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Les critiques de Bifrost

Les Harmoniques célestes

Les Harmoniques célestes

Jean-Claude DUNYACH
L'ATALANTE
144pp - 11,50 €

Bifrost n° 64

Critique parue en octobre 2011 dans Bifrost n° 64

Septième volume des nouvelles de Jean-Claude Dunyach, Les Harmoniques célestes compte six textes s’étalant de 1997 à 2011, dont trois inédits, ce qui est appréciable. Des textes relativement récents dans la carrière de l’auteur, donc, avec notamment « Repli sur soie », prix Rosny ainé 2008 (initialement paru dans le Bifrost n°47). Au menu, des textes qui parlent de la mort, d’expériences ou d’inventions, de tentatives de déchiffrer la trame de l’univers…

« Les Harmoniques célestes », qui ouvre le recueil, est l’un des inédits, et la nouvelle la plus longue puisqu’elle représente à elle seule près de la moitié du livre. Un scientifique découvre l’effet apaisant qu’ont les lampes scialytiques (celles des salles d’opération) sur des patients sur le point de mourir ; des années plus tard, il est engagé par la fille d’un riche homme d’affaires qui souhaite assouvir sa soif de vengeance… Un texte ciselé aux multiples thématiques, sur la joie de la découverte scientifique, mais aussi les dangers de la science, les relations filiales, l’avenir écologique… Un condensé de Dunyach, en somme : du style, des idées, de l’humanité, une pointe d’ironie ; une belle entrée en matière.

Changement de décor et de traitement avec « La Fin des cerisiers » : une équipe de tournage hollywoodienne va apprendre à ses dépens que l’on ne foule pas impunément au pied les valeurs japonaises. Un récit qui permet à l’auteur de dépeindre avec acidité un milieu du cinéma pétri de petites lâchetés et de promesses non tenues. Mineur, malgré une gestion intéressante du climax horrifique.

« Les Cœurs silencieux » reprend une partie des thématiques du premier texte : un homme crée une substance qui décuple l’empathie de celui qui l’ingère. Sa découverte bouleverse profondément et durablement la société, générant une société utopique, tout le monde tenant compte de son prochain. Un beau rêve, qui ne va pas sans une pointe d’amertume quant à certaines des conséquences de cette invention.

Dans « Repli sur soie », un jeune homme apprend l’art de l’origami (le pliage de papier japonais) et le prolonge de telle sorte qu’à l’âge adulte, ce n’est plus le papier qu’il plie, mais bien l’univers. Au risque d’y laisser des plumes… Un texte sur le thème des fractales, dans lequel la construction, plus que toute autre chose, s’avère primordiale ; Dunyach s’en acquitte très bien, en rajoutant le petit plus d’humanité qui le caractérise, là où Greg Egan aurait sans doute livré un texte plus cérébral. Le prix Rosny aîné n’était pas usurpé.

« Aime ton ennemi » prend à bras le corps l’avenir écologique de la planète, et repose aussi sur une invention bluffante : ici, des plantes capables d’absorber les produits toxiques. Encore une bien belle idée, qui malheureusement aura sa contrepartie particulièrement atroce.

Dans « Visiteur secret », un couple en pleins ébats voit surgir de nulle part un homme en scaphandre, muet et immobile, qui reste durant des heures dans leur appartement. Une nouvelle qui revisite un thème largement usité de la SF, sous un angle inédit gentiment érotique.

Les Harmoniques célestes, recueil homogène dont le titre correspond parfaitement à son auteur, confirme une fois encore que l’on tient en la personne de Jean-Claude Dunyach l’un des meilleurs nouvellistes français. Les idées sont brillantes, exposées de manière claire sans basculer dans une sécheresse de cours magistral, l’empathie omniprésente mais bien souvent pondérée par une once d’acidité très humaine, et la construction soignée fait écho au propos. On en redemande.

Bruno PARA

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