premier recueil.

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