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Les critiques de Bifrost

A voté

A voté

Isaac ASIMOV
LE PASSAGER CLANDESTIN
50pp - 4,00 €

Bifrost n° 85

Critique parue en janvier 2017 dans Bifrost n° 85

« La collection “Dyschroniques” remet à l’honneur des textes anciens de grands noms de la SF, nouvelles ou novellas posant en leur temps les questions environnementales, politiques, sociales, ou économiques. Si certaines questions semblent moins d’actualité, d’autres, en revanche, sont devenues brûlantes et illustrent, hélas, la pertinence des craintes exprimées par les auteurs de SF. Chaque texte est suivi d’une biographie/bibliographie de l’auteur, d’un bref historique des parutions VO/VF, d’éléments de contexte, ainsi que de suggestions de lectures ou visionnages connexes. »

A voté, d’Isaac Asimov, est un court texte à lire en ces temps d’élections américaines. Écrit en 1955, alors que les sondages d’opinion avaient déjà prouvé tant leur efficacité que leurs limites, et que la publicité politique commençait son œuvre débilitante, elle poussait au bout l’idée de l’échantillon représentatif, cher aux instituts de sondage, et la mixait avec les espoirs et craintes associés à la cybernétique et au développement des ordinateurs. Asimov y imagine un monde à venir (2008, pour info) dans lequel la démocratie a été « améliorée ». Au lieu de convoquer à intervalles réguliers des dizaines de millions de citoyens pour voter – seul le grand-père se souvient de cette époque et radote dessus dans l’indifférence –, les USA s’en remettent à un seul « électeur » dont le profil permettra de désigner les élus idéaux pour toutes les fonctions politiques. Cet électeur, qui change chaque année et représente à lui seul l’américain-type, est désigné par l’ordinateur central Multivac (« qui gère les élections ainsi que bien d’autres choses »), grande responsabilité qui donne lieu à une grande excitation citoyenne. On y voit le fantasme fifties de l’ordinateur central tentaculaire et les inquiétudes légitimes devant les dérives en gestation de la démocratie élective – en 2007 Idiocracy l’avait moqué, Trump et consorts le confirment aujourd’hui. On y voit aussi l’attrition extrême d’un corps électoral ramené à un « électeur », qui interroge nos temps d’abstention massive et/ou de populisme affirmé dans ce que les politologues nomment la politique post-vérité. Intéressant bien que peu réaliste, le texte, néanmoins, est de qualité très moyenne. Jouant sur le mystère que présente ce mécanisme électoral pour le lecteur, il ne contient que peu d’intensité dramatique et met en scène un personnage falot que sa « responsabilité » émeut in fine.

On notera, dans ce texte, une vision peu valorisante de la femme. Autres temps…

Éric JENTILE

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