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Les critiques de Bifrost

49302

49302

Nathalie LE GENDRE
MANGO Jeunesse
216pp - 9,50 €

Bifrost n° 42

Critique parue en mai 2006 dans Bifrost n° 42

En fouillant dans les affaires de sa grand-mère, Elora tombe sur un texte au titre mystérieux : « 49 302 ». Titre chiffré qui n'est autre, en fait, que le numéro matricule de Loïk Gwilherm, son ancêtre, accusé à tort d'avoir tué son meilleur ami et condamné à purger sa peine sur la station-bagne XV de la planète Syringa. Au fil des pages, Elora découvre le calvaire mais aussi la lutte de cet homme contre l'injustice et la malveillance…

Il est incontestable que l'affaire Seznec est une erreur judiciaire du siècle dernier qui restera dans les mémoires. C'est aussi l'exemple d'un combat pour la réhabilitation de la vérité et de l'honneur d'un homme. Et avec l'affaire d'Outreau, autant dire que l'écho est plus que brûlant. Où est la vérité ? Où situer les limites de la justice ? Où placer la frontière entre justice et injustice, si tant est qu'il y en ait une ?

D'une part, Nathalie Le Gendre décrit avec force et dureté l'emprisonnement de Loïk, sans nous épargner les humiliations, le goût du sang, des excréments et de la déshumanisation des bagnards. Elle appuie sur la tête de son lecteur, lui enfonce le nez dans la fange, le fait trembler de froid, de peur, bref, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Mais l'auteur ne s'arrête pas à ce qui aurait pu rester un roman presque écœurant de réalisme. Nathalie Le Gendre s'attaque aussi à la bêtise humaine, qui donne toute sa mesure dans la rencontre entre Loïk et les habitants de Syringa. Rencontre qui, finalement, permet à l'auteur de transmettre un message d'espérance.

Certes, on pourrait critiquer le fait qu'elle recourre à un principe un tantinet simplet en opposant l'humanité à un peuple en accord parfait avec la nature environnante, ne cherchant rien d'autre que la vie en harmonie et volontiers pétri de bons sentiments. Mais après tout, n'est-ce pas là le paradis rêvé par beaucoup ? Enfin davantage de paix, avec soi-même et les autres ? C'est en tout cas un moyen indiscutable de révéler la face obscure de l'Homme, de l'inspecter, la triturer et la cracher à la figure du lecteur pour le mettre face au problème. Et réfléchir.

Reste un roman de science-fiction qui s'impose comme un vibrant hommage à Guillaume Seznec, mais aussi un livre de réflexion sur l'humain, écrit avec rythme, finesse et brutalité. Un savant mélange pour ne jamais oublier les vrais combats.

Michaël ESPINOSA

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