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Les critiques de Bifrost

Le Roi sans visage

Le Roi sans visage

Hervé JUBERT
LIBRAIRIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES

Bifrost n° 12

Critique parue en mars 1999 dans Bifrost n° 12

Paris, 1860, Tandis que Napoléon III dirige d'une main de fer l'Empire français et que le baron Haussmann mène les grands travaux de rénovation de la capitale, dans l'ombre, d'étranges activités se déroulent. Des personnages de fiction abandonnent les pages de leurs livres pour s'incarner et hanter les rayons des bibliothèques. Les gargouilles fuient les églises vouées à la démolition. Des hommes apparemment sans histoire sont soudain pris de folie meurtrière avant qu'on ne les retrouve morts, le visage arraché. Autant de mystères que Georges Beauregard, agent du département Eugénie, est chargé de résoudre. Assisté d'un jeune morphopsychologue, d'un alchimiste du moyen âge et d'un authentique dragon, il a pour mission d'assurer la protection de ses concitoyens et de convaincre les démons de passage sur ce plan astral d'aller jouer ailleurs. Mal vu de ses supérieurs hiérarchiques, sa position devient franchement délicate lorsqu'une entité maléfique enlève le prince Jérôme, neveu de l'Empereur, et se propose de le renvoyer chez lui en plusieurs livraisons... Et pour couronner le tout, Beauregard apprend qu'un tueur en série est à ses trousses. Le Roi sans visage est le premier roman d'Hervé Jubert, un jeune auteur qui fit des débuts remarqués dans le fandom il y a moins d'un an. Il est vrai que la qualité de ses nouvelles tranchait nettement avec la moyenne de la production amateur, mais le passage à la forme longue demeure toujours délicat. On aborde donc ce livre avec une pointe de méfiance et, ô surprise, on en sort enchanté. Jubert n'a pas choisi la facilité en mettant en scène un univers d'une grande richesse et en multipliant personnages et rebondissements. Pourtant, tout au long d'un récit mené à un rythme frénétique, l'auteur fait montre d'une aisance digne d'un vieux routard. Le Roi sans visage ne cesse de surprendre, accumule les clins d'œil référentiels — je vous laisse le plaisir de les découvrir — et les morceaux de bravoure, parfois au détriment de la crédibilité, certes, mais l'on s'amuse tellement à suivre les multiples péripéties auxquelles sont confrontés Georges Beauregard et ses amis que l'on aurait mauvaise grâce de le reprocher à l'auteur. Au bout du compte, si Le Roi sans visage est un premier roman fort prometteur, c'est avant tout l'un des bouquins les plus jouissifs qu'il m'ait été donné de lire récemment.

Philippe BOULIER

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